En vérité : Le commerce du 8 mars

Moïse DOSSOUMOU 13 février 2020

C’est la fête du folklore par excellence. Depuis plusieurs années, c’est une occasion rêvée pour consommer les budgets alloués à cet effet. L’essentiel étant de faire bonne impression, de mobiliser les femmes, leur assurer un repas et si possible des frais de déplacement. Pour mettre le paquet, un uniforme est mis à la disposition de tous. Célébrée depuis le 8 mars 1975 sous l’égide de l’Organisation des Nations-Unies qui a adopté une résolution dans ce sens, la journée internationale de la femme ou encore la journée internationale des droits des femmes ne passe pas inaperçue au Bénin. Commémorée à bonne date ou en différé, c’est le prétexte parfait pour mettre en branle tout un arsenal de moyens au nom de la cause des femmes. Le gouvernement à travers les ministères, les communes, les sociétés publiques et même privées ainsi que les organisations non gouvernementales mettent le paquet à cette fin.
Censée être une journée bilan et de réflexion pour des actions en faveur de la promotion de la femme, elle sert le plus souvent des intérêts mercantiles inavoués. Le symbole le plus illustratif de la gabegie orchestrée dans ce cadre, ce sont les tee-shirts, casquettes mais surtout les tissus imprimés et commercialisés. Puisque le port de différents uniformes à l’occasion de diverses manifestations est une réalité socio-culturelle de chez nous, les femmes déboursent avec plaisir pour se mettre en vedette ce jour-là. Et comme cette commémoration est à leur intention, elles n’hésitent pas à se mettre sur leur 31 en exhibant les tissus imprimés pour la cause. D’une année à une autre, les motifs varient pour leur plus grand bonheur. C’est dire que les inconditionnelles de cette « fête » disposent d’une collection de pagnes, spéciale 8 mars. Par le passé, les autorités dont la présence donne un cachet officiel aux manifestations se joignent aux femmes drapées dans le même tissu.
Cette pratique folklorique qui n’apporte aucune plus-value au sort des femmes n’est pas du goût du gouvernement. D’ailleurs, le ministère des affaires sociales et de la micro finance l’a fait savoir sans ambages. A travers un communiqué, la responsabilité du gouvernement a été soustraite de la commande et de la commercialisation des tissus imprimés pour le compte du 8 mars prochain. De quoi couper l’herbe sous le pied des commerçants qui passent par ce biais pour s’en mettre plein les poches à cette occasion. En effet, afin de décider le plus grand nombre à acquérir le tissu de la circonstance, les promoteurs de ce commerce font habilement croire à la clientèle qu’il s’agit d’un produit officiel. Cet argument achève d’effacer les hésitations des uns et des autres qui s’offrent le tissu pour la fête. Et vive les ripailles ! Cette fois, cette habitude est combattue par le gouvernement qui proscrit carrément la commercialisation et le port de vêtement pour le 8 mars.
Le 8 mars est une journée internationale qui met en évidence la lutte pour les droits des femmes et notamment pour la réduction des inégalités par rapport aux hommes. Elle est marquée par de nombreux événements et manifestations à travers le monde pour fêter les victoires et les acquis en matière de droits des femmes, mais aussi pour faire entendre leurs revendications, afin d’améliorer leur situation. L’ONU qui a institué cette journée accorde à peine une demi-heure chaque année à cet événement. Mais chez nous, tout le mois de mars y est consacré. Malgré cela, le sort des femmes est toujours sujet à préoccupation. Certes, des avancées sont notées. Elles seraient davantage considérables si la journée du 8 mars cessait d’être perçue comme une fête.



Dans la même rubrique