Assemblée nationale : Les députés rejettent le projet de budget général de l’Etat, gestion 2014

Karim O. ANONRIN 20 décembre 2013

Les députés à l’Assemblée nationale ont rejeté hier le projet de budget général de l’Etat, gestion 2014. C’était par un vote au bulletin secret donnant un résultat de 39 voix pour, 44 voix contre et 00 abstention après un examen en plénière qui a démarré le mardi 17 décembre dernier puis suspendue dans la matinée du mercredi 18 décembre 2013. Rien ne présageait du rejet de ce budget jusqu’à la motion émise dans la nuit du mardi au mercredi dernier par le député Eric Houndété et quelques autres de ses collègues de la minorité parlementaire pour demander que le vote du budget général de l’Etat, gestion 2014 soit fait au bulletin secret. Ceci, conformément aux dispositions de l’article 57.2 du règlement intérieur qui stipule qu’ « en toute autre matière et à la demande de cinq (5) députés au moins, il est procédé par scrutin public ou par scrutin secret, sans préjudice des dispositions des articles 55 alinéa 2, 56 alinéa 3 et 64 alinéa 2… ». Même l’avis contraire à cette proposition du député Eric Houndété émis par les députés Karimou Chabi Sika, Djibril Mama Débourou et autres qui ont préféré le vote à main levée ne présageait aucunement d’un rejet du projet de budget général de l’Etat, gestion 2014. En effet, face à ces deux motions émises sur le mode de scrutin, le président de l’Assemblée nationale, le Professeur Mathurin Coffi Nago, a suggéré que les deux camps antagonistes aillent trouver un consensus. Ceci, après avoir suspendu la séance plénière jusqu’à ce jeudi.

Nago tranche en optant pour l’application des textes réglementaires
A la reprise de la séance plénière hier consacrée à l’examen du projet de budget général de l’Etat, gestion 2014, le président de l’Assemblée nationale, le professeur Mathurin Coffi Nago, a accordé la parole aux deux camps antagonistes sur le mode de scrutin. En premier lieu, c’est le député Eric Houndété de la minorité parlementaire qui a pris la parole pour réitérer son souhait de voir appliquer les dispositions de l’article 57.2 du règlement intérieur de l’Assemblée nationale. « …Je voudrais vous féliciter pour les efforts que vous faites et que vous continuez de faire pour que la paix soit. C’est difficile (…) je voudrais rappeler que nous avons fait une demande régulièrement enregistrée, une demande que vous avez acceptée, une demande à laquelle vous avez fait droit. Vous avez annoncé une suspension après avoir demandé des explications sur la façon dont nous pensons que cette demande pouvait être mise en œuvre. Vous avez demandé la mise en œuvre du matériel du scrutin et nous avons engagé une suspension assise lorsqu’une autre demande est intervenue. Le fait de nous avoir fait droit commandait que vous constatiez et déclariez l’irrecevabilité de la demande qui a suivi. Lorsque vous avez demandé des explications, je vous ai dit que la motivation de notre demande est la sécurité. Et le règlement intérieur ainsi que la Constitution nous reconnaît notre droit à la sécurité et même votre devoir de nous protéger. Le règlement intérieur nous donne le droit d’aller à un vote secret tel que vous l’avez accepté. Malheureusement, votre demande de discuter avec nos collègues n’a pas pu avoir lieu pour deux raisons. Pour la première du fait que nous sommes dans nos droits et pour la deuxième du fait que nos collègues n’ont pas cru devoir nous faire signe pour solliciter des échanges… », a déclaré le député Eric Houndété. Quant au député Djibril Mama Débourou, il a laissé entendre que la rencontre n’a pu avoir lieu pour raison de fatigue. « …Je ne me crois pas le droit de spéculer sur l’insécurité ou la sécurité d’un député à l’Assemblée nationale. Mais je vais vous dire que moi, je suis parfaitement en sécurité aussi bien à l’Assemblée nationale qu’en dehors de l’Assemblée nationale. Je n’ai pas entrepris ici une démarche illégale. Je suis parfaitement dans la légalité constitutionnelle. Je me serais rebellé si d’aventure, vous n’aviez pas accédé à ma requête. Donc, vous ne pouviez faire que ce que vous aviez fait. Ma requête est tout à fait légale. C’est vrai qu’il n’y a pas eu d’échanges entre les deux groupes. Nous avons fini la séance plénière hier et je suis arrivé chez moi après 9 heures et il me fallait un petit temps de repos parce que je ne suis pas un robot. Je souhaite que nous utilisions cette matinée pour entreprendre les discussions… », a déclaré le député Djibril Mama Débourou. Il a été appuyé par certains de ses collègues de la majorité parlementaire au nombre desquels les députés Karimou Chabi Sika et Sacca Lafia. Néanmoins, le président de l’Assemblée nationale, le Professeur Mathurin Coffi Nago, a préféré trancher en faveur de l’application des dispositions de l’article 57.2 du règlement intérieur de l’institution ; c’est-à-dire la requête du député Eric Houndété et consorts pour le vote au bulletin secret. C’est ce qui a été fait et les résultats sont désormais connus. La loi de finances, gestion 2014 a été rejetée devant le Ministre des finances et de l’économie, Jonas Aliou Gbian et d’autres membres du gouvernement.

Le Chef de l’Etat risque d’exécuter le budget 2014 par ordonnance
Le Chef de l’Etat, le président Boni Yayi, a le dos au mur après le rejet du projet de budget général de l’Etat, gestion 2014. En effet, à l’étape actuelle, il ne peut que se référer aux dispositions de la Constitution du 11 décembre 1990 en son article 68 qui stipule « Lorsque les institutions de la République, l’indépendance de la nation, l’intégrité du territoire national ou l’exécution des engagements internationaux sont menacées de manière grave et immédiate et que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics et constitutionnels est menacé ou interrompu, le Président de la République, après consultation du Président de l’Assemblée Nationale et du Président de la Cour constitutionnelle, prend en conseil des Ministres les mesures exceptionnelles exigées par les circonstances sans que les droits des citoyens garantis par la Constitution soient suspendus. Il en informe la nation par un message. L’Assemblée Nationale se réunit de plein droit en session extraordinaire ». Enfin, les députés vont fixer le délai au-delà duquel le président de la République ne peut plus prendre de mesures exceptionnelles dès que le Chef de l’Etat va déclencher l’ordonnance. Ceci, conformément aux dispositions de l’article 69 de la Constitution du 11 décembre 1990 qui stipule « Les mesures prises doivent s’inspirer de la volonté d’assurer aux pouvoirs publics et constitutionnels dans les moindres délais, les moyens d’accomplir leur mission. L’Assemblée Nationale fixe le délai au terme duquel le Président de la République ne peut plus prendre des mesures exceptionnelles ».



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