Capitaine Abel Ahouandjinou, : « La forêt de Ouèdo joue un rôle de poumon vert »

31 mai 2023

La forêt classée de Ouèdo couvre une superficie de 580 hectares mais elle occupe réellement 380 hectares. Il y a en effet une coopérative installée depuis longtemps qui gère 200 Hectares mais elle n’arrive malheureusement pas à faire le reboisement sur l’espace. C’est une forêt qui est classée depuis 1944.

Quel est le rôle de la forêt classée ?
Le colon a prévu qu’après les indépendances et avec le temps, il pourrait y avoir beaucoup de pollutions suite à l’augmentation de la population. Ainsi, il a érigé une forêt classée à Ouèdo dans la commune d’Abomey-Calavi et à Pahou dans la commune de Ouidah. La forêt de Ouèdo joue un rôle de poumon vert parce que Calavi est aujourd’hui la commune la plus peuplée du Bénin et nous avons une population qui s’est multipliée par 20. Avec les engins et les véhicules, on dégage beaucoup de CO2. Or, les arbres jouent un rôle de filtre, ils prennent le CO2 et donnent de l’oxygène dont l’homme a besoin. Cette forêt est là et nous donne de l’oxygène dans les milieux environnants jusqu’à Cotonou. A part ce rôle, elle fournit du bois parce qu’ici la vocation est de donner des perches et des stères de bois de chauffe pour alimenter les foyers. Nous produisons chaque année une certaine quantité de perches pour la construction des bâtiments et une quantité de bois de chauffe pour desservir les boulangeries et les foyers. L’acacia auriculuformis est en rotation de 7 ans. C’est pourquoi chaque année nous avons des parcelles que nous reboisons. Par exemple cette année, nous sommes en train de couper 50 Hectares et on va vendre l’année prochaine. Il y a des parcelles qui ont déjà 7 ans et nous y coupons les arbres. L’arbre principal que nous plantons c’est l’acacia mais nous boisons certaines parcelles avec le Terminalia Superba qu’on appelle souvent fraké et le Gmélina au bord des parcelles. Il peut y avoir des fruitiers pour la consommation mais c’est rare. Ce sont des arbres qui poussent par hasard et les gens les laissent grandir pour bénéficier de leurs fruits mais ce n’est pas la production de fruits qui préoccupe ici. Cependant, si le Comité Inter-villageois le veut, il peut dégager un hectare pour faire des fruitiers.

Comment les populations profitent-elles de la présence de la forêt classée ?
Il y a 4 villages autour de la forêt et les populations de ces villages viennent y travailler. Elles exercent les activités qu’on mène dans le cadre de la gestion et l’exploitation de la forêt. La coupe des perches, la mise en terre des bois de chauffe sont exécutées par ces populations qui en tirent l’essentiel de leurs ressources. Nous employons environ 500 personnes dont plus de 300 femmes et plus de 150 hommes. Ils sont gérés par un comité inter-villageois de cogestion. La forêt classée de Ouèdo a un fonds d’aménagement géré ensemble avec la population qui suit la gestion de tout ce qui se passe. Toutes ces activités qu’ils exercent sont rémunérées. Quand on finit, il y a des calculs qu’on applique sur les rendements de chaque personne pour déterminer les pourcentages à partir desquels ils sont payés. Cela veut dire que chaque activité que nous venons de citer a un coût. En somme, la forêt permet aux populations de mener des activités économiques.

Comment se fait l’entretien ?
C’est la population qui fait l’entretien à travers le Comité Inter-villageois de Cogestion et c’est également rémunéré. Les 500 personnes employées s’en occupent en faisant le piquetage, l’entretien et la mise en terre.

Quelles sont les étapes pour planter un arbre ?
Pour planter un arbre, il faut choisir le lieu de plantation, faire la délimitation, nettoyer l’environnement qui va accepter l’arbre c’est-à-dire sarcler et faucher les endroits. Ensuite, il faut faire le piquetage, la toison (creuser les trous dans lesquels il faut mettre les plants) et enfin la mise en terre des plants. Après la mise en terre des plants, il faut faire le suivi à travers l’entretien. On ne peut pas arroser cette grande superficie avec pour la plupart du temps 2.500 plants sur un Hectare, c’est pour cela qu’on plante en saison pluvieuse. Nous reboisons chaque année plus de 50 Hectares et c’est 2.500 plants quand on fait un écartement de 2/2 soit 125.000 plants par an pour les essences à croissance rapide. Il arrive qu’on fasse un espace de 2/3 sur certaines parcelles, ce qui fait 1666 pieds à l’hectare. On ne peut pas compter actuellement le nombre d’arbres dans cette forêt car il y a des cas de vols, d’incendies et de mortalités. Mais les incendies sont rares même si l’année dernière nous en avons connu qui a détruit 2 hectares sur les 52 que nous devrions exploiter.

Il y a combien de forêts à Abomey-Calavi ?
Nous n’avons qu’une seule forêt classée qui se trouve à Ouèdo. Les autres sont des forêts sacrées et il y en a beaucoup à Calavi, elles assurent la protection de divinités des communautés. Il y en a jusqu’à 50 Hectares qui contiennent des espèces d’arbres autochtones tels que les Iroko. C’est dans ces forêts qu’on va chercher parfois les graines pour les forêts classées, on y cherche des tisanes et des lianes. C’est vrai qu’il y a des endroits qu’on est en train de détruire mais elles existent toujours. Il y a une forêt sacrée qui couvrait jusqu’à 25 Hectares mais les gens ont rogné jusqu’à ce qu’il ne reste plus que 5 Hectares. Les adeptes des divinités à l’intérieur luttent pour qu’on ne rentre plus à l’intérieur de la forêt. La vraie vocation des forêts sacrées est la protection de l’environnement et la conservation des espèces de chez nous. Le premier rôle, c’est la protection des divinités mais en protégeant les divinités, on protège l’environnement. L’autre avantage est que ce sont des forêts dans lesquelles on n’abat pas les arbres, ce qui permet de conserver des espèces autochtones.
Réalisation : Ange M’poli M’TOAMA



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