Culte des jumeaux au bénin : Une pratique truffée d'usurpatrices

La rédaction 19 mars 2020

Quelques femmes de Cotonou et environs, à la recherche de gain facile, se font passer pour des mères de jumeaux afin de solliciter d’aides. Une pratique qui désacralise les cultes liés aux exigences des jumeaux.

Dans le but d’obtenir des faveurs ou des biens sans fournir un petit effort, certaines béninoises se convertissent en "Hoxo Nɔn mendiante", chose contraire aux réalités et valeurs de cet univers. Une, parfois deux statuettes de jumeaux attachées dans leurs pagnes au niveau de la poitrine, elles n’oublient jamais leurs plateaux inséparables sur la tête, à l’intérieur duquel se trouvent souvent des calebasses contenant des bonbons, biscuits, fruits, farine de maïs mélangée à de l’huile rouge, du haricot et quelques pièces de monnaies. Une seule raison les pousse à prendre d’assaut les rues où marchés du Bénin pour quémander. Sodokin Axoloussi Houedossi jumelle et mère de jumeaux rencontrée à Pahou quartier Ahozon affirme « C’est une exigence des jumeaux. Au cours de leur cérémonie appelé Hoxo-Djidjo, ils recommandent au Fâ de nous dire d’aller dans les rues ou marchés pour quémander et avec ce que nous gagnons, nous revenons à la maison pour finaliser leur rituel. Généralement c’est de l’argent où des vivres que nous recevons... tous les donateurs reçoivent les grâces et bénédictions des jumeaux ». Si pour certains, cette habitude d’offrir des cadeaux où faire des offrandes à ces génitrices présente des risques de plusieurs ordres, Emmanuel Igbo, un citoyen en dit plus « ...moi personnellement je n’en donne pas, je ne connais pas le but final de cet argent. En donnant, elles peuvent peut-être prendre toutes mes chances voire me déposséder de mes biens spirituellement... Je connais plusieurs témoignages de personnes qui ont été victimes de leurs mauvaises œuvres ». Cédric Agban étudiant donnera un point de vue un peu divergent. Pour lui « toutes ces dames-là, n’ont pas les mêmes intentions, certaines sont de mauvaises foi, je le reconnais mais, pas elles toutes... en toutes choses il y a le vrai et le faux ».

Elles ne sont pas forcément offensives
Claude Azalou Tingbé, sociologue et agronome forestier soutient que « Culturellement parlant, elles ne quémandent pas, elles demandent plutôt. Parmi elles, il y a des usurpatrices d’identité, des profiteuses, des escrocs, des partisanes de moindres efforts, des malfaiteurs. Il est difficile de les reconnaître certes mais, il est important de retenir que pour la plupart du temps, ce sont des femmes ayant pratiqué l’avortement ou des vrais mères de jumeaux à qui ces derniers, par le canal du Fã, demandent ce sacrifice ». le sociologue n’a pas manqué de demander à la population d’être vigilante, d’éviter de redonner de l’argent à la même personne plusieurs fois car ce rituel ne se fait qu’une fois au cours de la vie de ces mères de divinités de bonheur. Des campagnes de sensibilisation par les dignitaires du culte vodou doivent être organisées afin de susciter une prise de conscience dans le rang de ces mères particulières en vue de préserver la nature sacrée de ce rituel . Comlan Kakpovi, haut dignitaire de la divinité Thron Goka Woudja n’est pas resté indifférent. Il affirme que « les jumeaux ne font jamais le mal, ils incarnent le bonheur. Normalement la sortie de ces mamans accompagnées des figurines ne se fait qu’une seule fois dans leur vie. Mais souvent, il y a des exceptions où après la première sortie, le ou les jumeaux peuvent vous demander de la reprendre, cela arrive rarement. Ce que nous devons garder en tête est que, ce sont les jumeaux qui donnent l’ordre d’effectuer les sorties. Malheureusement aujourd’hui nos adeptes ont transformé ce rituel en simple amusement : c’est grave et dangereux. Agir ainsi, ce n’est pas sans conséquences. Tôt ou tard, elles seront châtiées par la colère de ces divinités. Quand elles sortent de par leur propre volonté pour demander, tous ceux-là, qui leur font des aumônes ne reçoivent aucune grâce de la part des jumeaux, elles le savent et elles le font, c’est très méchant et indigne de leur part ».

Des mesures drastiques en cours
Pour le président du Festival International des jumeaux, Boconon Aké Oundjèglo, « elles salissent l’image de ce culte par ignorance, c’est à cause d’elles que les populations craignent les vraies envoyées des jumeaux et refusent de leur faire des cadeaux quand ils ont la possibilité ». Il rajoute « D’ici à là, nous allons sévir pour qu’il y ait de l’assainissement dans ce monde qui est censé être purement spirituel, car il s’agit de la divinité des jumeaux ».
Marina HOUNNOU(Coll.)



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