Libération du périmètre de Togbin zone 4 : Les clarifications du ministre du cadre de vie et du porte-parole du gouvernement

6 mars 2024

Loin de répondre aux polémiques actuelles liées à la libération du périmètre de Togbin zone 4, José Tonato, ministre en charge du cadre de vie accompagné de Wilfried Léandre Houngbédji, porte-parole du gouvernement, étaient face à la presse hier dans les locaux du ministère du cadre de vie. Pour eux, il s’agit d’éclairer de façon générale l’opinion publique sur le processus du dédommagement des personnes affectées par les projets. « Mon intervention a essentiellement pour but d’informer la population de comment nous conduisons en général les projets dans le respect des textes et comment, en particulier nous avons traité la situation de Togbin, Adounko et autres dans le respect des textes en vigueur en République du Bénin en veillant à ne léser personne et à ne brimer aucun Béninois », a-t-il précisé.
Abordant la libération du périmètre du projet, le ministre a rassuré que cette opération intervient après plusieurs années de sensibilisation et d’information des personnes affectées. Force devant rester à la loi, le projet doit être exécuté malgré la résistance d’une minorité. A en croire le porte-parole, cette opération de libération a été faite dans les règles de l’art. « Avant d’engager les mesures de démolition, le gouvernement s’est conformé à la loi. Il a donc recouru à la décision de justice pour obtenir une ordonnance afin de libérer le site. La Cour spéciale des affaires foncières a donc été saisie. Elle a constaté la consignation des montants consacrés au dédommagement qui a été faite auprès de la caisse des dépôts et consignations avant de rendre sa décision. C’est une fois en possession de cette décision que l’opération de libération a été engagée », a-t-il précisé.

