Editorial : La loi du grand banditisme

Moïse DOSSOUMOU 17 mai 2016

Le grand banditisme est de retour. Les malfrats qui avaient semblé se terrer sont revenus avec force, et leurs forfaits parlent en leur nom. Les voyageurs qui ne peuvent s’empêcher de s’aventurer sur les routes comptent parmi les sempiternelles victimes des hors-la-loi, experts dans l’art de poser des embuscades. Ces derniers jours, un colonel des douanes à la retraite, a perdu la vie sur l’axe Djougou-Bassila. Les habitants de Cotonou, la plus grande ville du pays, n’échappent pas non plus à la loi de la terreur imposée par ces individus sur lesquels la civilisation n’a aucune emprise, décidés à troubler la quiétude des paisibles populations. Dantokpa, Ganhi, Missèbo, Zongo, Scoa Gbéto, sont les théâtres d’opérations privilégiés des délinquants qui agissent le plus souvent en plein jour, au nez et à la barbe des forces de l’ordre. Le dernier cas spectaculaire en date remonte à la semaine écoulée où un véhicule de transport de fonds a été attaqué et vidé de son précieux contenu.
La faramineuse somme de un milliard deux cent millions a été ainsi emportée en pleine ville, à quelques encablures d’une unité de police. Et depuis, ces malfrats courent toujours. Ce phénomène cyclique qui ne surprend plus les Cotonois prend des proportions inquiétantes. En s’attaquant la plupart du temps aux opérateurs économiques, pourvoyeurs d’emplois et créateurs de richesses par excellence, les braqueurs fragilisent davantage le tissu économique et social. S‘il arrive que du fait d’une agression armée, un entrepreneur en arrive à mettre la clé sous le paillasson, c’est à la fois les familles et l’Etat qui seront affectés. Déjà qu’il relève d’un exploit aujourd’hui de trouver un bon emploi et de le garder. D’où l’urgence pour les pouvoirs publics de sortir les grands moyens afin de renforcer la sécurité des personnes et des biens.
La police à elle seule, malgré la bonne volonté des hommes et des femmes qui la composent, ne peut plus contenir cette vague d’insécurité. Avec le concours de la modernité, les moyens employés par les délinquants sont de plus en plus sophistiqués alors que le renouvellement des équipements et matériels d’intervention des forces de l’ordre ne suit pas le même rythme. Quid de la formation et du recyclage des unités spécialisées auxquelles il est fait recours pour les interventions musclées et délicates ? Les Béninois, surtout ceux qui paient leurs impôts, veulent voir les forces de l’ordre mettre les hors-la-loi en déroute. C’est bien de réagir après le passage des braqueurs. Mais c’est encore mieux, si la police parvient à anticiper sur les forfaits et déjoue les plans d’attaque. Mais, d’un point de vue matériel, aucun policier ne peut prendre le risque de s’exposer au danger s’il n’est motivé par un salaire confortable.
Pour faire face à ce défi pressant, pourquoi la police, la gendarmerie et même l’armée ne combineraient pas leurs forces ? Cela participerait de la mutualisation des moyens pour des actions nettement plus efficaces. Ce n’est pas une mince affaire que d’avoir une longueur d’avance sur les individus qui ont choisi de déposséder les autres de leurs biens. A l’audace virile des malfrats, il faut opposer une riposte à la hauteur de l’affront. Mieux, des caméras de surveillance fixées discrètement dans les zones de transactions commerciales et même aux carrefours stratégiques ne seront pas de trop pour endiguer le grand banditisme. Mais au-delà de tout, c’est le renseignement qui garantit aux forces de l’ordre toute efficacité. Patrice Talon a promis révolutionner ce secteur. Il l’a encore réitéré à Abuja le week-end dernier à l’occasion du sommet régional consacré à la sécurité. Place maintenant aux actes.



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