Entretien avec Roland da Hefa, maire d'Adjohoun : « …Il faut des réformes sur la décentralisation avec un accent sur l'intercommunalité… »

Karim O. ANONRIN 7 février 2020

Le Bénin s’en va expérimenter la quatrième mandature de la décentralisation avec les élections communales et municipales du 17 mai 2020. Dans un entretien accordé à votre journal, le Maire de la Commune d’Adjohoun, Roland Da Hefa, nous parle de sa vision de la décentralisation au Bénin. Selon lui, il faut absolument aller aujourd’hui à la réforme des textes sur la décentralisation avec un accent particulier sur l’intercommunalité pour booster le développement des Communes. Ancien journaliste, le Maire Roland Da Hefa, n’a pas manqué de parler de ses actions à la tête du Conseil communal d’Adjohoun et de ses ambitions pour cette localité de la Vallée de l’Ouémé.

Vous êtes le Maire de la Commune Adjohoun, un poste hautement politique. Mais avant d’aller à la politique, vous étiez journaliste. Alors, qu’est-ce qui vous a poussé à cette reconversion ?
Oui ! On peut parler de reconversion parce que j’ai changé d’activité. Mais il faut dire que c’était déjà dans mon plan d’aller à la politique. Je n’ai pas eu la chance comme plusieurs de mes compatriotes de vivre avec mon père. Je l’ai perdu alors que je n’avais que trois ans et tout ce que je garde de lui comme souvenir, c’est de la documentation sur ses différentes activités lorsqu’il était vivant. Plus tard, tout ce que ma mère me disait de lui en terme d’engagement citoyen, en terme d’idéologie et en terme d’ambition m’a vraiment impressionné. Tout ceci mis ensemble, je suis arrivé à la conclusion que mon feu père avait beaucoup d’ambitions pour le développement de sa localité d’origine à savoir ce que nous appelons aujourd’hui la Commune d’Adjohoun. Hélas ! Il n’a pas pu concrétiser ses rêves pour ladite localité. Chez nous en Afrique et au Bénin, il est de tradition que les enfants, dans une certaine mesure, assument l’héritage de leur géniteur et perpétuent ses bonnes œuvres. Dès que j’ai eu l’âge de raison, j’ai commencé par penser qu’il faille que dans mon parcours professionnel et associatif, je puisse relever les défis que mon feu père aurait souhaité relever de son vivant.

Oui ! Monsieur le Maire. Depuis quand l’engagement politique a-t-il véritablement commencé ?
J’ai été journaliste et on ne peut pas lister le nombre d’hommes politiques que l’on côtoie en exerçant ce métier. Les journalistes et les hommes politiques font bon ménage et pour que le journaliste fasse bien son travail, il est parfois amené, bon gré, mal gré, à faire des incursions dans le milieu politique. Ça a été mon cas. C’est avec ma nomination en 2011 par le Ministre Jean Michel Abimbola au poste de chargé de communication du ministère dont il avait la charge que tout a commencé. En fait, c’est lui le déclic de mon engagement en politique. Certes, mon rôle était technique, mais j’avais aussi un droit de regard sur sa communication politique puisqu’il est politique. Il fallait écrire les discours politiques, soigner l’image de l’homme politique ; ce qui m’a permis d’avoir des rudiments politiques. A un moment donné, j’ai décidé de retourner sur la terre natale de mon feu père pour porter assistance à mes frères et sœurs à travers des activités de coopérative, des formations à l’endroit des jeunes et des femmes, des appuis matériels pour des activités génératrices de revenus, pour ne citer que ces actions-là. Par la suite, à l’approche des élections communales et municipales de 2015, j’ai commencé par avoir des sollicitations des jeunes d’Adjohoun qui ont suscité ma candidature à ces élections. Comme je caressais le rêve d’un engagement politique pour marquer mon temps en me rendant utile à la communauté d’Adjohoun, je n’ai donc pas hésité à répondre à l’appel. C’était un coup de maître pour un coup d’essai même si c’est un an après ces élections que j’ai officiellement été installé dans mes fonctions de conseiller communal d’Adjohoun pour des raisons que vous connaissez bien ; par décision de la Chambre administrative de la Cour suprême.

Vous êtes aujourd’hui Maire d’Adjohoun. Comment se porte alors Adjohoun ?
La Commune d’Adjohoun que je dirige depuis exactement le 19 juillet 2020 se porte très bien. La Commune d’Adjohoun est un havre de paix avec ses atouts et son paysage pittoresque. C’est vrai que du point de vue mieux-être des populations de cette localité, il y a encore beaucoup de choses à faire pour tendre vers l’idéal.

