Editorial : La galère des retraités

Moïse DOSSOUMOU 7 septembre 2016

Pas facile d’être retraité au Bénin. Après des décennies de bons et loyaux services rendus à la nation, les fonctionnaires admis à faire valoir leurs droits à la retraite, sont confrontés à une réalité bien amère. Le livret de pension devant leur permettre de bénéficier d’allocations mensuelles pour faire face à leurs besoins vaut de l’or. Pour l’obtenir, que de formalités à accomplir, que de couloirs à emprunter, que de courses à effectuer, que de péripéties à affronter ! Les plus chanceux obtiennent ce précieux sésame 6 à 9 mois après leur cessation d’activité. Les autres, les plus nombreux, ne sont autorisés à percevoir au niveau des guichets du Trésor que 18 mois voire 2 ans après la rupture des liens contractuels avec l’Administration. Et pendant tout ce temps, comment font-ils pour joindre les deux bouts ? L’Etat à qui ils ont prêté leurs compétences ne se soucie plus de leur épanouissement.
Triste spectacle que celui des nouveaux retraités obligés d’arpenter les couloirs de la même administration dont ils étaient agents il y a peu. La retraite qui marque une pause, un nouveau départ dans la vie de tout individu est hélas vécue comme un cauchemar sous nos cieux. Les fonctionnaires notamment, redoutent ce moment fatidique où ils seront appelés à accomplir des formalités fastidieuses, longues, répétées pour rentrer en possession du fameux livret de pension. Depuis des lustres, cette procédure exagérément longue a cours. Et chaque année, les centaines d’agents publics admis à la retraite s’y soumettent malgré eux, car sans effectuer ce parcours du combattant, ils ne pourront pas bénéficier de leurs allocations mensuelles. Malades, épuisés, à bout de souffle, les retraités souffrent silencieusement le martyre.
Après avoir prêté leurs compétences et leur vigueur à l’Etat pendant trois décennies, ils sont carrément remerciés en monnaie de singe au moment où ils ont le plus besoin de sollicitude. Déjà que les salaires au niveau de la fonction publique n’étaient pas décents, s’il faut attendre 1 an voire 2 ans, après la retraite pour commencer par percevoir la pension, alors bonjour la galère dans les ménages. Des travailleurs qui ont vécu du salaire toute leur vie ne peuvent pas être brutalement sevrés à la retraite pendant de longs mois au motif que les procédures requises en la matière n’ont pas encore abouti. Rares sont les retraités qui ont de solides économies sur lesquelles s’appuyer dans cette période de soudure. Les autres, la grande majorité, laissés-pour-compte, traînent une vie de mendiants, car incapables de satisfaire leurs besoins par eux-mêmes.
Pis, certains agents publics en fonction conditionnent l’accélération du traitement des dossiers de leurs aînés admis à la retraite à des dessous de table. Ceux qui se livrent à ce jeu trouvent satisfaction dans des délais raisonnables. Mais les autres qui sont dans l’incapacité de satisfaire l’appétit vorace de ces jeunes loups tapis dans les bureaux de l’administration souffrent le martyre, car il leur est infligé une souffrance psychologique atroce. La réforme consistant à alléger les peines de ces retraités serait la bienvenue. Le gouvernement de la rupture pourrait vraiment marquer la différence en initiant un tel projet. L’idéal pour un retraité serait de se voir délivrer son livret de pension, le jour même de son admission à la retraite. Si le calvaire de ces personnes âgées perdure, ce sont encore des poches de pauvreté qui se développent, encore que les jeunes diplômés au chômage vivent au crochet de leurs parents vieillissants. Vivement cette réforme pour que la pension soit payée aux ayants droit dès le premier mois de leur retraite.



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