Perception des loyers par les propriétaires : Le 05 ou le 10, quel est le moment indiqué ?

Bergedor HADJIHOU 18 août 2020

Selon l’article 68 de la loi n° 2018-12 du 02 Juillet 2018 portant régime juridique du bail à usage d’habitation domestique en République du Bénin, le paiement du loyer est mensuel, à la date arrêtée par les parties. En l’absence d’une stipulation claire, certains bailleurs ou leurs représentants perçoivent le loyer le 05, d’autres le 10 du mois assorti de pénalités inexpliquées. Dans tous les cas, la date est fixée en fonction de l’aspiration du propriétaire, d’où le besoin d’harmonisation et d’orientation des acteurs du secteur de l’immobilier.

Agent de sécurité dans une structure de la place, la fin du mois rime pour Ibrahim avec stress, angoisse et crainte de prise de bec avec le bailleur. En effet, son employeur paie rarement le salaire avant le 15 du mois échu. Mais dans son contrat de bail qu’il nous a laissé feuilleter ce mardi 12 août 2020, il est clairement stipulé que « Le loyer est payable mensuellement à terme échu le cinquième jour du mois suivant ». Une disposition que le cocontractant a toujours du mal à assimiler. Il aurait aimé négocier un autre terme. « Moi par exemple, j’ai intégré le 20. Le propriétaire a exigé que je paie à la fin du mois les 10 jours afin que le compteur soit remis au 05. J’étais dans le besoin. Il n’était même pas d’accord pour le 10 jusqu’à accepter le jour anniversaire du bail », confie l’agent de sécurité dépité. Pour les spécialistes de l’immobilier, le loyer est logiquement exigible à la date anniversaire du bail. Dans le contexte professionnel béninois, l’application de cette formule pourrait rencontrer quelques difficultés. Exiger de percevoir le loyer à la date 05 du mois échu ou à la date anniversaire du bail ne constitue pas une bonne option. Cette interprétation peut être soutenue par l’article 222 du code du travail qui dispose que « les paiements mensuels doivent être effectués au plus tard huit jours après la fin du mois de travail qui donne droit au salaire ». Raisonnablement, il est donc improbable qu’un fonctionnaire puisse payer le loyer à la date 05 si l’employeur a jusqu’à la date 08 pour lui payer son salaire. Face à ces calculs, les agences immobilières et démarcheurs essaient d’aplanir. « De plus en plus, c’est la date 10 l’idéal. C’est ce que je conseille vivement aux propriétaires dont je gère les maisons. Là, on est sûr que l’employeur sérieux a déjà réglé son salarié. Mais quoi qu’on dise, mon avis est facultatif », renseigne un conseil immobilier.

L’enfer des pénalités
« Tout retard de paiement doit être porté à la connaissance du cabinet au plus tard cinq (05) jours avant le terme du mois. A défaut, le preneur sera astreint au paiement d’une pénalité de mille (1.000) Francs CFA par jour de retard sans que le nombre total ne dépasse Cinq jours ». Les pénalités sont des garde-fous que les agences immobilières mandatées insèrent dans le contrat de bail pour obliger le preneur à respecter la date de paiement du loyer au risque de débourser des frais supplémentaires. Il y a un flou autour de la finalité de ces sommes fixées de façon fantaisiste dans le secteur : « Ces montants qui varient d’un propriétaire à un autre ne sont pas justifiés et ne sont pas toujours destinés à la poche du propriétaire en personne. Vous imaginez, je paie 15 mille comme loyer. Cinq jours de retard font cinq mille de plus si la pénalité est à 1000. Pour un ménage modeste, c’est pas peu », se désole Géraldo Gnimavo, locataire dans la commune d’Abomey-Calavi. Au-delà du caractère disproportionné des pénalités, c’est surtout leur fondement juridique qui pose problème. Selon les dispositions de l’article 31 de la loi 2018-12, l’Agent immobilier ne peut recevoir aucune somme autre que celle pour laquelle les parties se sont engagées. Ainsi donc, pour qu’il y ait paiement de pénalité de retard, il faut que les parties se soient mises d’accord préalablement. Mais au-delà de ce contrat synallagmatique, il ne serait non plus exagéré que le législateur puisse tenir compte de la réalité pour améliorer la loi n° 2018-12 du 02 Juillet 2018 portant régime juridique du bail à usage d’habitation domestique en République du Bénin car, il va de l’intérêt des populations que la pression du délai de paiement du loyer retombe et le mieux, c’est une date consensuelle dans l’intérêt du plus grand nombre.



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