Quel bilan peut-on faire de vos actions à la tête de cette Commune depuis que vous êtes là ?
Dès que j’ai été installé Maire, j’ai posé un diagnostic et j’ai compris que le premier problème de l’administration communale à Adjohoun était un problème d’hommes. Les premières réformes ont donc été orientées dans ce sens. Il fallait travailler à avoir une administration de développement en mettant les hommes qu’il faut à la place qu’il faut et en instaurant un organigramme qui cadre avec des ambitions d’atteinte des résultats probants. Par exemple, il y avait un service qui enveloppait tout au niveau de la mairie ; c’est-à-dire à la fois les affaires générales, la gestion des ressources humaines et la gestion des usagers. Le service rendu aux populations n’était pas de qualité. Nous avons dû scinder ce service en deux en mettant le service état-civil à part et le service des affaires générales à part. Nous avons créé le service hygiène et assainissement. Nous avons aussi résolu le problème de la création du guichet unique qui est désormais fonctionnel. Lorsque vous n’avez que le développement de votre Commune à cœur, vous ne pouvez que créer un tel service. C’est un service qui limite au maximum le contact physique et direct entre l’agent de la mairie et les usagers. Pour faire simple, c’est de la dématérialisation administrative. Nous avons aussi mis le cap sur la réalisation des infrastructures et là c’est assez complexe parce que c’est régi par le Code des marchés publics au Bénin. Avant, les marchés étaient montés de toutes pièces avec un non respect des principes sacro-saints du droit en la matière. Nous avons essayé de corriger les choses pour faciliter la tâche et accélérer l’exécution des projets d’infrastructures sociocommunautaires. L’autre chose que nous avons constatée depuis que nous sommes membres du Conseil communal d’Adjohoun est que la localité n’était pas ouverte au monde extérieur. Vous savez, la décentralisation est dense, mais nous ne sommes pas encore en train d’expérimenter la chose dans ses méandres. Une Commune qui au 21ème n’a pas d’accord de coopération est une Commune isolée. Nous avons réchauffé certains liens dans le cadre de la coopération décentralisée. Ça a commencé par une mission du Secrétaire général de la mairie en France. D’ici fin mars 2020, cette mission que nous avons organisée en octobre 2019 va générer ses premiers fruits. Avec le Préfet de l’Ouémé, nous retournerons en France pour finaliser un certain nombre de choses dont la signature d’un accord de coopération entre Adjohoun et la région de Loire-Atlantique à Nantes en France. J’ai également initié à mes frais, les ressources de la Commune étant limitées, un projet de marketing communal qui m’a conduit en Belgique puis en France. Il s’agissait d’aller présenter Adjohoun à 5 autres Communes avec un accent particulier mis sur les potentialités que présente notre Commune. Vous savez, c’est la période du renouvellement des conseils municipaux dans ces pays partenaires. Nous avons décidé de les laisser finir les élections chez eux tout en les rassurant que nous n’allons pas finir notre mandat sans que Adjohoun ne signe des accords de partenariat dans le cadre de la coopération décentralisée.

Vous avez beaucoup d’ambitions pour votre Commune. Qui parle d’ambitions parle de moyens pour les réaliser. Alors, quels sont les moyens dont dispose Adjohoun pour vous permettre d’atteindre les objectifs que vous vous êtes fixés ?
Adjohoun a beaucoup de potentialités, mais il faut dire sans accuser mon prédécesseur que ces potentialités n’ont pas été bien révélées au monde pour permettre d’en tirer les dividendes. Figurez-vous que quand il a été mis fin aux royautés vers la fin des années 1800, il y a eu les cantons qui ont été installés. Le premier canton à être installé est Abomey. Après Abomey, il y a eu le canton de Porto-Novo. Le troisième canton créé en 1896 était Adjohoun. Historiquement, Adjohoun est la troisième Commune créée au Bénin. Les localités comme Bonou et les Aguégués dépendaient d’Adjohoun sur le plan administratif. Adjohoun s’étendait même jusqu’à la région Agonlin à Kpédékpo et même jusqu’à Zè dans l’Atlantique et Sakété dans le Plateau. Adjohoun a la chance de présenter un double aspect géographique avec une partie totalement dans la basse vallée et une partie qui est sur la terre ferme. Ceci a le mérite d’offrir à Adjohoun une forte potentialité agricole, une forte potentialité piscicole et des atouts pour l’élevage de tous genres. Par ailleurs, Adjohoun a une forte potentialité touristique. Vous n’êtes pas sans savoir que le tourisme est un pourvoyeur de revenus. Lorsque nous mettons toutes ces potentialités ensemble en plus de son riche patrimoine culturel et cultuel, Adjohoun a de quoi tenir en terme de richesse. C’est pourquoi nous travaillons tous les jours sous le vocable de la révélation de notre Commune. Il faut absolument révéler Adjohoun et lorsque l’Etat central, les investisseurs, les sympathisants et les partenaires vont se rendre compte des efforts que nous consentons, c’est très facilement que le développement va prendre son envol.

