Du Changement à la Refondation : Djougou, finalement un fief bon marché

Naguib ALAGBE 23 septembre 2014

Marches, prières et meetings tous azimuts, le tout, dédié à la gloire du régime. Bref, la cité des Kpétoni arbore fièrement ses apparats de fief autoproclamé du pouvoir en place. Et pourtant, Djougou demeure à ce jour le parent pauvre des réalisations du régime. Quoi ? Un marché à peine plus grand que Tchakitibam, (celui qui dessert le quartier Arafat à Parakou) et un centre hospitalier départemental presque tiré par les cheveux, dont les travaux démarrés depuis près d’une décennie, sont en cours jusqu’à ce jour. Et le comble du simulacre, ce centre encore en chantier a été mis en service et fonctionne avec en tout et pour tout, deux médecins dont un généraliste et un pédiatre. Deux médecins pour un centre hospitalier départemental. Voyez par vous même qu’il ne saurait y avoir là, matière à désengorger l’hôpital de l’Ordre de Malte qui quant à lui, a été badigeonné et promu, hôpital de zone. Djougou demeure à ce jour, sans une gare digne du nom alors même que le transport est de tout temps l’activité la plus en vogue.
Une moisson particulièrement maigre
C’est donc à cela que tient l’indéfectibilité du soutien de la ville aux six sorties internationales, au système en place. Une moisson particulièrement maigre, comparativement à celle des villes voisines. Natitingou par exemple pourrait se prévaloir de la flopée de réalisations dont elle a bénéficié à l’occasion de la célébration de la fête de l’indépendance qu’elle a abritée. Parakou, pour sa part est sans commune mesure l’un des plus grands bénéficiaires des réalisations sous l’ère Yayi. Aéroport international, port sec, hôpital d’instruction des armées, logements sociaux, et bientôt la traversée de Parakou pour ne citer que ces infrastructures. À cela viennent s’ajouter naturellement les réalisations à l’occasion du 1er août 2009. A-t-elle un secret ? Rien de particulier si ce n’est la pression Gbadamassi. Lui au moins sait comment négocier ou même exiger tel ou tel autre projet au profit de ses mandants. Pesant de tout son poids et menaçant au besoin de retirer au régime son soutien. On me dira qu’il n’y en a pas beaucoup par ici, qui soient de l’acabit de Gbadamassi certes, mais encore faut-il qu’ils aient de l’ambition pour cette ville qui leur a tout donné. Hélas ! tel n’est malheureusement pas le cas. Et ils en sont, toute honte bue, à s’accrocher bec et ongles à leurs intérêts personnels et égoïstes. L’essentiel pour eux étant d’être sans discontinuer, ministres, députés et DG. Alors même que la célèbre place de l’indépendance ayant accueilli différents chefs d’Etat au fil des ans date de 1960.
Un grenier électoral bon marché
Pour un électorat, en voilà un, toujours prêt à tout donner sans jamais rien demander en retour. Les faits sont là, patents. Djougou fait partie des rares localités dont le soutien au pouvoir Fcbe, de 2006 à ce jour, n’a varié d’un iota. Il suffit de se référer aux résultats issus des échéances électorales successives pour s’en convaincre. Le fait est que la troisième ville du Bénin en terme de population, après Cotonou et Abomey-Calavi, continue de faire confiance, pour l’heure, à des marchands électoraux qui pour elle, n’ont aucune ambition. Conséquence, les conditions de vie des populations ne se sont guère améliorées sous l’ère Yayi.

Une jeunesse livrée à elle-même
Prenez les, l’un après l’autre, et interrogez les sur ce qu’ils préconisent pour cette population en grande majorité dans la fleur de l’âge. Et vous comprendrez qu’en réalité, ces pseudo leaders ignorent tout des besoins par ici. Djougou est pratiquement la seule ville, pour sa taille et son envergure, où rien n’a été fait à ce jour pour mettre la jeunesse au travail. Absolument rien. Pas la moindre usine ni quoi que ce soit dans ce sillage. Du coup, manipulée sans cesse, et livrée à elle même, cette jeunesse qui déborde d’énergie a fini par se convaincre de ce que l’émigration est la seule voie par laquelle elle pourrait se réaliser. Les récents rapatriements en date en provenance de Libye en disent assez. Et ce n’était que la face visible de l’iceberg. Autant vous le dire, il se note à Djougou, une ruée effrénée vers l’immigration clandestine. Libye, Algérie, Guinée équatoriale, mais également la Belgique, l’Allemagne et l’Italie sont entre autres destinations vers lesquelles ils exportent leur désespoir. Sans que cela n’émeuve personne. Pendant ce temps, on marche, on prie et on soutient. C’est ce qu’on sait faire le mieux. Marchons donc, tant que cela profite à quelques-uns, et pour le reste, croisons les doigts. Dieu pourvoira.



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