En vérité : Réviser le code vestimentaire

Moïse DOSSOUMOU 7 juin 2018

Et si le Bénin s’approprie le modèle Burkinabè ? Au pays des hommes intègres, la culture du consommons local est largement répandue. Cela se remarque aisément dans le comportement vestimentaire. Là-bas, point besoin de s’encombrer de costumes ou de parures venues de l’Occident pour paraître chic et classe. Les tenues locales très prisées et qui font d’ailleurs l’unanimité suffisent à faire l’affaire. Epris de leurs traditions, les Burkinabè mettent un point d’honneur à les mettre en valeur partout où leurs pas les portent. Dans les administrations, les lieux de culte, les aires de spectacleS ou encore lors des manifestations officielles, le « danfani » a toujours occupé une place de choix. Roch Marc Christian Kaboré, le chef de l’Etat ? en est le principal ambassadeur puisqu’il en a fait sa tenue de travail. Ses pairs du Sénégal, du Nigéria, du Niger et du Mali, pour ne citer que ceux-là, éprouvent du plaisir à se pavaner dans des tenues typiquement locales.
Mais au Bénin, les tenues occidentales ont pignon sur rue. Le climat tropical peu propice à de tels apparats n’a jamais entamé la détermination des Béninois à se parader dans des tenues venues d’ailleurs. Par ici, le code vestimentaire est calqué sur des modèles d’autres peuples. Ils sont nombreux ceux qui rechignent à s’exhiber dans des vêtements purement traditionnels. Pour être bien vu au Bénin, pour se donner un air important, il faut enfiler le costume. C’est ainsi que sous un chaud soleil, dégoulinant de sueur, les Béninois, notamment les travailleurs ou les usagers des administrations s’étouffent à longueur de journée dans ces vêtements. Convaincus que c’est en s’affublant de la sorte qu’ils donnent l’impression d’appartenir à la classe des privilégiés, ils font le nécessaire pour paraître. A contrario, le petit nombre qui fait l’exception en s’habillant de manière traditionnelle est souvent traité de haut.
Dans l’administration publique, selon une coutume en vogue, le code vestimentaire n’autorise les habits dits traditionnels que les vendredis. Les autres jours de la semaine, du lundi au jeudi, les fonctionnaires se mettent sur leur 31, en mettant en exergue les habitudes vestimentaires occidentales. Cette tradition doit être combattue avec véhémence, car elle plonge davantage le Bénin dans les méandres du sous-développement. L’émergence économique tant recherchée restera un leurre si les Béninois continuent de se comporter ainsi. On ne peut pas vouloir du développement de notre pays et continuer d’enrichir les industries européennes et asiatiques spécialisées dans le textile. La haute couture française, italienne ou marocaine ne peut pas continuer indéfiniment de damer le pion à nos pauvres artisans qui ne demandent qu’à peaufiner leur art pour mieux le valoriser.
Fort heureusement, des initiatives éparses indiquent que l’on tend progressivement vers une prise de conscience. La mairie de Parakou fait depuis peu la promotion des habits traditionnels mais aussi de la cuisine locale. C’est un grand pas qui doit être encouragé. D’autres mairies gagneraient à s’inspirer de ce modèle pour en faire autant. Mieux que les collectivités territoriales décentralisées, le gouvernement ferait œuvre utile s’il décidait de d’aller dans cette direction. Le costume, qu’il soit masculin ou féminin, n’est pas la seule tenue élégante ou raffinée qui soit. Ici même chez nous, en revisitant notre tradition, nous trouverons avec une pincée de modernité de quoi flatter notre ego de fans de la mode. Nicéphore Soglo l’a compris très tôt et ne s’embarrasse d’aucun complexe pour faire la promotion du pagne tissé. Notre tissu économique s’en trouverait renforcé si, dans un mouvement d’ensemble, nous décidons d’en faire autant. Ayons à l’esprit que la culture, c’est l’identité d’un peuple.



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