En vérité : L’ « erreur » de Niamey

Moïse DOSSOUMOU 7 octobre 2019

L’opinion est habituée à ses déclarations fracassantes. Il a d’ailleurs l’habitude de dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas. C’est de notoriété publique que Nicéphore Soglo n’use pas de la langue de bois pour s’exprimer. Quand il veut s’exprimer, il le fait sans détour. En déplacement ces derniers jours à Niamey, la capitale du Niger, l’ancien chef de l’Etat a fait parler de lui. Invité à un Forum consacré à la consolidation de la démocratie en Afrique, « Hercule », passionné par les sujets de cette nature, s’est jeté à l’eau. De toutes les interventions qui ont meublé ces trois jours de travaux, la sienne retient particulièrement l’attention. Se prononçant sur le terrorisme qui s’incruste comme un os dans la gorge des pays africains, Nicéphore Soglo a mis les pieds dans le plat. A l’en croire, la source de ce mal pernicieux à multiples tentacules, ce sont les pays du Golfe.
L’Arabie Saoudite et le Qatar constitueraient le terreau dans lequel s’implante cette horrible réalité qui préoccupe les pays du monde entier. Celui qui a dirigé le Bénin de 1991 à 1996 croit savoir que ce sont les deux pays sus indiqués qui financent à tour de bras les mille et une organisations spécialisées dans la promotion de la terreur. Libre penseur, intervenant en son nom propre, responsable de ses propos, Nicéphore Soglo a dû peser le pour et le contre avant de prendre la décision de sortir cette « bombe », plus encore, à une occasion aussi solennelle que celle-là. Effarouchés, les services gouvernementaux n’ont pas tardé à de s’intéresser de près à cette déclaration. Très vite, le ministère des affaires étrangères est monté au créneau. Par le biais d’un communiqué sans signataire mais frappé du sceau du Point focal communication dudit ministère, il faut comprendre que le Bénin réprouve cette intervention.
« Le gouvernement béninois rejette et condamne avec la plus grande fermeté ces propos. La République du Bénin est un pays pacifique qui entretient des liens de coopération avec les Nations éprises de paix et de justice. Le gouvernement béninois saisit l’occasion pour réaffirmer toute son amitié et sa solidarité aux pays indexés ». Telle est la substance de ce communiqué en date du 03 octobre dernier qui pèche beaucoup par la forme. Mais là n’est pas le débat. En tout cas, pas pour l’instant. Ce n’est pas la première fois que Nicéphore Soglo fait des déballages sur des pays. La France particulièrement est la cible répétée des « attaques » du leader des « houézèhouè ». Mais jamais, il n’a plu au gouvernement de le reprendre à cet effet. Si cette fois, les services officiels ont cru devoir réagir, c’est peut-être parce qu’il y a péril en la demeure.
Les pays du Golfe sont connus pour leur grande générosité lorsqu’il s’agit de financer divers projets. Le Bénin ne cracherait pas sur un pactole en provenance de cette partie du globe par ces temps où le Programme d’actions du gouvernement est à la quête de son financement intégral. Mais l’argument le plus pertinent qui serait à la base de cette prompte réaction officielle, c’est bien la crainte d’une attaque terroriste visant le Bénin. Dans la sous-région, le Burkina-Faso, le Mali et le Nigéria paient depuis des années un lourd tribut du fait des attentats répétés dont ils sont la cible. Certes, des chefs d’Etat et pas des moindres, Emmanuel Macron en l’occurrence ont tenu les mêmes propos bien avant Nicéphore Soglo. Mais il aurait mieux valu que l’ancien chef de l’Etat évite d’attirer l’attention de ces organisations sur le Bénin qui, jusqu’ici a été épargné de ces attaques meurtrières.



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