Gsm au Bénin : Les déboires des consommateurs malgré la régulation

La rédaction 3 octobre 2017

Face aux abus des réseaux de téléphonie mobile au Bénin, l’Arcep qui est l’organe de régulation des postes et télécommunications a pris, depuis sa création, bon nombre de décisions pour freiner les déviances observées. Toutefois, ces décisions, bien que protectrices des consommateurs, sont jugées moins coercitives par ces derniers qui n’hésitent pas à dénoncer le fait que la satisfaction de l’Etat prime sur la défense des droits des consommateurs. Enquête :

« Le numéro de votre correspondant est soit hors de la zone de couverture, soit éteint. Veuillez rappeler ultérieurement. Toujours le même refrain. Or, celui que j’appelle est juste à côté de moi », déplore Stéphane Viaïnon, la mine serrée, le point fermé. Très furieux de la situation, il exprime son ras-le-bol. « Trop, c’est trop. Toutes les décisions qui sont prises à l’encontre des opérateurs mobiles, c’est pour apaiser un tant soit peu les consommateurs. Moi, je reste perplexe sur l’objectif premier de l’Arcep qui est de défendre le droit des consommateurs ».
A l’instar de Stéphane, Gédéon Dossou abonde dans le même sens : « défendre le droit des consommateurs au Bénin face aux abus des réseaux Gsm, c’est du pipeau. Sinon, comment expliquer que malgré l’existence d’un organe de contrôle, que de pareils dysfonctionnements s’observent et nos autorités restent passives ». Très sûr de lui, il justifie ses propos par le fait que nonobstant les mesures qui sont prises, la situation ne s’améliore guère et pénalise plutôt les consommateurs. « On se rappelle que par le passé, qu’il a suffi qu’une décision gouvernementale somme les réseaux Gsm de payer des redevances pour que ces derniers suppriment, sans consulter même les consommateurs, les 150 messages et beaucoup d’autres avantages. Et cela, au nez et à la barbe de la structure chargée de réguler ces Gsm.
D’ailleurs, cette situation a pénalisé indirectement les consommateurs puisque aussitôt la décision prise, les tarifs ont connu une hausse vertigineuse », a-t-il déclaré. Tout comme lui, nombreux sont les consommateurs qui, furieux face à la passivité des autorités en charge de contrôler ces réseaux Gsm, expriment leur mécontentement. C’est le cas de Kenneth Fandohan, opérateur économique qui, très frustré, s’explique : « On ne peut faire une comparaison que lorsqu’on a vécu ailleurs. Au Sénégal, je communiquais grâce au réseau Sonatel et non seulement, la communication était moins chère mais, elle était sans interférence sonore. Dans mon pays, communiquer vaut la prunelle des yeux ».
En dehors du coût, ces réseaux abusent des clients. Tout le temps, ce sont des dysfonctionnements, nos unités et forfaits disparaissent et des frais sont retirés à notre insu. Il y a vraiment beaucoup de déconvenues. Pis, ils ne disent rien sur les effets secondaires que la téléphonie mobile peut avoir sur les utilisateurs. On érige des antennes de relais un peu partout, et on ne donne aucune information sur leurs inconvénients. Rien n’est dit sur les conséquences que l’usage même du téléphone portable peut avoir sur l’organisme. A tout ceci, s’ajoute la complicité de nos autorités, parce que ces réseaux appartiennent à des personnes qui sont en association commerciale avec notre Etat ». Aussi, a-t-il fait savoir qu’« il suffit que ces opérateurs Gsm graissent les pattes aux autorités pour que les sanctions n’aillent pas à terme. C’est triste, mais c’est la réalité. Le consommateur est sacrifié à chaque fois. Peu importe le cas de figure ».

