Après les propos mielleux sur les syndicalistes : Boni Yayi doit passer à l’acte

Arnaud DOUMANHOUN 3 février 2014

Boni Yayi doit ramener la balle à terre

Elles ont sans doute la magie d’adoucir le 1er magistrat. Alors que face aux jeunes il y a une semaine, le Chef de l’Etat était belliqueux, face aux femmes bénéficiaires des microcrédits samedi dernier, il a baissé le ton. « Todjinou est mon ami, Dieudonné Lokossou, Paul Essè Iko, Gaston Azoua, je les adore tous… Vous les femmes, vous savez comment leur parler. Vous savez comment tenir les hommes… Il faut que la situation du pays revienne à la normale », a déclaré Boni Yayi. Des propos d’un bon père de famille qui contrastent avec ceux tenus devant les jeunes : « Ils sont tous dans ma main… je les attends... je vais bondir sur… ils verront… ils peuvent marcher maintenant… je vais leur acheter des rangers… ». Qu’est-ce qui a bien pu changer dans la situation sociopolitique pour que du jour au lendemain, l’humeur de Boni Yayi passe de celle d’un homme coléreux à celle d’un gentilhomme ? Peut-être bien la teneur des critiques de l’opposition et de la société civile sur ses propos, les explications légitimes qui sous-tendent ces critiques, des remords ou pourquoi pas comme on en a l’habitude, une stratégie pour mieux endormir l’adversaire, l’appâter avant les négociations gouvernement syndicats qui s’ouvrent ce jour. Tout compte fait, pour les Béninois, ce modèle qui consiste à endormir la population en servant des propos du genre « je vous aime…je vous porte dans mon cœur » est devenu trop flagrant et désuet. Au contraire, le peuple a, une nouvelle fois, eu l’occasion de constater la dualité des propos du 1er magistrat qui peut passer du blanc au noir. D’ailleurs à propos, ses adversaires ont tôt fait de découvrir dès ses premières années de règne au sommet de l’Etat, un homme impulsif, très changeant et fin calculateur.

Des paroles aux actes
Et pour le président Boni Yayi qui a actuellement le dos au mur dans la crise qui l’oppose aux syndicalistes, souhaiter « que la situation du pays revienne à la normale », c’est d’abord reconnaître qu’un malaise sévit et met à rude épreuve la paix et la cohésion sociale. Et sur cet aspect, Boni Yayi a vu juste, au regard des grèves qui paralysent les secteurs de la santé, de la justice, de l’éducation, bref de l’administration publique en général. Mais, pour un retour à la normale, il urge que le chef de l’Etat, en premier, écoute ses administrés et réponde en toute franchise à leurs préoccupations. La bonne foi proclamée devant les femmes doit se traduire en actes concrets, pour que cette fois-ci encore, Yayi ne soit pas pris en flagrant délit de ruse. Il faut qu’il s’appuie sur un réalisme de l’immédiat. Le tout ne suffira pas de montrer sa bonne foi devant les femmes, il devra être pragmatique lors des négociations gouvernement-syndicats qui s’ouvrent ce jour. Déjà, le peuple ne lui en voudrait pas de faire le minimum de sacrifice demandé par les syndicalistes avant toute négociation à savoir la restitution des défalcations et de reconnaître qu’il a eu tort de réprimer la marche du 27 décembre dernier. Ne dit-on pas qu’il n’est pas possible de faire des omelettes sans casser des œufs ? Après des mois intenables de crise, tout ce que le peuple veut, c’est la paix et du pain pour vivre plus heureux.



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