En vérité : Le verdict de l’espoir

Moïse DOSSOUMOU 1er septembre 2020

Le juge n’a pas perdu de temps. C’est avec célérité qu’il a traité le dossier. Pour une fois, la lourdeur administrative n’a pas eu raison de sa détermination. Comme un buffle, il est allé droit au but. Sa décision perçue comme pédagogique vise à discipliner un tant soit peu les faussaires qui ont renforcé le sentiment d’insécurité foncière dans la commune d’Abomey-Calavi. A l’engagement du procureur de la République qui n’a pas eu froid aux yeux pour lancer les hostilités, le juge a répondu avec diligence. Prononcés le vendredi 28 août dernier au tribunal de première instance de la localité, les verdicts varient selon les mis en cause. 12 mois d’emprisonnement ferme pour certains, 12 mois avec sursis, 6 mois d’emprisonnement ferme pour d’autres encore, fermeture de cabinets et exclusion de la profession de géomètres… Tel est l’essentiel de la décision qui a jeté l’émoi dans les rangs des personnes sans foi ni loi habituées à l’usage du faux dans les transactions foncières.
Sinon, comment comprendre que des citoyens qui n’ont pas les qualifications nécessaires s’installent et fassent des activités en qualité de géomètres ? Pendant longtemps, les autorités communales ont cautionné le fait. Il a fallu ce réveil de la justice pour que le pot-aux-roses soit découvert. Dans le lot des accusés, on retrouve des élus en exercice, des personnes célèbres et d’autres encore qui ont fait la pluie et le beau temps sur le terrain parce que se croyant intouchables. Selon leur degré d’implication dans cette affaire, ils auront à payer le prix décidé par le juge. Vu la pugnacité avec laquelle le procureur s’est saisi de ce dossier, il faut croire que cela n’est que le premier d’une série. L’acte posé par la justice est d’autant plus intéressant que les populations ont longtemps été grugées par des groupes organisés dont la cupidité n’a d’égal que leur penchant pour la facilité.
Depuis plusieurs années, Abomey-Calavi dont la population ne cesse de grossir assume de plus en plus son statut de cité dortoir. Prise d’assaut par la classe moyenne qui s’y est établie en nombre important, la commune subit une pression sur le foncier. Des zones jadis rurales ont revêtu aujourd’hui les traits de la modernité. Cet état de choses a profité à des individus qui ont mis en place des réseaux pour appâter les personnes désireuses d’acquérir des parcelles. Beaucoup sont tombés dans le panneau. Ils sont nombreux à avoir naïvement acquis des terrains parfois à prix d’or sans jamais pouvoir rentrer en possession de leurs biens parce que appartenant déjà à autrui. Les falsifications de signature, les faux frais, les faux documents… ont pignon sur rue dans la commune à telle enseigne que les acquéreurs de parcelle les plus avertis redoublent de vigilance avant d’effectuer les transactions.
Les pratiques dégradantes ayant cours au niveau du foncier se sont étendues sur le domaine public. Les réserves administratives morcelées et vendues sont prises d’assaut par des individus qui ont déboursé de bonne foi pensant acquérir des biens qui ne sont pas objet de litige. Les semaines et mois à venir réservent encore beaucoup de surprises sur ce plan dans la seule commune d’Abomey-Calavi. Si ce vent d’assainissement souffle actuellement sur la commune, cela est à l’actif du nouveau maire Angelo Ahouandjinou qui dès sa prise de service s’est attaqué à cet épineux problème. Il vient de gagner une bataille. Mais la guerre est loin d’être terminée. Les mauvaises habitudes ont la peau dure et les intérêts menacés sont colossaux. Il gagnerait, au nom de la quiétude de ses administrés, à ne pas baisser la garde. Il ne reste plus qu’à achever ce qu’il a si bien commencé.



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