Retour à la mode des cheveux crépus : Le naturel fait son come back

Nancy d’OLIVEIRA 29 novembre 2013

Certains ont eu la chance en feuilletant les albums photos de leurs parents de les voir beaux et fiers dans leur afro style. Masse de cheveux tassés et peignés vers le haut, cette coiffure que certains n’ont pas hésité à pérenniser était le symbole d’une autre époque, où la peau noire se devait d’exprimer sa fierté y compris par son style de coiffure. Partie d’une révolution kenyane, cette coiffure qui a, peu à peu, servi de mode d’expression aux africains, afro-américains, afro-caribéens, et afro-latinos, pour leurs revendications politico-culturelles, ont eu entre autres comme figures de proue les Jackson five.
Au cours des années, le désir de s’intégrer en adoptant le type occidental et l’avalanche des produits cosmétiques, ont conduit les peaux noires de la coiffure contestataire au défrisage au fer, puis à la soude. Le Bénin naturellement, n’est pas resté en marge de cette tendance.

De l’afro au défrisage
Depuis plusieurs années, les femmes béninoises s’adonnent au lissage de leurs cheveux du mieux qu’elles peuvent. Les blessures qui parfois émaillent le cuir chevelu, les chutes qui deviennent incessantes, la fragilité qui finit par s’emparer de la masse capillaire ne les arrêtent pas. Bien au contraire ! Plus « ça cuit » pour traduire le « é bi » dit en langue fon, mieux le produit est efficace. L’époque où les coiffeuses veillaient scrupuleusement à ne défriser que les repousses est depuis longtemps révolue. L’appréhension de la douleur et la volonté d’afficher le style capillaire européen, ont entrainé les béninoises dans la spirale du défrisage à tel point que les couches les plus jeunes ne sont plus épargnées. La plupart des femmes considèrent ainsi le défrisage comme un « mal nécessaire » et s’y adonnent volontiers. Mais pas toutes…

La révolution du Natural and happy
Une tendance contraire s’amorce en effet, depuis quelques années, « cinq ans » plus précisément, selon Madame Aziakou Symphorienne, patronne du Salon Visage Plus. Caractérisée par le retour aux cheveux naturels et leur mise en valeur, cette tendance qu’ailleurs on appelle le Nappy Hair Style (entendez Natural and happy) se justifie à son avis à plusieurs égards. Premièrement, la femme noire a l’obligation aujourd’hui de « revendiquer son authenticité en adoptant un style de coiffure qui mette en valeur sa singularité et la beauté de sa race ». Gérer les cheveux crépus est dix fois plus difficile mais c’est un nouveau vent qui souffle » pour l’Afrique qui est en train « de s’imposer, de démontrer son identité ». Deuxièmement, de plus en plus de femmes une fois passé le cap de la quarantaine, sont dégarnies au niveau des tempes. En découdre avec les défrisants apparaît alors pour certaines, comme la meilleure option pour stopper les dégâts.
A ces différentes explications, le patron du Salon de coiffure chez Sam ajoute comme autres raisons : la volonté des clientes de faire moins usage des produits artificiels (tels que les mèches), le besoin de favoriser la repousse rapide des cheveux, et d’aérer le cuir chevelu pour celles qui décident d’adopter un style très court.
Les causes comme on peut le voir sont donc multiples, interdépendantes. Et pourtant certaines nappy, comme cette jeune étudiante, Ceres, trouvent après coup de nombreux inconvénients à la chose. Quelques uns tiennent au fait qu’on ne peut faire tous les styles avec les cheveux naturels ; qu’ils nécessitent trop d’entretien surtout lorsqu’ils sont courts et qu’ils sont difficiles à peigner.
Face à ces diverses plaintes, Mme Aziakou et M. Sam énumèrent des coiffures aussi variées que le « classic afro style », le coupé à ras à la « African Queen », le twisting et les bonnes vieilles nattes reformées à la mode d’aujourd’hui qui forment un déploiement d’originalité dans un univers dévolu aux cheveux défrisés. « L’entretien des cheveux crépus n’est pas aisé certes », mais le kit basique de la nappy girl n’est constitué tout compte fait que du « beurre de karité et d’un sèche-cheveux à dents » ajoute Mme Aziakou. Des huiles telles que l’huile d’olive, de palmiste, de neem ou de cacao, disponibles sur le marché, peuvent également être utilisées. Le reste ne tient qu’à l’amour de ses cheveux afro et à la volonté de trouver du temps pour prendre soin d’eux. Deux sentiments qui semblent à la hausse dernièrement puisque les patrons des salons de coiffure visités estiment leurs clients à la chevelure crépue à environ 30%.



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