Editorial : Un mal pour un bien !

Angelo DOSSOUMOU 25 novembre 2019

Le contraste est frappant. Au détriment du Kpayo, le secteur formel passe ses meilleures semaines de l’année. Flambée du prix de l’essence au bord des trottoirs, les habituels clients pris de court et c’est la difficile gestion d’une ruée vers les stations-services. S’il est vrai qu’avant de se procurer ce liquide précieux, il faut composer avec la chance et la patience, l’évidence est qu’un mal fait assez du bien à l’investissement privé et public et doit pouvoir ouvrir les yeux aux inconditionnels et irréductibles du kpayo. Au fait, quand la source d’approvisionnement de l’informel n’est plus aussi accessible, l’occasion est belle pour imposer des réformes salvatrices.
Mais avant, il faut forcément prendre des dispositions pour que la situation de cessation d’approvisionnement du secteur informel perdure sur la durée. Autrement, toute analyse est inopérante. Maintenant s’il en est ainsi et que la gymnastique de la revente de l’essence en provenance des stations-services est également maîtrisée, l’occasion serait belle pour véritablement envisager les ajustements nécessaires. Déjà, pour le peu de stations qui existent, le liquide le plus prisé de l’heure n’est pas toujours disponible. Pourtant, la forte demande et l’assurance que le géant de l’Est ne faiblira pas de si tôt sur sa position d’assécher les sources d’approvisionnement du kpayo, recommandent aux investisseurs de miser gros. Plus de stations, l’essence disponible en tout temps et en tout lieu, les clients bien servis et, à coup sûr, le bonheur des uns fera le malheur des autres et ce serait tant mieux pour les caisses de l’Etat.
En ce qui concerne les conséquences sociales, il revient aux gouvernants de définir une bonne politique de reconversion. Sinon, si tant est qu’il y a la possibilité aux vendeurs du kpayo de se servir dans les stations pour une revente aux abords des voies, il est tout aussi possible de les appuyer pour plus de modélisme et de sécurité dans leur commerce. De même, d’une concurrence déloyale au secteur formel, tranquillement, il serait question de formalisation et de redevabilité à l’Etat. Et si cette politique a longtemps résisté aux gouvernements successifs, avec le paramètre de la fermeture des frontières du Nigeria et l’intransigeance de Buhari pour décapiter un circuit, ne pas en profiter pour imposer des réformes salvatrices dans ce secteur, serait la plus grosse des erreurs.
Par ailleurs, à l’heure actuelle, le contexte est très favorable à la production des matières premières. Cela revient à trouver des mécanismes appropriés pour faciliter d’éventuels passages des vendeurs du kpayo à la terre. Et comme tous les secteurs d’activités sont interdépendants, penser à un développement du transport en commun serait tout aussi bénéfique dans la résolution des équations « facilité de la mobilité urbaine » et « reconversion pour la production ». De toutes les façons, les larmes n’empêchent pas de voir. Alors, rions plutôt pour une aubaine qui s’offre au pays et travaillons-y tous pour en tirer profit.
En fin de compte, si personne ne peut prédire le temps que durera la tendance de l’affluence qui tourne largement en faveur des stations-services, il est tout de même certain que le contribuable peut être rassuré qu’en se soumettant à la logique des rangs et du secteur formel, il contribue au développement de son pays. Pour la suite, il ne reste qu’à donner un coup de fouet au partenariat public-privé. Enfin, l’occasion fait le larron. Alors, tant pis si l’Etat n’en profite pas.



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