Editorial : La bourde de Fatouma

Isac A. YAÏ, Moïse DOSSOUMOU 21 juillet 2014

Coup de tonnerre dans un ciel serein. Ce qui se murmurait dans des cercles restreints a été révélé au grand jour. Fatouma Amadou Djibril, en charge du portefeuille ministériel de l’agriculture, de l’élevage et de la pêche, a jeté un pavé dans la mare. En glissant sur le terrain politique, le débat télévisé dont elle était l’invitée a été riche en enseignements. En affirmant tout de go que l’éventualité d’un 3ème mandat pour le président de la République relève de la décision du peuple, ce ministre de la République a mis le doigt dans la plaie. S’agit-il d’un ballon d’essai ou d’une déclaration innocente ? Difficile de le dire. Puisqu’il faut lui apporter le bénéfice du doute, il sied néanmoins de battre en brèche ses arguments.
Primo, le peuple a déjà décidé de la limitation des mandats présidentiels depuis le référendum constitutionnel de 1990. Cette volonté populaire a été consacrée par la Constitution béninoise du 11 décembre 1990. Jusqu’à preuve du contraire, cette loi continue de régir la vie politique nationale et ses dispositions ne sauraient souffrir d’une dérogation quant à leur application.
Secundo, pour son image, Boni Yayi a un défi à relever. De son plein gré, en présence des personnalités les plus influentes de ce monde, il a affirmé haut et fort qu’il n’est pas disposé à continuer de tenir les rênes du Bénin au terme de son second et dernier mandat tel que prescrit par la loi fondamentale. Si par la force des choses, la tentation de tout remettre en cause s’imposait à son esprit, il faut que le respect de la parole donnée l’emporte sur toutes les autres considérations.
Tertio, le vœu du peuple béninois n’est pas d’être dirigé par un messie ou un monarque mais plutôt par un serviteur de l’intérêt général. Boni Yayi a eu sa chance en 2006. Elle lui a été renouvelée en 2011. Quand viendra le moment de passer le témoin, qu’il le fasse dans les règles de l’art comme a su le faire le Général Kérékou. C’est de cette manière qu’il rentrera dans l’histoire à l’instar de son prédécesseur que le peuple continue de chérir malgré tout.
L’alternance est une règle clé de la démocratie. C’est grâce à ce principe que Boni Yayi a pu accéder au pouvoir. D’autres citoyens nourrissent et ce à juste titre des ambitions de lui succéder. Qu’il leur soit permis d’apporter leur pierre à la construction de l’édifice national. Une décision exceptionnelle de prorogation ou de renouvellement du mandat présidentiel n’est pas la bienvenue. C’est une boîte de pandore qu’il faut éviter d’ouvrir. Si Boni Yayi et ses ministres veulent mettre leur expertise au service du drapeau national, qu’ils le fassent avant avril 2016. Au-delà, il ne sera pas question d’une quelconque modification de la Constitution.



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