En vérité : Du sport à la politique

Moïse DOSSOUMOU 26 mars 2019

Comme un seul homme, le peuple béninois s’est mobilisé derrière les Ecureuils pour les pousser à la victoire. Du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest, les cœurs battaient à l’unisson. Habités par le désir de voir leur pays briller sur la scène sportive continentale, les Béninoises et les Béninois, ont mis de côté ce qui les divise pour se préoccuper de l’essentiel, c’est-à-dire ce qui les unit. Les dizaines de milliers de supporters qui ont envahi l’enceinte du stade de l’amitié de Kouhounou ont effectué le déplacement pour une cause précise : la victoire du onze national. Dans le lot, serrés les uns contre les autres, les partisans du gouvernement et les contempteurs de ses actions étaient habités par une seule et unique volonté. Dans les maisons, les centres de jeunes ou de spectacles, assis ou debout devant les postes téléviseurs, tous rêvaient de voir le Bénin participer à nouveau à une phase finale de la Coupe d’Afrique des Nations.
C’est cela une Nation. A des moments donnés, lorsque la situation ou l’enjeu le recommande, il faut savoir tout oublier pour se concentrer sur l’essentiel. Les disputes ou mésententes seront toujours d’actualité, mais il faut savoir les dépasser par moments afin qu’elles ne prennent pas le dessus sur ce qui rassemble. « La langue et les dents appelées à cohabiter toute une vie se querellent », disait Seydou Badian dans son célèbre ouvrage « Sous l’orage ». La pensée unique étant définitivement bannie dans ce pays, il va de soi que sur une même question, il y ait plusieurs approches. D’innombrables intelligences réunies ne peuvent avoir les mêmes réactions sur des questions données. Il est normal et souhaité qu’il y ait plusieurs sons de cloche. C’est cela l’essence même de la démocratie. Car, « c’est de la contradiction que jaillit la lumière », dit-on souvent.
Cette victoire des Ecureuils obtenue dans un contexte de crise pré-électorale où les acteurs politiques sont invités à œuvrer pour le consensus devant permettre l’organisation des élections législatives inclusives en 2019 devrait amener les uns et les autres à revoir leur posture dès que l’intérêt général le recommande. Dimanche dernier, sans se faire prier, partisans du chef de l’Etat et opposants ont vibré à l’unisson. Dans l’euphorie générale après le match, ils se sont donné des accolades fiers de voir leur pays renaître de ses cendres sur le plan sportif. Déjà en 2003, lorsque le Bénin se qualifiait pour la première fois à cette compétition continentale, la même osmose vécue et ressentie dimanche dernier fut d’actualité. C’est dire que là où la politique peine à réunir, le sport y parvient avec une facilité déconcertante. En ces heures de controverses, l’urgence d’une introspection s’impose.
La classe politique divisée pour l’instant et qui prend son temps pour trouver la solution a reçu une grande leçon dimanche dernier. Loin des querelles politiciennes, les populations ont communié ensemble autour de l’intérêt général du moment, la qualification du Bénin à la Can. Le personnel politique devrait faire de même. Ne pas trop tirer sur la corde et savoir s’arrêter, c’est ce qui doit être fait maintenant. En dépit de leurs opinions divergentes, les politiciens béninois ne sont pas des ennemis. Ils savent discuter et avancer lorsque le besoin s’impose. Le Bénin pourrait vivre des heures difficiles si les chicaneries actuelles ne sont pas très vite conjuguées au passé. Les populations ont montré la voie dimanche. En dépit de leurs divergences, elles veulent que le Bénin avance. La classe politique devrait faire de même. Qui a tort ? Qui a raison ? Là n’est plus le problème. Ce qui doit être, c’est que les élections législatives de 2019 soient véritablement inclusives. En dehors des passions, il faut œuvrer dans ce sens, ici et maintenant.



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