Malversation financière dans les administrations locales : La décentralisation gangrénée par la corruption

Arnaud DOUMANHOUN 27 août 2019

Arrêter la gangrène. Les élus communaux sont tristement au cœur de l’actualité nationale. Ils se sont délibérément écartés de leurs missions premières, pour arpenter les sentiers obscurs de détournement de biens publics. Le tableau de la gestion dans les administrations locales laisse à désirer. Dans la commune de Tori Bossito, c’est un scandale de dix (10) millions qui a emporté six (6) chefs d’arrondissements, suspendus de leur fonction par le maire Vitonou Tolégbon par un arrêté le 14 août 2019. La recette perception a constaté après un contrôle inopiné dans les arrondissements, le non-reversement des frais de célébration de mariage, qui s’élèveraient à 10.980.000 Fcfa. Soit, 549 mariages célébrés par les intéressés, à raison de 20.000 Fcfa par mariage. Il aurait fallu, juste quelques jours, pour que la commune de Ouidah entre en scène. Le 23 août dernier, la délibération du conseil communal relative au constat de faits constitutifs de ‘’faute lourde’’ reprochés à certains élus communaux, dans le rapport de contrôle du receveur-percepteur en date du 18 juin 2018, suspend tous les dix (10) chefs d’arrondissements de leur fonction.
Le maire Célestine Adjanohoun a procédé à la nomination des intérimaires pour la gestion des affaires courantes des arrondissements (Ouidah 1, Ouidah 2, Ouidah 4, Avlékété, Djègbadji, Gakpé, Houakpè-Daho, Savi et Pahou) conformément aux dispositions de la loi n°97-029 du 15 janvier 1999 portant Organisation des communes en République du Bénin, et la loi n°2013-05 du 27 mai 2013 portant création, organisation et fonctionnement des Unités administratives locales en République du Bénin.
Jamais deux sans trois. Ces cas de malversations qui défraient la chronique, remettent sur tapis la qualité de la gouvernance locale à l’ère de la décentralisation. C’est un secret de polichinelle que les communes du Bénin n’ont pas pris un véritable envol depuis l’avènement de la décentralisation. Les causes sont nombreuses. Les responsabilités sans doute partagées, mais à l’arrivée, c’est le citoyen lambda qui ne se porte pas mieux. Les acteurs à la base se cachent souvent, peut-être à raison, derrière l’épineuse question du transfert des ressources par l’Etat central. Sauf qu’avec ces affaires de malversations financières qui deviennent récurrentes, ces apôtres ont désormais du mal à prêcher. C’est un paradoxe qu’au moment où on chante sur tous les toits, plus de ressources aux communes, que celles disponibles, jugées insuffisantes subissent les affres de la corruption. Après les cas de Ouidah et Tori-Bossito, il y a lieu d’élargir le contrôle au niveau des autres communes, aux fins de faire rendre gorge aux fossoyeurs de l’économie locale. Des années durant, ce sont les rapports sur la gestion du Fonds d’appui au développement des communes (Fadec), qui ont révélé un pan de l’état de la gouvernance à la base. Une gestion hasardeuse et peu orthodoxe, aussi bien des ressources propres, que celles mises à disposition. Pourtant, servir la communauté devrait être un sacerdoce, quoique les candidats à la gouvernance locale soient politiques. Malheureusement, les acteurs s’enlisent dans des actes peu honorables. Après le Fadec, ils jettent leur dévolu sur les ressources propres : frais de mariages et de délivrances des certains actes. Des ressources destinées à contribuer à la construction de leurs localités.
Pour le cas de Ouidah par exemple, des registres ont disparu au niveau de certains arrondissements, et des chefs d’arrondissement ont gardé par devers eux, des fonds destinés au trésor public. Il a été également déploré la surenchère autour de la vente de timbres.
Pendant que le dossier Ouidah est en étude à la Brigade économique et financière (Bef), et les conseillers mis sous convocation, la commune de Bohicon annonce les couleurs, avec une affaire de projet d’installation de compteurs à carte. Le mal est profond, la gouvernance locale a du plomb dans l’aile. Il faut crever l’abcès. Un assainissement général s’impose.



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