Rentrée littéraire à l'EFES Sapienta à Porto-Novo : La pièce ‘’Le gong a bégayé'' jouée devant l'auteur Apollinaire Agbazahou

Karim O. ANONRIN 20 janvier 2020

L’inspecteur de l’enseignement secondaire de second degré à la retraite et homme de lettres, Apollinaire Agbazahou avec son ouvrage ‘’Le gong a bégayé’’ paru à Laha Editions était à l’honneur ce samedi 18 janvier 2020 à l’Ecole de formation des enseignants du secondaire (EFES) Sapienta à Porto-Novo. C’était à l’occasion de la rentrée littéraire de cette prestigieuse école privée de formation des transmetteurs du savoir des collèges et lycées. Devant l’invité d’honneur Apollinaire Agbazahou et en présence des responsables de l’établissement au nombre desquels le Directeur général, Jacob Tossa, le Directeur général adjoint, Honoré I.P. Idjidina, le Directeur des études, Jean Delphonse Mèlé, pour ne citer que ceux-là, le groupe théâtral de l’EFES Sapienta a joué la pièce ‘’Le gong a bégayé’’ à la grande satisfaction de l’auteur et des étudiants de l’établissement venus nombreux vivre quelques faces cachées de l’histoire du Danxômè bien que l’ouvrage de Apollinaire Agbazahou soit de la fiction.
‘’Le gong a bégayé’’ de Apollinaire Agbazahou est un chef-d’œuvre qui met en scène l’histoire du fils d’un roi du Danxomè appelé Vidaho qui a commis le crime de lèse-majesté en voulant changer le cours normal des choses dans le royaume par ces élans modernistes au grand désarroi de son père et au mépris des règles préétablies par ses ancêtres que loue souvent Kpanlingan, l’équivalent du griot dans le royaume du Danxomè. Ceci, en mettant en danger la vie de Kpanlingan dans un premier temps, sa propre vie dans un second temps et en finissant par s’assagir en fin de compte après avoir appris l’histoire du royaume qu’il est appelé à diriger un jour. Vidaho a tellement appris la leçon qu’il a fini par convier tous ceux qu’il a contredits par le passé à venir se joindre à lui pour boucher de leurs doigts, la jarre trouée, symbole de l’unité.

Le mot de l’auteur après la mise en scène de la pièce.
Apollinaire Agbazahou

« ...Je suis comédien, metteur en scène, dramaturge. Ce n’est pas facile de présenter une pièce de théâtre. Pour vivre le texte sur scène, il faut un minimum de 4 mois de préparation. C’est pour ça que je crois que nos jeunes collègues qui ont présenté la pièce ont fourni un travail de titan et il faut les féliciter (...) J’ai écrit cette pièce en une nuit. On était à la première édition du Festival de Danxomè. L’actuel Maire d’Abomey m’avait demandé si je pouvais écrire quelque chose dans le cadre de ce festival. Dans ma réflexion, je n’ai vu qu’une seule chose : conflit de générations. Les jeunes d’aujourd’hui, comment se comportent-ils ? Ils échouent toujours quand ils ne tiennent pas compte de ce que les anciens disent. C’est à dessein que j’ai mis en scène un Vidaho frondeur qui s’oppose à un roi. Mais finalement, à force de patience et en utilisant la politique de fer dans un gant de velours, le roi a fini par le rallier à sa cause et lui-même a regretté tout ce qu’il avait dit (...) Quand je voulais sortir inspecteur, le thème d’animation que j’ai choisi, c’est ’’l’enseignement des pièces de théâtre en classe’’. J’ai démontré que les professeurs de Français enseignent le théâtre comme le roman, comme la nouvelle. Ils sortent la littéralité de l’ouvrage ; c’est-à-dire qu’ils sortent ce qui fait la littérature dans l’œuvre. On n’en a pas besoin. Le théâtre ne s’approprie que sur scène. Le théâtre est fait pour être joué. Quand le théâtre est dans un livre, il n’est pas théâtre. Le théâtre, c’est la gestuelle, la diction, les mimiques, la manière de se regarder. Le théâtre n’est pas fait pour être lu en classe comme nous le faisons. Si nous enseignons le théâtre en classe et que ça ne débouche pas sur ce qu’on appelle la lecture scénique, nous n’aurions rien fait. Ce qui est important, c’est le donner à voir parce qu’il y a trois écritures dans une pièce de théâtre. Il y a ce que l’auteur même a écrit. Lui, quand il écrit, il porte son spectacle dans la tête. Il y a ce que le comédien, celui qui a pris un rôle dans la pièce, a comme idée du rôle qu’on lui a confié. Enfin, il y a la lecture du spectateur lui-même... »