Lire ci-dessous l’extrait de l’intervention du ministre de cadre de vie
Ce que nous faisons depuis 2016, c’est de veiller au respect des textes qui régissent notre pays en terme d’installation des infrastructures, de traitement des personnes affectées par les différents projets… quand on est dans la construction et l’installation des infrastructures essentielles dont les populations ont besoin pour l’amélioration de leur cadre de vie, on conduit des projets qui amènent à toucher à des personnes dans leurs intérêts personnels. Dans la mise en œuvre de certains projets, l’intérêt général peut se retrouver en confrontation avec l’intérêt particulier. Ce que nous faisons, ce n’est pas de répondre à la polémique. Mon intervention de cet après-midi ne vise pas à répondre à cette polémique non justifiée. Mon intervention a essentiellement pour but d’informer la population de comment nous conduisons en général les projets dans le respect des textes et comment, en particulier nous avons traité la situation de Togbin, Adounko et autres dans le respect des textes en vigueur en République du Bénin en veillant à ne léser personne et à ne brimer aucun Béninois.
En ce qui concerne l’aménagement de la route des pêches, le gouvernement a été amené à reconfigurer totalement le projet touristique par rapport à ce qu’il était au départ. C’est ça qui a donné la double voie, une façade balnéaire plus ouverte et le lancement l’investissement privé dans le sens de l’aménagement touristique et balnéaire. Nous avons une déclaration d’utilité publique qui couvrait une zone large de plus d’un kilomètre sur toute la longueur de la façade maritime depuis Cotonou jusqu’à Ouidah.
En Avril 2020, pour diminuer l’impact du projet sur les populations riveraines, cette zone a été redéfinie et resserrée de sorte à libérer tous les espaces qui n’étaient pas directement impactés par le projet. L’aménagement du territoire étant une entreprise dynamique et non statique, l’opportunité, le contenu et les besoins de plusieurs projets que nous menons, nous amènent à revoir les limites de tel ou tel autre projet… C’est ce qui se passe sur la route des pêches qui accueille de nouveaux équipements, de nouvelles infrastructures comme l’hôpital de Togbin, l’école des métiers du tourisme et de l’hôtellerie… Cela a amené le gouvernement, dans l’aménagement de la façade maritime qui va recevoir des restaurants et des espaces de loisirs, à reconsidérer les limites qui avaient été définies en avril 2020 pour revenir en novembre 2021 sur la redéfinition du périmètre. La raison essentielle de la réintégration de Togbin zone 4 vient de là. Jusqu’à récemment, Togbin zone 4 est construit sur moins d’un pour cent de sa surface. Cela veut dire que pour choisir une zone qui doit recevoir des investissements, le gouvernement regarde les impacts du choix de ce périmètre sur les constructions existantes…
Depuis que ce projet a été défini, nous avons commencé entre 2021 et 2023 une communication basée sur l’information de la grande masse. Beaucoup de gens se souviendront que le chef de l’Etat s’est lui-même déplacé plusieurs fois sur le terrain pour parler avec les populations et donner des orientations de façon à permettre par exemple sur le front sud de la route des pêches que les activités commerciales puissent continuer et que la zone nord soit la zone la moins impactée par les constructions. De façon plus précise, nous avons passé un communiqué en février 2023 pour demander que, depuis la décision de novembre 2021, le projet contraint à débuter la libération du site, car la viabilisation devrait commencer. De façon précise, le 10 février 2023, nous avons fait une séance d’information au ministère des affaires étrangères où les principaux acteurs avec qui nous avons déjà parlé sur le terrain, ont été reçus et informés sur le contenu du projet qui allait être exécuté et la façon dont ce projet allait impacter leurs activités et les dispositions que l’Etat est en train de prendre afin de leur permettre de continuer d’exercer leurs activités. Ils étaient tous d’accord avec nous.
Certains ont résisté. Nous avons continué de discuter pour que la libération de la route se fasse dans les conditions douces et pacifiques, sauf quand on oblige l’Etat à rentrer dans le dérapage de délai qui occasionnerait aussi un dérapage financier. Dans ce cas, force doit rester à la loi. Suite à cette séance du 10 février, plusieurs réunions individualisées ont été tenues par l’équipe de la Simau en charge de la mise en œuvre de ce projet. Cela appuie la sensibilisation porte-à-porte qui a été faite en vue du démarrage effectif du projet. Cette sensibilisation permet aux personnes affectées par le projet à constituer leurs dossiers et les déposer à l’Agence nationale du domaine et du foncier qui doit les dédommager.
Dans le cas de Togbin, nous avons, dès le départ, rencontré une résistance à la collaboration. Des gens se sont inscrits dans une démarche de contestation du projet et donc, d’une opposition à la libération de l’emprise du projet. C’est pourquoi de 2021 à 2024, nous avons pris le temps qu’il faut pour essayer de les convaincre en les sensibilisant.
L’évaluation du dédommagement se fait sur deux niveaux : un concernant le foncier. Cette estimation est basée sur des valeurs foncières officielles prises dans un décret en vigueur sur l’ensemble du territoire national. Il est important de préciser que le foncier est évalué sur cette base là parce que l’Etat ne peut pas s’inscrire dans un dédommagement du foncier sur la valeur du marché, tout simplement parce que c’est une valeur que nous ne maîtrisons pas.
En ce qui concerne l’évaluation des constructions, elle a toujours été faite de la façon la plus juste et la plus équitable. Elle se fait à la valeur du jour de l’estimation, pour dire que tel bâtiment de telle superficie construit à telle date coûte tel montant, sans dépréciation.
C’est dans ces calculs que d’autres personnes disent qu’elles ont été grugées ou spoliées. Ceux qui sont allés plus vite, ont totalement été indemnisés. Ceux qui contestent sont à peine 8 sur 1117 personnes. Ceux qui n’ont pas encore accepté le projet, leurs ressources sont consignées à la caisse des dépôts et de consignations.
Ce traitement de dédommagement que nous avons appliqué a fait fi de ce que la loi nous imposait de faire. En réalité, conformément au code foncier et domanial, le dédommagement doit être justifié par la détention d’un titre foncier et d’un permis de construire en cas de construction. Autrement dit, seuls les détenteurs de titres fonciers et de permis de construire devraient bénéficier du dédommagement. Si je regarde le périmètre dont nous parlons, je ne crois pas qu’il y a un seul titre émis entre novembre 2021 et la date d’aujourd’hui où nous parlons. Pourtant, le gouvernement nous a demandé de dédommager tout le monde. C’est donc un traitement social qui a été fait.
Une autre difficulté que nous avons enregistrée, c’est qu’entre avril 2020 et novembre 2021, s’est développée une spéculation foncière autour de ce périmètre. L’Etat ne peut pas encourager cela. A cause de la valeur ajoutée due aux investissements que nous faisons sur la route des pêches, les gens se sont lancés dans la spéculation foncière sur ce périmètre. La plupart d’entre eux se sont retrouvés aujourd’hui pris à leur propre piège et se plaignent. Malgré ça, le gouvernement est prêt à traiter chaque cas avec la plus grande équité et c’est ce que nous faisons.
Voilà les conditions dans lesquelles les choses se sont passées jusqu’à l’événement du 22 février 2024 où les derniers bâtiments du périmètre ont été démolis après que nous avons lancé un communiqué fixant au 6 février, date de libération définitive de l’emprise du projet. Nous avons donc passé deux ans à communiquer, à expliquer et à sensibiliser les populations concernées.
Propos recueillis par Isac A. YAÏ



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