« Mémoire du chaudron » : Le plan de conquête du pouvoir par Yayi dévoilé

Moïse DOSSOUMOU 20 avril 2018

Tout a commencé courant février 2018 par des échanges anodins sur un forum Whatsapp. Piqué au vif, Tiburce Adagbé, ancien journaliste, répondait à un post émanant de l’un des innombrables acteurs politiques qui se réclament à cor et à cri comme des artisans de la victoire de Boni Yayi à la présidentielle de mars 2006. La force et la sincérité de la réplique ont plu. Le style employé à l’occasion, celui du récit, a contraint le journaliste à ne pas s’arrêter en si bon chemin. Poussé par l’envie irrépressible de raconter un pan de la fabuleuse expérience qui fut la sienne aux côtés du candidat, puis du chef de l’Etat, Tiburce Adagbé n’a plus lâché sa plume. Ce jour, l’aventure reprend de plus bel après une courte pause.
Les Béninois découvriront via les réseaux sociaux, qui restent le canal choisi par l’acteur pour diffuser ses écrits en priorité, les épisodes 60 et suivant. Tout ou presque tout est raconté, sauf évidemment « ce qu’on omet de dire volontairement par pudeur » ou « ce qu’on ne réussit pas à dire ». Dans tous les cas, ce sont des faits vécus, des anecdotes croustillantes qui sont racontées jour après jour. Avec un plaisir toujours renouvelé, l’opinion est mise au parfum des intrigues politiciennes, des coups bas, des alliances politiques, des trahisons, des désistements, des ralliements, des jeux de couloir qui ont essaimé le parcours du candidat d’alors Boni Yayi. Les coups du destin, les moments de découragement et d’euphorie ne sont pas du reste dans ces textes presqu’inédits. Non sans surprise, les férus de ce récit chronologiquement bien structurés, savent à présent de quoi retourne la nomination de parfaits inconnus parachutés du jour au lendemain sur la scène politique. La partition jouée par les milieux évangéliques et les autres cercles religieux, les groupes ethniques et géographiques, les regroupements professionnels, l’impitoyable guerre de la communication dans les médias dans la quête et la gestion du pouvoir par Boni Yayi sont révélées au grand jour.
Dès le départ, les lecteurs ont été emballés par la narration. Ils le demeurent encore aujourd’hui après avoir pris du plaisir à savourer 60 épisodes. L’intérêt du public pour cette histoire racontée par bribes s’explique par le vide constaté en la matière. En effet, les hommes politiques béninois, notamment les plus illustres d’entre eux, ont de l’aversion pour la rédaction de leurs mémoires. Seule une poignée fait la différence. Les anciens chefs d’Etat Emile Derlin Zinsou et Basile Adjou Moumouni, Bruno Amoussou, Adrien Houngbédji et Albert Tévoèdjrè qui occupent encore le terrain politique ont le mérite d’avoir laissé des traces écrits qui renseignent sur leur parcours. Pour le reste qui constitue l’immense majorité, c’est un gros trou noir. Même après sa mort, Mathieu Kérékou qui a dirigé le Bénin pendant près de trois décennies, demeure un mystère pour ses compatriotes. La relation à l’actif de Tiburce Adagbé a le mérite d’assouvir la soif de nombre de Béninois qui ont un aperçu sur le côté non officiel des réalités politiques.
Le milieu du pouvoir fait de courtisanerie, de fourberie, de coups bas, de coups tordus, de coups visibles et invisibles représentent le « chaudron » vécu par l’auteur qu’il s’évertue à narrer en revisitant sa mémoire.



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