Professeur Prince-Pascal Hounnasso, urologue-andrologue à propos du cancer de la prostate « Les rapports sexuels fréquents, diminuent le risque de cancer de la prostate »

La rédaction 28 juin 2017

Maladie très grave, le cancer de la prostate est un mal dont souffrent souvent les hommes un peu âgés. Malheureusement, ces derniers ne maîtrisent point les causes et les conséquences de cette maladie. Et c’est pour éclairer la lanterne des uns et des autres que votre quotidien est allé à la rencontre du professeur Prince-Pascal Hounnasso, urologue-andrologue.

C’est qui l’urologue ?
L’urologue, c’est celui qui s’occupe de l’appareil urinaire et aussi de certaines maladies chez l’homme, et la femme en particulier dans la reproduction.

A quel moment a-t-on recours à l’urologue ?
On a recours à l’urologue lorsqu’on a des problèmes urinaires, des problèmes rénaux, les maladies du pied long, les maladies de la vessie, de l’urètre, des testicules, de la verge et de la prostate.

Qu’est-ce-que le cancer de la prostate ?
Le cancer de la prostate est la troisième maladie que je classe dans la catégorie des maladies liées à l’homme au plan prostatique. La prostate de l’homme souffre de trois maladies fréquentes : l’infection chez les jeunes, qui peut être guérie avec les antibiotiques et anti-inflammatoires ; la deuxième maladie, c’est l’hypertrophie bénigne de la prostate qui est par exemple un œuf cuit à la coque, et quand on enlève la coque de l’œuf, on trouve le jaune d’œuf , et cette deuxième maladie dont on parle attaque le jaune de l’œuf, qui grossit vers l’extérieur et de l’intérieur, comprimant le canal par lequel passe l’urine et l’homme a des difficultés pour uriner. Alors que la troisième maladie se développe aux dépens du blanc de l’œuf et ce blanc de l’œuf, c’est sous forme de nodule dur qu’on perçoit quand on met l’index dans le rectum, et c’est ça le cancer de la prostate. Donc, c’est une hyperplasie des glandes prostatiques qui crée des zones où la cellule n’obéit plus au reste des cellules du corps mais se multiplie anarchiquement et on a les mêmes difficultés que l’hypertrophie béni de la prostate.

Quelles sont les différentes formes de cancer de la prostate ?
Les cancers sont classés selon le schéma anatomo-pathologique. Il y a les adénocarcinomes qui sont les plus fréquents, à 80% des cas, il y a les sarcomes, les lymphomes prostatiques. Ces cancers sont rares mais se retrouvent dans une certaine tranche d’âge, surtout chez les très jeunes garçons.

Quels sont les facteurs de risques du cancer de la prostate ?
Les facteurs de risques sont nombreux. Ils peuvent être liés au fait que le cancer de la prostate soit une maladie propre à la race noire, parce qu’on dit aux Etats-Unis par exemple que les noirs souffrent plus du cancer que les blancs. Donc, ça peut être génétique, ou lié à notre alimentation. C’est en général notre façon de manger qui détermine le déclenchement du cancer de la prostate. Quand on voit dans nos villages, les cancers de la prostate sont rares, parce que les villageois mangent non-gras, ils prennent beaucoup plus de légumes que de la viande fraîche, or la viande fraîche a beaucoup de graisses. Donc, c’est parce que nous mangeons comme les Américains du nord que nous risquons ces maladies-là. On dit aussi que les Japonais souffrent moins du cancer de la prostate que les européens, les Américains du nord et les Africains, donc vous pouvez deviner pourquoi. Il ne faut pas aussi oublier l’aspect sexuel, parce que, quelqu’un qui fait par exemple deux ans sans faire de rapport sexuel, est prédisposé au cancer de la prostate car, si le spermatozoïde n’est pas souvent libéré, il conserve des substances pathologiques qui peuvent facilement conduire au cancer.

Le cancer de la prostate est-il donc héréditaire ?
Bien sûr, parce que si vous avez un frère qui a souffert du cancer de la prostate, ça veut dire que vous courez 3,5% de risques pour avoir aussi le cancer. Ou si un père, un oncle avaient souffert du cancer de la prostate, les enfants peuvent facilement l’avoir.

Comment se manifeste le cancer de la prostate ?
En principe, le cancer de la prostate au début, n’a aucun signe, ça passe inaperçu. Donc, à partir de 45- 50 ans, il faut déjà commencer à consulter le médecin urologue parce qu’il lui suffit simplement de mettre son doigt dans le rectum pour palper un nodule caractéristique, qui est dur, et c’est de là qu’il peut faire une échographie, et c’est cette échographie qui va montrer qu’il s’agit d’un nodule hypo-écogène. Mais la manifestation princeps, ce sont les signes urologiques, c’est-à-dire la difficulté à uriner et à se rendre indépendant, parce que, quand c’est avancé, on sent les douleurs partout. Quand ces signes se manifestent, on dit généralement que le cancer a déjà dépassé un certain stade.

Comment peut-on prévenir le cancer de la prostate ?
Je donne l’exemple de mon village où, jusqu’à mon âge, aucun paysan ne se plaint des symptômes du cancer de la Prostate. Du moins, pour ce que je sais, parce que je suis le chef service du Cnhu et jusqu’à aujourd’hui, je n’ai pas souvent vu quelqu’un venir d’un petit ou d’un grand village se plaindre de ce mal. C’est très rare, 2% probablement, parce que ces gens mangent moins gras, beaucoup de légumes et cultivent à force d’efforts. Donc, il faut d’abord qu’on arrête de manger comme les Américains du nord. Aussi, il faut apprendre à manger beaucoup de fruits, parce que les Africains ne savent pas manger des fruits alors que c’est dans les fruits qu’il y a beaucoup de substances anti oxydantes, qui permettent de prévenir le cancer de la Prostate. Aussi, les rapports sexuels réguliers diminuent le risque qu’a un homme d’être atteint du cancer de la prostate parce qu’ils lui permettent de libérer ses sécrétions.