Les Associations de consommateurs s’en mêlent !
Toujours est-il que pour rendre plus efficaces leurs actions et obliger les réseaux Gsm à respecter leurs cahiers de charges, les associations des consommateurs ne démordent pas. Pour Robin Accrombessi, président du Conseil national des associations des consommateurs du Bénin, « les consommateurs béninois sont victimes d’abus de confiance de la part des opérateurs de téléphonie mobile. Quand ce n’est pas des messages intempestifs, inopportuns qui vous importunent toute la journée, ce sont des services qu’on active sur la plateforme de l’opérateur sans l’aval du consommateur », a-t-il fait savoir.
Ainsi, des actions ont été menées pour changer la donne. « Face aux pertes et disparitions de crédits appels et de forfaits internet, des bonus imposés et à consommer à des heures indues, une marche ‘‘bonus’’ est prévue pour mettre la pression sur les opérateurs Gsm ». C’est donc à juste titre qu’un appel à boycotter les services des réseaux Gsm a été lancé par l’association des consommateurs. Un mouvement qui a été largement suivi par des consommateurs abusés. Malgré les nombreux efforts consentis par l’Arcep, pour les consommateurs, il est clair que les autorités sont encore loin de combler leurs attentes.

« Un chien qui aboie plus qu’il ne mord »
C’est dire que s’il est vrai que, depuis sa création l’Arcep a fait montre de disponibilité à satisfaire les consommateurs à travers de nombreux efforts, il apparaît que pour bon nombre d’abonnés Gsm, ses décisions ne changent pas grand-chose. Sur 9 personnes interrogées, 8 trouvent que l’Arcep est comparable à un chien qui aboie plus qu’il ne mord. A la question « Qu’est-ce qui a changé dans la qualité et services des Gsm suite aux nombreuses décisions des autorités ?, selon les personnes interrogées, rien n’a changé malgré les nombreuses décisions et sanctions prises par l’Arcep à l’encontre des opérateurs Gsm. « Moi, je n’espère plus un miracle de ce côté-là », se désole Dave Dassi.
Pendant plus de dix années de régulation, c’est toujours un éternel recommencement d’arnaques et de dysfonctionnements », déplore Maurice Quenum, la trentaine environ. Selon lui, l’Arcep communique plus sur ses décisions qu’elle n’impacte la qualité des services. Pour Dave Dassi, « des sanctions oui, mais allez au durcissement du ton afin de les décourager ». Selon nombre d’observateurs, il faudra durcir le ton. Autrement, le mal persistera. A titre d’exemple, au titre de l’année 2017, une douzaine de mesures visant à réguler les Gsm ont été prises par l’Arcep. Des mesures qui pour beaucoup de consommateurs, n’ont pas amélioré la qualité des services fournis par ces Gsm.

Nécessité de durcir les sanctions
Selon Sosthène Ahokpè, spécialiste en communication, les abonnés aux réseaux Gsm ont le droit de recevoir un service dont la qualité reflète le coût, comme l’a su bien préciser l’Arcep. Ainsi, les consommateurs doivent recevoir des services qui justifient le concept rapport qualité/prix. A l’en croire, les opérateurs Gsm ne doivent plus fixer les prix sur un coup de tête sans l’avis des consommateurs. Ils devraient informer les consommateurs sur les lois qui réglementent les services à eux offerts.
Par ailleurs, « les consommateurs ont le droit de se plaindre auprès de l’Autorité de Régulation des services de communications électroniques et des postes, des services qui leur sont offerts et sur d’autres préférences non prises en compte. Ces plaintes peuvent aussi être recueillies lors des enquêtes sur la satisfaction des consommateurs. Après plusieurs années de régulation, quand bien même beaucoup d’efforts ont été consentis par l’Autorité de régulation pour la satisfaction des consommateurs, il est maintenant question, de durcir le ton afin que désormais, le bonheur du client prime sur la satisfaction de l’Etat et qu’enfin, les consommateurs ne soient plus sacrifiés à l’autel des compromissions Etat-Opérateurs Gsm. Cela va dans l’intérêt de tous.
Dios CHACHA (Coll.)



Dans la même rubrique