Loi sur le renseignement et la protection des libertés : Les inquiétudes des Fcbe

La rédaction 13 mars 2017

Au creux de la vague, plusieurs propositions de lois, en passe d’être examinées par les députés. Il s’agit notamment de la Proposition de loi relative au renseignement en République du Bénin, de la Proposition de loi portant organisation du secret de la défense nationale, de la Proposition de loi portant identification des personnes physiques en République du Bénin, de même que celle portant code numérique en République du Bénin. L’intérêt suscité par chacune de ces propositions de lois, tient forcément aux liens qu’elles pourraient entretenir avec l’exercice et la protection des libertés démocratiques. La polémique enfle donc, et les Forces cauris pour un Bénin émergent de s’inviter dans le débat à travers un certain nombre de propositions visant la protection et le renforcement des libertés. Lire ci-dessous le communiqué rendu public par la Coordination Fcbe…

COMMUNIQUE DE L’ALLIANCE FCBE SUR CERTAINES PROPOSITIONS DE LOIS SOUMISES A L’EXAMEN DEL’ASSEMBLEE NATIONALE
Lors d’un séminaire organisé récemment à Dassa, les députés ont eu à connaitre des projets et propositions de lois dont quatre sont d’une extrême sensibilité à savoir :
• Proposition de loi relative au renseignement en République du Bénin ;
• Proposition de loi portant organisation du secret de la défense nationale ;
• Proposition de loi portant identification des personnes physiques en République du Bénin ;
• Proposition de loi portant code numérique en République du Bénin.
L’Alliance FCBE se doit de rester fidèle à l’orientation tracée par notre déclaration du 28 février 2017 et qui appelait à la vigilance du peuple béninois par rapport à un pouvoir enclin aux actes anti démocratiques et liberticides. C’est pour cela que nous voulons, par le présent communiqué, prendre notre part de cette veille citoyenne nécessaire en attirant l’attention des députés, des partis politiques, de la société civile et de tous les démocrates sur la prévention des dérives que pourraient induire ces lois si l’on n’y prend garde.
Dans l’ensemble, les arguments qui justifient le souhait des initiateurs de voir adopter ces lois par la Représentation Nationale, reposent entre autres sur les menaces qui pèsent sur la sécurité dans notre pays et la nécessité d’encadrer juridiquement les mesures à prendre à cet effet. Ces objectifs sont nobles et il ne viendrait à l’esprit d’aucun patriote de s’y opposer.
Mais, l’Etat de droit et la démocratie ont des exigences et appellent des règles dont la disparition ou la restriction signifierait leur arrêt de mort. Ainsi les impératifs sécuritaires, aussi légitimes soient-ils, se doivent d’être conciliés avec lesdites règles. C’est à l’aune de cette exigence fondamentale que nous appelons la Représentation Nationale à examiner minutieusement ces lois, afin qu’elles ne compromettent pas les libertés chèrement acquises par notre peuple depuis février 1990.
Il conviendrait par exemple de s’interroger,sur l’Art4 de la loi relative au renseignement en République du Bénin, qui dispose : « les techniques de recueil de renseignement sont soumises à l’autorisation préalable du Président de la République après information du Procureur Général de la République. Il est assisté par le Coordonnateur national du renseignement qu’il nomme par décret ». Il apparait clairement que ces lois visent à tout concentrer dans les mains du Président de la République. Celui-ci risque, même à son corps défendant, de devenir « le gros œil et la grande oreille » qui ambitionne de tout voir et de tout entendre au plan national.
Les Honorables députés qui ont proposé ces lois ont perçu le danger de la possibilité d’abus. C’est pour cela qu’ils tiennent en dehors de tout ceci les membres des institutions qui ont un rôle à jouer dans l’éventuelle mise en accusation du Président de la République et des membres du gouvernement. En effet il est écrit, parlant des membres de ces institutions (cf. exposé des motifs) : « Toute violation du secret de leurs communications ou autres allant dans le sens d’une possible fragilisation de leurs statuts est donc interdite, sauf en cas de poursuite judiciaire ». C’est très juste, mais il faut aller plus loin. Il n’y a pas que sa mise en accusation qui peut amener le Président de la République à vouloir « fragiliser »un citoyen. Il peut y avoir aussi d’autres raisons qui le pousseraient à détruire, par exemple, des opérateurs économiques ou des adversaires politiques. Tous les citoyens doivent bénéficier d’une protection contre les abus éventuels d’un Président de la République qui détiendrait exclusivement un pouvoir de pression considérable sur les populations. Il faudra donc retirer de ces lois tout ce qui peut concourir à en faire des instruments de surveillance généralisée abusive contre les citoyens. Ces lois se doivent en effet, d’être une avancée à la fois dans la protection sécuritaire de notre pays et de nos compatriotes mais également de l’Etat de droit et de la démocratie.
De ce point de vue, l’Alliance FCBE suggère l’instauration d’un contrôle juridique de ces lois par des autorités extérieures indépendantes.
Dans cette perspective, comme c’est le cas pour les grandes démocraties, il faudra envisager la mise en place d’une autorité administrative indépendante qui comprendrait en son sein, outre des magistrats, des députés issus de la majorité et de l’opposition dont l’objectif prioritaire serait le contrôle de l’utilisation des techniques d’accès à l’information mises à la disposition des services compétents. Ce contrôle pourrait être assuré par la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL), qui existe déjà et dont l’avis aurait dû être requis sur ces propositions de lois. Nous nous réjouissons qu’à ce contrôle s’ajoutera l’avis conforme de la Cour Constitutionnelle.
Le deuxième niveau de contrôle souhaitable a été évoqué dans la proposition de loi : « le coordonnateur national présente au minimum deux fois par an, aux membres habilités de la commission en charge de la défense de l’Assemblée Nationale, un rapport des activités des organismes de renseignement, dont le format est à définir de commun accord ». A notre avis, il faut aller au-delà d’un simple rapport pour exiger un contrôle parlementaire accru qui rentrerait dans le cadre du contrôle de l’action gouvernementale.
Vive la démocratie !
Vive l’Etat de droit !
Vive les droits de l’homme !
Vive le Bénin !
La Coordination Nationale FCBE



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