En vérité : Place au dialogue

Moïse DOSSOUMOU 17 juin 2019

Un vent de frayeur souffle sur le pays. Mais le pire a été évité de justesse. Sur le terrain, c’est un véritable champ de guerre. Tchaourou, situé à quelques encablures de Parakou, est méconnaissable. Cette bourgade paisible a été pendant plusieurs jours le théâtre de violents affrontements qui ont opposé des manifestants aux forces de défense et de sécurité. Le bilan est lourd. Côté matériel, le commissariat de la ville est entièrement consumé de même que plusieurs biens privés. Des voyageurs en partance pour le Nord ou le Sud selon le cas, contraints de marquer une pause à hauteur de la commune, ont payé un lourd tribut. Outre la perte énorme de temps, l’inquiétude et l’insécurité, ils ont dû subir des actes de rançonnements et de vandalisme sur leurs moyens roulants. Pour ce qui est des hommes, la non fiabilité des chiffres collectés jusque-là appelle à la prudence. Ce qui est certain, c’est qu’il y a eu des morts et de nombreux blessés.
Depuis une poignée de jours, le calme renaît progressivement. Ce foyer de tension alimente les inquiétudes ça et là. Ces événements, déplorables à tous poins de vue, couplés à ceux du 28 avril dernier dans la même localité, interpellent la communauté nationale. Il y a un malaise profond et persistant. Il faut donc, au-delà des clichés et des préjugés, rechercher les causes réelles de ce comportement viril qui ne recule devant rien afin d’apporter les solutions les plus idoines. Dans bien de cas, la loi n’est pas toujours le meilleur remède. Pour l’instant, tout est calme ou presque. Deux voies impératives s’offrent aux pouvoirs publics. Apaiser les populations qui se ruent dans les campagnes et les localités environnantes à la recherche de la paix et de la sécurité mais aussi et surtout ramener de manière durable le calme séculaire qui a toujours régné dans les environs. Ne pas le faire ou regarder dans la mauvaise direction est une option à ne pas envisager.
A présent que les barricades ont été enlevées et que la circulation est rétablie sur la voie inter-Etats, il faut tout en restaurant la sécurité sur place, remonter au sommet, aux racines du mal pour qu’advienne la paix. Le lundi 20 mai dernier, Patrice Talon au lendemain des législatives du 28 avril 2019 qui ne cessent de susciter des remous, a promis instaurer un dialogue national, mais sans autre forme de précision. Tout en invitant la nouvelle législature à rassurer l’opposition, qui soit dit en passant n’a pu participer à ces élections, à travers la relecture du code électoral et de la charte des partis politiques, il espérait que les violences qui ont ébranlé le cœur de Cotonou les 1er et 2 mai derniers ne soient plus d’actualité. Moins d’un mois après, c’est Tchaourou et Savè qui s’illustrent à nouveau. Si la tension est aussi vive, c’est que les frustrations sont toujours d’actualité.
C’est en cela que l’option du dialogue politique défendue par le chef de l’Etat est salutaire. Elle est l’unique porte de sortie aujourd’hui. Dans certaines situations, l’usage de la force ne résout pas tout. Le nœud du problème, c’est la tenue d’élections législatives non inclusives. Tout est parti de là. Avant de se pencher sur les conséquences, il faut s’attarder sur les causes. D’où l’impérieuse nécessité de ce dialogue qui tarde à prendre forme. Les uns et les autres doivent se parler avec franchise, en ayant à l’esprit, la promotion de l’intérêt général. Lorsque tous auront fini de se vider, d’exprimer leurs frustrations et même leur douleur, il faudra trouver les mots et les procédés les plus apaisants pour panser définitivement ces plaies béantes qui menacent putréfaction. Le dénouement de la situation à Tchaourou et Savè est à saluer. A présent, place au dialogue qui apaise et construit.



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