Tout récemment, le Préfet de l’Ouémé, votre autorité de tutelle a effectué une tournée dans le département et il est venu aussi à Adjohoun. Est-ce que cette descente à Adjohoun était utile pour vous ?
Il faut dire que le préfet n’était pas aussi à Adjohoun, mais pour une première fois dans l’histoire de cette Commune, le Préfet a démarré sa tournée dans le département de l’Ouémé par Adjohoun. Sans aucun doute, parce qu’il est convaincu du management que nous imprimons aujourd’hui à la gestion de notre Commune, il a décidé avec les cadres qui l’entourent de démarrer la tournée par Adjohoun. C’est très évocateur. C’est une tournée statutaire qui permet au Préfet en plus des Directeurs départementaux des ministères d’aller dans les Communes pour échanger avec les autorités communales secteur par secteur. Lors de sa descente à Adjohoun, le Préfet et les membres de sa délégation ont pu toucher du doigt, les réalités que nous vivons au quotidien. Les conseillers locaux et les membres de la société civile d’Adjohoun ont également été associés à la rencontre avec le Préfet. La gestion de l’administration communale est souvent confrontée à des difficultés en terme de procédure ou encore de dispositions à prendre. Cette descente a permis d’aplanir certaines divergences et d’éclairer la lanterne de plusieurs personnes. Après les échanges, il y a des recommandations assorties d’un chronogramme pour leur suivi et leur mise en œuvre. Cette descente du Préfet de l’Ouémé a été donc plus que bénéfique.

Quand on parle d’Adjohoun, c’est une partie de la Vallée de l’Ouémé. Les différents gouvernements qui se sont succédé à la tête de ce pays ont toujours vanté les potentialités de cette vallée. Avez-vous l’impression que le Bénin tire véritablement profit de la Vallée de l’Ouémé ?
Bien sûr ! Le gouvernement s’intéresse à la Vallée de l’Ouémé. Nous avons le Projet d’appui aux infrastructures agricoles dans la Vallée de l’Ouémé (PAI-VO) qui est là et qui fait son bonhomme de chemin. Grâce à ce projet, la Vallée de l’Ouémé bénéficie des infrastructures majeures comme les infrastructures marchandes, des pistes pour permettre aux agriculteurs d’accéder à leurs plantations, des magasins de stockage des produits. C’est un projet pensé uniquement pour la Vallée de l’Ouémé et financé par de gros bailleurs comme la Banque Africaine de Développement (BAD). Ce projet impacte aussi la Commune d’Adjohoun au niveau de notre grand marché qui été tombé totalement en ruine alors que c’est un marché qui drainait du monde depuis Porto-Novo en passant par les autres Communes de l’Ouémé. Les gens la région d’Agonlin et même du Nigeria y venaient pour s’approvisionner sur le marché d’Azowlissè à Adjohoun. Avec le PAI-VO, ce marché est en train d’être réhabilité et je pense que très incessamment, nous allons procéder à son inauguration au bénéfice des populations. Le PAI-VO nous a également permis d’opérer sur des pistes comme la construction des digues et autres aménagements pour faciliter l’accès à certains pôles économiques de la Commune. Il y a de grands magasins construits grâce à ce projet comme le grand magasin de groupage qui permet aux agriculteurs de ne plus perdre leurs récoltes faute de conservation. Ils arrivent désormais à convoyer leurs produits vers ces centres où les conditions de pression et de température sont adéquates ; ce qui leur permet de jouir des fruits de leur labeur. D’ici quelques mois, le nouveau pont de Tovègbamè à Gouti sur le fleuve Ouémé à Adjohoun, jadis appelé pont de la mort pour les nombreux accidents que l’actuel pont occasionne, sera réceptionné.