Trois questions à Jean Delphonse Mèlé, Directeur des études de l’EFES Sapienta
L’Ecole de formation des enseignants du secondaire (EFES) Sapienta a reçu l’Ecrivain Apollinaire Agbazahou pour sa rentrée. Pourquoi ce choix ?

D’abord, avant de répondre à votre question, je dois rappeler qu’ici à l’EFES Sapienta, nous avons l’habitude d’organiser des journées culturelles à l’intention de nos jeunes collègues étudiants et chaque journée a toujours une empreinte. Soit c’est la musique, soit du théâtre, soit c’est une conférence. Pour cette année, nous avons voulu placer la rentrée académique sous le signe de la littéraire. Nous avons donc voulu que ça soit une rentrée littérature, bien entendu qu’à l’EFES Sapienta, nous avons d’autres filières de formation que celles littéraires. Nous avons choisi parler de la littérature parce que les élèves et les étudiants ne s’intéressent plus trop à la chose littéraire. Les œuvres littéraires qui sont produites sont délaissées. Nos écoliers, nos élèves et nos étudiants ne lisent plus alors que la lecture est primordiale pour l’équilibre intellectuel en général. C’est rare de rencontrer même des gens qui puissent parler sans faire des fautes. C’est difficile pour des gens de communiquer à l’écrit comme à l’oral. On ne peut pas bien parler sans prendre l’habitude d’écouter ceux qui savent le faire et l’Ecrivain Apollinaire Agbazahou fait partie de ceux-là.

Pour cette rentrée littéraire, vos étudiants ont présenté la pièce de théâtre ’’ Le gong a bégayé’’ de Apollinaire Agbazahou. Pourquoi cette œuvre littéraire et non une autre ?
Nous avons fait le choix de l’ouvrage ’’Le gong a bégayé’’ pour plusieurs raisons. Cette pièce théâtrale est pour nous un chef-d’œuvre qu’il faut absolument lire et même jouer si l’on est homme de théâtre. Cette pièce galvanise la jeunesse. Elle pose un problème de conflit de générations. Elle parle du modernisme et de la tradition. Est-ce que tout ce qu’il y a dans nos traditions doit être rejeté ? Est-ce qu’il faut accepter tout ce que la vie moderne nous apporte ? Comment faire la part des choses et tirer le bon grain de l’ivraie ? Comment faire pour que la jeunesse d’aujourd’hui, comme l’a dit Jean Pliya dans ’’Les tresseurs de corde’’, tire profit de l’héritage culturel que leurs aïeuls leur ont légué. C’est la racine qui nourrit l’arbre. La racine sous terre n’est pas aussi belle que les feuilles et les fleurs, mais c’est elle qui les nourrit. L’autre chose est de questionner sur la responsabilité du jeune dans son pays ; c’est-à-dire le patriotisme. La pièce a évoqué ces problématiques et c’était utile pour nous de les partager avec nos étudiants pour mieux les aguerrir.

Votre mot de fin
Mon mot de fin me renvoie encore à la pièce ‘’Le gong a bégayé’’ qui a parlé de l’union des filles et fils du royaume avec le symbole de la jarre trouée. Cette question reste encore d’actualité. Nous devons nous unir pour le développement de notre pays le Bénin. Nous espérons avoir touché nos jeunes étudiants parce que l’avenir de ce pays c’est eux.

Propos recueillis par Karim Oscar ANONRIN



Dans la même rubrique