Editorial : En mode souveraineté !

Angelo DOSSOUMOU 31 juillet 2019

Indépendance, indépendance….59 ans que ça dure. De génération en génération, liberté et affranchissement total du colon, avons-nous chanté. A l’arrivée, notre accession à la souveraineté internationale se résume à un drapeau, une hymne nationale et à des instruments politiques à l’interne. Mais, dans la tête et dans les habitudes, l’image du puissant colonisateur résiste toujours. Pour ainsi dire, plus les années passent plus la dépendance alimentaire, vestimentaire et linguistique vis-à-vis de l’occident est prononcée. La preuve en 59 ans d’indépendance, le patrimoine gastronomique national n’a jamais réussi à supplanter les appétits voraces autour du Pizza, du Charwama, des spaghettis, du riz thaïlandais et que sais-je encore ?
Parlant d’habillement, l’incongruité et le refus de s’affranchir de l’ancien oppresseur se matérialise par une consommation et une valorisation de nos textiles très insignifiantes alors même que nous sommes l’un des meilleurs producteurs de l’or blanc. Contrairement à certains de nos pays voisins notamment le Burkina-Faso et le Mali, le style européen a meilleure presse que celui local. Plus criant, 59 ans après le départ théorique ou officiel du colonisateur, nous continuons de raisonner et de deviser prioritairement dans sa langue. Conséquence, non seulement dans l’administration publique mais dans les ménages, le vernaculaire sonne comme faux. Finalement jusqu’ici, nous n’arrivons pas à le mettre en valeur et du coup, nous faisons le lit à l’intox et à une disparité communicationnelle.
Alors, si effectivement, nous sommes peu fiers qu’après 59 ans d’indépendance, nous singeons encore le colon, à mon avis, la solution pour pallier cet état de chose ne peut provenir, avant tout, que d’un acte politique fort. Ce qui est certain, des exemples en Afrique qui ont pu affirmer leur identité, ne serait-ce que sur l’un des trois aspects, sont légion. Plus intéressant, avec une indépendance matérialisée du point de vue alimentaire, vestimentaire et linguistique, à coup sûr, c’est le Bénin qui gagne. Car, j’imagine les résultats en matière de production agricole qui découleront d’un changement de comportement et de mentalité.
De toute façon, dans les relations internationales, tout est lié et seuls les égarés n’ont pas encore compris que le respect s’arrache avec non seulement, une économie non supportée mais aussi une identité affirmée. En somme, à 59 ans d’âge, l’indépendance continue toujours de frapper à la porte du Dahomey d’hier et du Bénin d’aujourd’hui. Bizarrement, et je me l’explique difficilement, nous tous, sans exception, refusons de la lui ouvrir. L’autre dira, si nous sommes prêts, elle entrera par la grande porte. Autrement, ce ne serait plus la peine de se plaindre pour un sénile de 59 ans qui, au lieu de se préférer, fait tout pour rester dans les liens de la soumission.
En définitive, si nos dirigeants en ont vraiment assez de l’indépendance théorique et du folklore de sa commémoration, c’est le moment idéal pour qu’ils posent des actes forts et s’engagent pour la renaissance d’une Afrique authentique. Mais, quand les échos de l’Eco me parviennent et que j’entends que le bon et le meilleur ne peuvent provenir que de l’autre côté de la mer, mon espoir s’estompe et je m’en remets à la providence afin qu’elle inspire nos décideurs. Seulement, quand cette attente a déjà parcouru 59 harmattans, autant rêver les yeux ouverts et juste souhaiter qu’un jour, nous soyons tous sur les mêmes longueurs d’onde pour un Bénin en mode souveraineté.



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