Editorial : Le retour de la vague

Moïse DOSSOUMOU 10 août 2015

Les étudiants de l’Université d’Abomey-Calavi (Uac) ont obtenu gain de cause. Mais à quel prix ! La seconde session, maintes fois réclamée et balayée d’un revers de la main par les enseignants de la Faculté des lettres, arts et sciences humaines (Flash) vient de leur être octroyée sur décision du chef de l’Etat. Ayant constaté depuis des mois l’incapacité du vice-premier ministre en charge de l’enseignement supérieur et du rectorat de l’Uac à venir à bout de cette crise, la haute autorité s’est enfin résolue à prendre le taureau par les cornes. Coup d’essai, coup de maître, pourrait-on dire. Car, il a fallu l’intervention du président de la République dans ce dossier qui a occasionné beaucoup de remous pour que tout rentre dans l’ordre. Les enseignants ont obtenu la promesse des moyens qui faisaient tant défaut et les étudiants, l’assurance de l’organisation de la seconde session.
Même s’il faut se réjouir du dénouement de cette malencontreuse énigme, on peut néanmoins déplorer le fait que le chef de l’Etat se soit fait désirer avant d’intervenir. Néanmoins, on est en droit de lui accorder le bénéfice du doute. Peut-être qu’il ne savait pas. Sans doute, les collaborateurs rapprochés de Boni Yayi n’ont pas cru devoir lui adresser des fiches l’informant que depuis le mois d’avril, les activités académiques tournent au ralenti sur le campus universitaire d’Abomey-Calavi. Oui, il faut croire que le locataire du palais de la Marina ne savait pas, au vu des dégâts matériels enregistrés et des menaces proférées de part et d’autre, que les enseignants et les étudiants, en sont venus à émettre l’idée saugrenue d’une autorisation de port d’armes pour se protéger mutuellement les uns contre les autres. Occupé à d’autres tâches, le chef de l’Etat n’a pas su que l’avenir de milliers de jeunes étudiants était en berne, le temps d’une année académique.
Le temple du savoir qu’est le campus universitaire d’Abomey-Calavi a connu ces derniers mois une des plus graves crises de son histoire. C’est le mois d’août, période traditionnellement réservée pour les vacances, qui a été choisi par le chef du gouvernement pour se pencher sur le sujet. Il y a quelques années, le chef de l’Etat croyait faire le bonheur des jeunes bacheliers en décrétant la gratuité de l’enseignement supérieur. A présent, à son plus grand désarroi, il fait face au retour de la vague. Il sait maintenant que cette mesure sociale induit des charges supplémentaires sur les plans humain, matériel et financier. Il sait aussi et c’est le plus important que les enseignants ne sont plus prêts à payer le prix des décisions politiques populaires prises sur un coup de tête. Il sait également que les capacités des amphithéâtres inaugurés par ses soins ces dernières années avec le concours de certains de ses pairs du continent sont loin de satisfaire la demande.
Malgré les avancées enregistrées ces dernières années, les universités publiques, notamment l’Uac, continuent de ployer sous le poids de leurs problèmes. Plus de doute. Maintenant, Boni Yayi sait que la politique politicienne et l’enseignement supérieur ne font pas bon ménage. A l’avenir, pour le peu de temps qui lui reste, en intelligence avec son vice-premier ministre, il saura où mettre les pieds.



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