Que faut-il faire en cas d’apparition des symptômes et du diagnostic du cancer ?
Si les signes apparaissent, il faut consulter l’urologue, et l’urologue, après des examens para cliniques, va décider du traitement à suivre. Si on diagnostique le cancer, il faut le traiter précocement et dans ce cas, c’est comme un poison dans le corps qu’on a enlevé. Et c’est la prostatectomie radicale. Quand c’est avancé, il y a des stades : si c’est un score de glysome entre deux et six, on évoque alors une opération churigicale. Mais si le glysome dépasse ou atteint sept, on peut toujours opérer mais il faut associer une chimiothérapie ou une radiothérapie. Mais au-delà de sept, on ne doit pas y toucher, parce qu’en y touchant, le porteur du cancer est voué à faire des complications, et ça aboutit souvent à la mort. Voilà pourquoi il faut suivre ces trois étapes pour veiller au traitement.

Peut-on définitivement guérir du cancer de la prostate ?
Oui, si le cancer est détecté tôt. Il suffit de l’enlever du corps et on n’en parle plus. Aujourd’hui, la tendance dans les pays développés, quand le cancer est dépisté tôt, on surveille jusqu’à une étape et si ça doit continuer à évoluer, on opère. Quand c’est tard, on ne peut plus guérir parce que le cancer de la prostate envoie des ramifications, des métastases dans tout le corps. D’abord dans les ganglions, ça va après aux poumons, au foie, aux os, à la colonne vertébrale, au bassin, aux os longs, aux côtes, et ça détruit tout. Le cancer de la prostate fait casser les os. C’est ça qu’on appelle des ractures pathologiques. Ces complications ne sont pas supportables donc il ne faut pas y aboutir.

Le cancer de la prostate peut alors coûter la vie au malade ?
Oui, le cancer de la prostate négligé coûte la vie au porteur, parce que c’est un cancer qui a un développement très lent, mais quand ce développement est à son sommet, il tue.

Le Bénin dispose t-il des compétences pour ces cas ?
Avant, il n’y avait qu’un seul urologue au Bénin, en la personne de mon maître Akpo César, et après est venu Hodonou René et je suis le troisième urologue ; j’ai un quatrième qui est en train de s’initier à la chose, et nous avons formé beaucoup d’urologues à travers le pays. Il suffit que les Béninois s’informent chez eux. En cas de traitement du cancer de la prostate, qu’ils viennent nous voir pour que nous puissions solutionner leur problème.

Est-il possible de garantir un meilleur traitement avec le plateau technique existant au Bénin ?
On peut garantir ce traitement si le plateau technique est disponible, parce que les instruments de 1960 dont dispose le Cnhu ne peuvent pas favoriser le traitement du cancer de la prostate. C’est des instruments longs, raffinés, pointus, qui coupent bien qui permettent facilement d’opérer le patient qui a un cancer de la prostate. Les techniques sont acquises, les hommes pour le faire sont disponibles, mais la vétusté du plateau technique, surtout en urologie au Cnhu, ne vaut pas la peine d’y essayer, sinon c’est des complications. On est là comme une maison de passage où il faut évacuer. Si l’Etat devrait faire des économies, c’est de complèter le plateau technique, pas à travers le directeur d’un hôpital, mais appeler les spécialistes et leur demander de quoi ils ont besoin pour un travail efficient et rentable ; mais on ne nous le demande pas. Et c’est regettable que nous partions souvent en retraite avec nos compétences, parce que le pays a payé notre formation, mais nous n’arrivons pas à tout donner à la population.

Quels sont vos conseils à l’endroit des hommes, en particulier à ceux qui semblent banaliser ce mal ?
Premièrement, c’est des conseils de prévention. Qu’ils arrêtent de manger comme les Américains du nord, et se rendent compte que nous sommes africains, et par conséquent, nous sommes exposés au soleil et notre corps produit de la mélanine. Donc, nous sommes prédisposés naturellement, à souffrir des cancers. Deuxièmement, déjà à 45ans, si on sait qu’un parent a été malade du cancer de la prostate, ou en est décédé, il faut se rendre chez les urologues pour un examen. Et si on a plus de 50ans, il faut aller voir l’urologue pour un examen annuel de la prostate, puis si possible, s’il y a anomalie, faire l’échographie, et probablement les autres analyses beaucoup plus sophistiquées dont on ne disposent pas au Bénin, et essayer de diagnostiquer s’il y a cancer ou non. Ceux qui ont été déctetés tard, dans d’autres pays, ils bénéficient d’une thérapie hormonale qui est l’hormono-thérapie, malheureusement valable juste pour deux ans. Au bout de ces deux ans, il y a une résistance à la castration extra-testiculaire ; ce qui veut dire que, quels que soient les comprimés qu’ils vont prendre contre le cancer, au bout de deux ans, il est habitué à ses médicaments et crée donc une résistance au traitement. Dans ces conditions, moi je détiens encore des produits spécifiques pour traiter ces gens sans qu’ils n’aillent voir des tradi-thérapeutes qui traitent le cancer de la prostate qu’ils considèrent comme une poussière. Ils ne savent même pas de quoi ils parlent. Donc, j’invite la population à croire en ce que je dis et à venir ; c’est rien que de petites choses à faire chez eux-mêmes et ils vont se libérer de tout cancer de la prostate.

Propos recueillis : Clémence AKADIRI (Stag)



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