Dr Rodrigue Idohou, au sujet de la biosphère du Mono : « Nous devons agir pour arrêter les menaces sur les espèces de la réserve »

La rédaction 6 juillet 2017

La réserve de biosphère du Delta du Mono située à la frontière sud entre le Bénin et le Togo, regorge d’une grande variété d’espèces animales en voie de disparition. Spécialiste de la conservation des ressources phylogénétiques, Dr Rodrigue Idohou nous amène à la découverte de cette réserve et attire l’attention sur les menaces qui pèsent sur cette biodiversité hors-pair.

Les Béninois connaissent au Nord la réserve transfrontalière du W. Aujourd’hui, on parle, au Sud du pays, de la réserve transfrontalière du delta du Mono. Que peut-on en comprendre ?
La réserve de biosphère transfrontalière du Delta du Mono est une réserve en création à la suite des nombreuses plaintes des populations en ce qui concerne les menaces. Il s’agit de la fragmentation des habitats, la perte des espèces, le problème des espèces invasives, et probablement les changements climatiques. L’écosystème situé dans le « couloir sec dahoméen » est déjà très fragilisé. Les espèces qui sont là sont soit endémiques à leur territoire, ou subissent de fortes pressions de par l’utilisation des ressources par les populations environnantes. L’idée est venue conjointement entre le Bénin et le Togo de mettre en place une réserve pour sauvegarder ces espèces et permettre aux populations et aux générations futures d’en utiliser. Don, c’est en cours de création.

Et pourtant, c’est une réserve reconnue par l’Unesco
En réalité, la réserve est reconnue par l’Unesco mais tous les protocoles relatifs à l’établissement d’une réserve en bonne et due forme ne sont pas entièrement finalisés.

Quelles sont les espèces qui retiennent l’attention dans cette réserve ?
C’est une réserve très diversifiée. Dans l’écosystème, on retrouve des espèces emblématiques comme l’hippopotame, le buffle, les petites antilopes, les singes, le singe à ventre rouge. Il y a également une grande variété d’espèces de la flore qu’on ne retrouve que dans cette région.

Y-a-t-il un lien avec le fleuve Mono qui donne son nom à la biosphère ?
Comme nous avons l’habitude de souligner en gestion des ressources naturelles, ces réserves s’établissent souvent lorsqu’il y a un cours d’eau qui permet l’alimentation en eau dans le temps des espèces qui s’y trouvent. Parce que l’eau, c’est la vie.

Quelles sont les menaces qui pèsent sur la biodiversité du delta du Mono ?
Il s’agit beaucoup plus de la fragmentation de l’habitat. Comme vous le savez bien, c’est une réserve qui est située dans la zone Guinéo-Congolaise du Bénin. La démographie galopante qui caractérise cette région suppose que les besoins sont croissants. Il y a plus de bouches à nourrir que de ressources disponibles. Les gens sont obligés de détruire à des fins agricoles, ou pour avoir des produits forestiers non ligneux. Les activités de pollution au niveau du cours d’eau du fait de l’homme impactent également la biosphère. Il faut ajouter aussi le phénomène des changements climatiques qui sont également fait de l’homme. Le problème des espèces invasives dans ce milieu est aussi à prendre en considération. Elles empêchent les espèces locales déjà adaptées à leur environnement de grandir, de se reproduire et de contribuer à la croissance de l’écosystème.

Face à ces menaces, est-il possible d’envisager des mécanismes pour rendre cette réserve aussi attractive que celle du W ?
Bien sûr. Avant toute chose, il y a la recherche. Les pays du G8 sont des Etats qui se bâtissent d’abord à partir des résultats des recherches scientifiques. La science doit être au cœur de l’action pour contribuer à la gestion durable de nos ressources. Les chercheurs du Bénin et du Togo unissent leurs efforts pour accroître les connaissances sur la richesse spécifique de la réserve, les menaces, à travers la collecte dans le temps des données de suivi.

Que peut faire l’Etat dans ce sens ?
Ce que l’Etat peut faire, c’est de contribuer à ce que la réserve soit entièrement créée. Et mettre à disposition des hommes pour sa gestion durable puis financer la recherche pour un meilleur suivi.
Propos recueillis par Fulbert ADJIMEHOSSOU



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