Au-delà de tout ce que le gouvernement fait à travers le PAI-VO, quel est votre rêve pour la Vallée de l’Ouémé considéré comme l’une des plus vastes en Afrique ?
Hier, j’aurais refusé de parler au nom de la Vallée de l’Ouémé parce qu’elle est partagée entre 4 Communes à savoir Bonou, Dangbo, Aguégués et Adjohoun. Mais depuis quelques semaines, au détour du colloque scientifique sur le développement du pays Wémè, j’ai été mandaté par mes collègues Maires de la Vallée de l’Ouémé de défendre notre région. Quand on parle de la Vallée de l’Ouémé, un seul Maire pris isolément ne peut pas porter la chose. Il faut donc aller en intercommunalité. Ce n’est pas les potentialités qui manquent pour valoriser la Vallée de l’Ouémé. Notre plus grand souci est la sécurisation des terres. Même sur l’eau, les gens sont propriétaires d’espaces lacustres. Il faudra que l’Etat central nous aide à opérer des réformes agraires pour que les objectifs soient atteints dans la Vallée de l’Ouémé. Par ailleurs, nous rencontrons de potentiels investisseurs qui nous demandent de mettre à leur disposition des espaces que nous sommes incapables d’offrir. Les terres sont disponibles, mais lorsque que nous abordons le processus de mise à disponibilité, nous nous retrouvons en face d’héritiers de terres. Néanmoins, nous faisons ce que nous pouvons en accompagnant les femmes et les jeunes dans leur reconversion dans l’agriculture. Tout récemment, nous avons appuyé des jeunes qui ont bénéficié d’un financement de la francophonie pour faire en coopérative un projet agricole. Ils avaient juste besoin d’un acte administratif qui prouve qu’ils ont le quitus de l’autorité communale. Je n’ai pas hésité à les accompagner.

Comment entrevoyez-vous la Commune d’Adjohoun d’ici 5 voire 6 ans ?
D’ici 5 ans ou 6 ans, c’est assez court pour rêver grand pour Adjohoun. Mais je crois que nous devons y croire. Je rêve d’une Commune d’Adjohoun qui d’ici-là, aura fini de régler les réformes structurelles, administratives et le terrain totalement balisé pour se positionner comme la Commune phare de la Vallée de l’Ouémé. Je rêve d’une Commune d’Adjohoun qui aura mis en révélation toutes ses potentialités. Je vois surtout une Commune d’Adjohoun totalement lotie parce qu’il faut vous dire aujourd’hui que Adjohoun est l’une des rares Communes au Bénin où le lotissement n’existe pas ; ce qui freine les investissements lourds étant donné qu’un plan d’urbanisation est inexistant. Personne ne viendra planter des infrastructures chez vous et un an après, vous viendrez tracer des voies pour casser ses biens immobiliers. La belle preuve est que Adjohoun ne bénéficie pas encore des projet d’asphaltage malgré la volonté du gouvernement d’impacter toutes les Communes du Bénin avec des infrastructures routières. Je n’oublie pas nos frères de la diaspora que nous entendons impliquer fortement dans le développement d’Adjohoun. Les démarches sont en cours et nous pensons organiser un forum économique à leur endroit.

Parlons à présent de la décentralisation. C’est vrai qu’il n’y a pas longtemps que vous êtes devenu Maire, mais quel regard portez-vous aujourd’hui sur l’expérience de la décentralisation au Bénin ?
La décentralisation est une expérience merveilleuse. Dès lors que le Bénin a atteint un certain niveau démographique, il fallait vraiment aller à la décentralisation pour une meilleure gestion des questions de développement. L’État central ne pouvait plus avoir un œil regardant vis-à-vis des problèmes des populations jusqu’à la base. Mais le hic est que si nous faisons un bilan, il est mi-figue mi-raisin. Ce n’est pas encore ce que nous voulons. Il faut maintenant un vrai transfert des ressources et des compétences aux Communes. Le non transfert des compétences et des ressources est un gros frein pour le développement des Communes. En réalité, nous côtoyons la décentralisation. Les Communes ploient beaucoup sous le poids des difficultés. Figurez-vous que ce que les Communes reçoivent à travers le Fonds d’appui au développement des Communes (FADEC) représente environ un dixième des besoins de chaque Commune. Tous les jours, les populations nous posent les problèmes d’eau potable, de centres de santé, de salles de classes, d’électricité. C’est beaucoup de maux et peu de moyens pour les résoudre. En dehors de ces difficultés, il faut aussi à la tête de nos Communes, des Maires qui ont des ambitions et qui sont vraiment en phase avec la dynamique impulsée par l’Etat central. Vous voyez aujourd’hui le président de la République, Patrice Talon. Vous pouvez l’aimer comme vous pouvez ne pas l’aimer. C’est unanime que c’est un homme de vision et de grandes ambitions pour son pays. Lorsqu’un leader comme celui-là se positionne et qu’on a derrière des Maires qui veulent seulement passer leur temps à signer des actes d’état-civil ou des conventions de vente de terrains ou encore venir brandir leurs écharpes, rien ne marchera. Il faut à la tête de nos Communes, des Maires aussi ambitieux que le Chef de l’Etat actuel du Bénin. Ceci est possible grâce au marketing communal, la coopération décentralisée et l’intercommunalité. Tout ceci permet d’attirer des investisseurs.

