Anselme Amoussou, secrétaire général de la CSA-BENIN : « Cette marche doit être perçu comme un appel à contribuer pour qu’on sorte de l’impasse actuelle »

13 mai 2024

A l’issue de la marche de protestation contre la vie chère au Bénin, Anselme Amoussou, secrétaire général de la CSA-BENIN est revenu sur les attentes des partenaires sociaux auprès du gouvernement. Dans cet entretien, il a également affiché sa volonté d’être dans un syndicalisme uni pour accompagner les réformes du développement.

Toutes les confédérations n’ont pu se faire représenter à cette marche pacifique de protestation contre la vie chère. Comment peut-on comprendre cela ?
Malheureusement le paysage social n’a jamais été facile dans le pays. Nous avons profité de cette période pour interroger nos pratiques syndicales et voir quelles sont nos faiblesses. Et l’une de nos faiblesses, c’est la division des leaders et la guerre de leadership. Nous avons décidé en toute responsabilité de corriger cette lacune et faire des efforts pour construire une unité d’actions. Cela a abouti à ce que nous avons vu aujourd’hui et je crois que nous sommes sur la bonne voie. Personnellement, je n’ai pas l’intention de tomber dans l’archaïsme syndical qu’on chante comme étant le meilleur syndicalisme. Je veux maintenir ma voie parce que je crois que je peux avoir un syndicalisme qui accompagne les réformes du développement et qui accompagne une gouvernance dès lors qu’on fait preuve de transparence, du respect et qu’on sort du dilatoire habituel.

Que demandez-vous à Patrice Talon pour la cherté de la vie ?
Avant la cherté de la vie, nous lui demandons un appel au dialogue social. Cette marche doit être vue comme un appel à contribuer pour qu’on sorte de l’impasse actuelle. On n’arrive pas à se regarder et à se parler. C’est d’abord cela. Pour la cherté de la vie, si nous nous rencontrons et que nous avons un dialogue social qui est sincère et responsable, on va trouver les voies et moyens pour que chacun comprenne le rôle qui est le sien dans la crise que nous traversons. Nous sommes conscients qu’il n’y aura pas de miracle de la part du gouvernement. Les éléments extérieurs, nous les subissons en tant que pays mais les solutions trouvées aujourd’hui par le gouvernement ne sont pas trop efficaces. Elles ont une limite. Et quand c’est comme cela, on a besoin de contribuer autant que nous sommes. Ce qui est attendu du gouvernement aujourd’hui est un changement d’attitude vis-à-vis du dialogue social et des acteurs que nous sommes. Quand il y a cela, même les problèmes que nous n’arrivons pas à régler, il y aura des éléments pour amener les uns et les autres à patienter et regarder ensemble l’avenir du Bénin. On a besoin de cela.

Pas d’augmentation de salaires, ni de subvention des céréales ?
Au-delà de cela, on a besoin de protéger le pouvoir d’achat. On a constaté que les augmentations salariales deviennent finalement des arbres qui cachent nos réels problèmes. Il y a eu l’augmentation salariale il y a quelques mois mais regardez ce que cela est devenu avec le prix du maïs, du haricot et celui de l’essence. Donc, la solution ne doit pas être singulière. Cela doit être une solution d’ensemble. Le mal du gouvernement aujourd’hui est qu’il considère qu’il est intelligent tout seul et qu’il peut tout faire tout seul alors que manifestement, il y a plusieurs aspects de la vie sociale qui font qu’il est dans l’impasse et l’incapacité de trouver les bonnes solutions. Nous avons des solutions et nous avons l’intention de rencontrer le gouvernement pour les déployer. La subvention des céréales peut être une des solutions. Quand on prend le projet ARCH par exemple, imaginez ce que les questions de santé peuvent avoir comme impact sur le pouvoir d’achat d’un citoyen. Il est temps qu’on aille vers l’ARCH et qu’on le concrétise enfin, qu’on sorte de l’expérimentation. Ce sont autant de voies qu’on peut explorer avec les employeurs partenaires du privé. Si nous nous asseyons avec le gouvernement, on pourra toujours trouver une solution qui va permettre à tout le monde de se sentir concerné par les efforts que nous devons fournir en commun pour le bien-être de tous.

La marche se déroule sans incident. Avez-vous déjà tous les comptes rendus ?
Pour l’instant oui. On va attendre la fin aussi car certains militants sont en train de retourner chez eux. Nous avons la responsabilité de savoir, d’ici une heure, ce qu’il en est. Sinon, nous avons pris toutes les précautions en réalité aussi bien à l’interne qu’avec la Police Républicaine qui a bien collaboré, qui nous a bien encadrés, qui nous a conseillés et je pense que tout s’est bien passé. Je pense qu’on s’est montré responsables. On a montré qu’on n’est pas des délinquants, on a montré qu’on n’est pas dans un aspect politique de revendication. C’était l’essentiel du message que nous voulions adresser au chef de l’Etat.

Quelles nouvelles des militants de l’UNSTB qui sont toujours détenus ?
Ils sont malheureusement toujours détenus. Il y a une procédure qui pèche par sa régularité. Par exemple, on a prélevé l’urine des gens en l’absence de leur avocat, on ne communique pas assez sur ce qu’on leur reproche véritablement, on a mis du temps pour avoir la réaction du procureur et tout cela vient après toutes les manœuvres qu’il y a eues avant le 27 avril et le 1er mai. Du coup, le gouvernement n’est pas crédible dans sa communication dans cette affaire. Nous exigeons la libération des camarades. Nous avons enfin marché, nous allons maintenant mettre en branle toute la diplomatie syndicale qu’il faut pour que nos collègues puissent recouvrer leur liberté.
Propos recueillis par Fidégnon HOUEDOHOUN



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