Examens nationaux de Licence et Master : 3 ans de miel et de fiel entre Gouvernement et Epes

Patrice SOKEGBE 17 janvier 2020

Les examens nationaux de Licence et de Master vont s’étendre à un nouveau cycle de 3 ans. C’est ce qui ressort de la décision de la ministre de l’enseignement superieur et de la recherche scientifique, Eléonore Yayi Ladékan. Cette décision fait suite à une première expérimentation de trois ans qui prend fin en 2019. Selon la ministre Eléonore Yayi Ladékan, il est nécessaire de maintenir la réforme pour un nouveau cycle de trois ans. Sur 168 établissements identifiés, environ une cinquantaine fonctionne rigoureusement selon les normes en vigueur. A ce sujet, une rétrospection s’impose.

Telle la vitesse de la lumière, les années se sont succédé sous le régime de la rupture. 2017-2018-2019. D’intenses périodes de grandes réformes dans le monde de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique, notamment l’instauration des examens nationaux de licence et de Master. En licence, les résultats enregistrés sont respectivement 87,91% en 2017, 73, 91% en 2018 et 72, 21% en 2019. En Master, 69, 38% en 2018 et 74,86 % en 2019. Ces différents acquis ne représentent que la partie visible de l’Iceberg, l’accouchement fut assez douloureux.
En février 2017, le gouvernement a adopté en conseil des ministres un décret portant organisation des examens nationaux pour la validation des acquis en Licence et Master, dans les établissements privés d’enseignement supérieur. Cette réforme ne devait pas voir le jour, puisqu’elle allait naître avec des dents. Très tôt, elle a été fortement rejetée par des promoteurs d’établissements. Ceux-ci ont redouté la tenue effective de ces examens nationaux, car selon eux, les universités privées avaient des contenus de formations différents à certains endroits, quand bien même elles avaient des filières communes. Plus loin, ces promoteurs d’universités privées ont durci le ton et ont même fait savoir que cette initiative du gouvernement ne respecte pas les normes fixées par Conseil africain et malgache pour l’enseignement supérieur (Cames). A ce sujet, le Directeur des établissements privés au ministère de l’enseignement supérieur, Dodji Amouzouvi a expliqué que la commission nationale d’homologation travaillait pour que l’harmonisation des programmes de formation se fasse à temps. Aussi, avait-il précisé que les établissements dont les diplômes ne seront pas homologués, ne pourront pas présenter de candidats à ces examens. Il a fallu la décision de la Cour Constitutionnelle, qui, après saisie par certains responsables des établissements à savoir Prof Noukpo Agossou, Brice S. Ekpahle, Parfait Comlan Sambieni, a estimé le 24 août 2017 que Le décret n°2017-194 du 29 mars 2017 portant organisation des examens nationaux pour l’obtention du diplôme de Licence et de Master dans les Etablissements privés d’Enseignement supérieur (EPES) non homologués n’est pas contraire à la Constitution.

Vives contestations des étudiants
Cette réforme a également suscité des remous dans le rang des étudiants. Réuni en Assemblée générale le 19 mai 2017 à Cotonou, le collectif des étudiants Epes considère que la décision n’est pas en harmonie avec le cadre conventionnel entre le Bénin et le Conseil africain et malgache de l’enseignement supérieur (Cames). “Cet examen ne cadre pas avec la convention que le Bénin a signée au niveau du Cames en ce qui concerne le LMD”, a défendu Elie Chabi, vice-président et porte-parole du collectif. Les membres du collectif ont également désapprouvé l’opportunité de ces examens annoncés seulement trois mois avant leur tenue. “On ne peut pas attendre trois mois de la fin de l’année et demander aux étudiants d’aller à un examen”, a-t-il dit. Les manifestants n’approuvent pas non plus les frais de dossiers d’un montant de 25 000 Fcfa exigés par l’administration. En définitive, ils demandent l’annulation pure et simple de la décision et projettent une marche suivie d’un sit-in au ministère de l’Enseignement supérieur pour se faire entendre. Pour le Directeur de Cabinet de Mesrs, Bienvenu Koudjo, « On n’a rien inventé de nouveau. Ce sont les frais que l’on percevait pour la cosignature. L’Etat mobilise pour chaque candidat environ 50 000 Fcfa pour organiser l’examen. On leur demande juste une participation de 25000 Fcfa pour l’organisation matérielle ».

Les homologations, le point d’achoppement
A ce jour, sur 168 établissements privés d’enseignement supérieur, environ une cinquantaine fonctionne rigoureusement selon les normes en vigueur. Ce tamis a été le fruit d’une série de travail au sein du Conseil consultatif national de l’enseignement supérieur. Pour le Directeur des établissements privés d’enseignement supérieur, Dodji, les agréments se donnent aux filières pour l’établissement. « Pour être agréée, une filière doit avoir été autorisée à ouvrir et fonctionner pendant deux ans au moins renouvelables une fois, donc au plus pendant quatre ans. Ce n’est qu’à la fin de la deuxième année qu’une filière peut demander à être agréée. Mais avant cela, il faut que la filière et l’établissement aient l’autorisation et que tout soit aux normes, telles que conçues et acceptées par tous en raison des engagements pris par le promoteur et l’établissement privé. Ensuite, il faut que la filière ait vraiment tourné parce qu’on ne peut agréer une filière qui ne présente pas d’étudiants, une filière qui n’est pas viable. Les deux conditions majeures à réunir après, c’est qu’il faut déposer un dossier composé pas moins de 28 pièces et faire l’objet d’une inspection », a-t-il expliqué. Autant d’exigences qui ont fait grincer des dents à chaque début d’année académique où la Depes procède à l’homologation des filières et à l’attribution des agréments aux Universités privées. A ces occasions, certains Epes se sentaient lésés, même s’ils estimaient que leurs dossiers étaient à jour. C’est le cas de l’Institut Cerco, qui, malgré les performances réalisées au plan international, n’avait pas été reconnu. Une situation qui a été très vite wcorrigée à l’arrivée de la nouvelle ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique, Eléonore Yayi Ladékan.



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