Pourquoi le gouvernement tarde t-il à opérer des réformes au niveau de la décentralisation alors que dans d’autres secteurs, il y a eu des réformes depuis l’arrivée du président Patrice Talon au pouvoir ?
Il faut absolument aller aux réformes au niveau de la décentralisation et je crois que la chose est même en cours. Il faut une relecture totale des textes sur la décentralisation en renforçant le rôle du Maire par exemple comme dans les pays développés. Il faut surtout tenir compte des écueils rencontrés dans cette première expérience de la décentralisation qui a commencé depuis 2002 avec l’installation des premiers conseils communaux et municipaux en 2003. Si les nouveaux textes que nous souhaitons de tous nos vœux cadrent avec les réalités du terrain, ça va être un grand pas de franchi. Comme je vous l’ai dit tantôt, il faut vraiment transférer les ressources et les compétences aux Communes.

D’aucuns pensent qu’il faut maintenant aller à une autre phase de la décentralisation à savoir celle du regroupement de certaines Communes en agglomérations comme en France. Qu’en pensez-vous ? Est-ce que l’intercommunalité est vraiment possible quand on voit que chaque Commune est jalouse de son autonomie ?
Ça peut marcher et ça doit marcher. Certaines Communes ont déjà expérimenté la chose. Il y a une telle belle expérience de l’intercommunalité qui se fait dans le Zou avec l’Union des Communes du Zou (UCOZ) que dirige le Maire Luc Sètondji Atrokpo qui est d’ailleurs le président de l’Association nationale des Communes du Bénin (ANCB). Au niveau de l’Union Européenne, de l’Association Internationale des Maires Francophones (AIMF) par exemple, il y a des financements colossaux comme le Fonds vert pour l’environnement et le climat. Mais vous ne pouvez pas avoir accès à ces financements si vous n’êtes pas en intercommunalité. L’intercommunalité s’impose et il faut le comprendre. Tout récemment, l’UCOZ a soumis au Fonds vert pour l’environnement et le climat, un projet par rapport aux conséquences néfastes des gaz à effet de serre. Grâce à ce projet, l’UCOZ a engrangé plus de 4 milliards de Fcfa d’investissement dans le Zou. Si l’une des Communes du Zou était partie solliciter isolément ce financement, elle n’aurait jamais eu gain de cause. Il y a aussi une belle expérience qui se fait au niveau des 2 KP (Kérou, Kouandé et Pehounco). Je veux également citer le Grand Nokoué que le gouvernement a initié pour l’assainissement dans les villes d’Abomey-Calavi, de Cotonou, de Ouidah, de Sèmè-Podji et de Porto-Novo.

Donc, la solution pour booster le développement des Communes du Bénin est dans l’intercommunalité.
Dans le principe même de la décentralisation, l’intercommunalité s’impose. Il y a des projets et des financements pour lesquels le bailleur exige que vous soyez en intercommunalité. A titre illustratif, nous avons récemment postulé à Adjohoun pour un projet de l’Union Européenne et dans tout le Bénin, seules six Communes dont Adjohoun étaient éligibles. Au niveau des départements de l’Ouémé et du Plateau, Adjohoun était la seule Commune retenue pour ce projet de 171 millions Fcfa pour renforcer et réaliser les infrastructures marchandes. Pendant que nous, nous gagnions ce financement de 171 millions Fcfa, il y a un autre volet de cet appel à projet qui ne mettait en avant que les intercommunalités. Ceci a permis à des Communes comme Bohicon de gagner comme nous de façon individuelle et aussi en intercommunalité à travers l’UCOZ. L’intercommunalité doit être même le socle du succès de la décentralisation au Bénin

Votre mot de fin.
Je voulais profiter de cette occasion que vous m’offrez pour remercier les collègues élus qui, malgré les moyens très limités, ne ménagent aucun effort pour jouer leur partition dans le processus de développement de notre Commune. Je voudrais également dire merci à nos mandants et leur dire qu’il y a de l’espoir pour Adjohoun. Il suffit que nous nous donnions la main en opérant une rupture avec les mauvaises et anciennes pratiques incompatibles avec les questions de développement.
Propos recueillis par Karim Oscar ANONRIN (Exclusivité du journal FRATERNITÉ)



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