Entretien avec l’artiste Nasty Nesta sur sa carrière : "Le hip-hop béninois va bien mais est à la fois malade…"

La rédaction 20 octobre 2020

Nasty Nesta de son vrai nom Daniel Malangué est un artiste rappeur et entrepreneur béninois. Actuellement engagé sur plusieurs fronts, il nous raconte dans cet entretien sa vision pour le Hip Hop béninois et ses projets dans les domaines de la communication et du marketing.

Quelle est l’actualité de Nasty Nesta ?
Actuellement, sur le plan musical, je suis en studio. Je prépare des projets avec mon groupe Ccc et mon prochain album avec lequel je suis en plein processus de réalisation.

Depuis quelques années vous faites des featurings, mais si je ne me trompe, ça fait un bail qu’on ne vous voit plus en solo. Pourquoi ?
Oui, ça fait trois ans que j’ai fait un projet solo. Et comme je vous l’ai dit, je suis en création de projet. C’est vrai ça fait un bail, mais je vais à mon rythme parce que pour pouvoir faire un album, il faut pouvoir vivre des choses et pouvoir donner du contenu. Donc, au cours de ces trois années dernières, il y a eu beaucoup de choses qui se sont passées. Je suis devenu Papa et ça, c’est quelque chose dont je parlerai dans mon prochain album qui commence à prendre corps. J’ai fait des rencontres intéressantes aussi bien sur le plan musical qu’en business. Ma vie en général a changé. Je pense que ça a pris du temps, mais cela valait la peine de vivre ces choses et de pouvoir les mûrir avant de les écrire et de revenir avec un bon projet.

Quels sont vos projets ?
Actuellement, je travaille sur pas mal de choses qui ne sont pas trop en relation avec la musique. Je développe mon agence de communication. Ce qui veut dire que je travaille sur des projets digitaux et aussi avec des influenceurs. J’essaie de mettre sur pied un système qui pourra faciliter le contact entre les influenceurs et les entreprises. Je développe également la marque de vêtements qui s’appelle « Moria Wear ». Je travaille aussi sur le lancement d’une application de service qui permet aux gens de facilement trouver des prestataires de service en cas de besoin. Cette application s’appelle « Iyomi ». Voilà, ce sont là des projets pêle-mêle sur lesquels je travaille. Je lancerai aussi une émission bientôt. C’est un projet de télé réalité qui portera sur la production de contenus audiovisuels. Et voilà, pour ces trois ans, je ne suis pas au chômage.

Depuis quelques semaines vous êtes fréquent sur les réseaux sociaux, des interviews par ci, des rencontres avec certaines personnalités du showbiz par là. C’est quoi l’idée ?
En fait, comme je viens de vous le dire, les médias m’intéressent vraiment et ces interviews me permettent d’avoir des informations sur certaines personnes et sur certaines choses qui peuvent être intéressantes pour le grand nombre. Et comme je compte me lancer dans les médias, c’est ma manière d’apprendre et aujourd’hui le premier média, c’est l’Internet. Donc, je pense que c’est le lieu pour vraiment apprendre le métier, connaître ce que les gens ont envie de savoir et comment pouvoir apporter de la valeur avec ce que je fais. Ça permet de discuter et de partager avec des gens qui ont vraiment de l’expérience dans des domaines précis.

Que pensez-vous du hip-hop béninois aujourd’hui ?
Le hip-hop béninois va bien mais est à la fois malade. Il va bien parce qu’il évolue. Il y a plusieurs types d’artistes hip-hop et chacun trouve son créneau, chacun a son public. Je pense que pour le public, c’est super bien et c’est pareil pour la vitalité du secteur. Maintenant il est malade parce qu’on retrouve depuis des années les mêmes problématiques au niveau des artistes et en plus la période de Covid-19 a vraiment fragilisé le secteur artistique en général et le hip-hop en particulier. Et ça dévoile davantage le fait que les artistes n’ont pas vraiment de modèle économique pour pouvoir vivre de leur art. C’est vraiment la principale maladie que la musique connait. Je pense même que le Hip-Hop est considéré au niveau du secteur artistique comme un enfant non désiré parce que ce sont les artistes du hip-hop qui réunissent le plus de monde, qui fédère le plus grand nombre, leurs musiques circulent plus dans les téléphones et sont beaucoup partagés. Mais malheureusement, c’est la musique qui vit le moins bien en termes de rentabilité. Je dirai que les responsabilités sont partagées et je pense que les artistes et les acteurs du hip-hop même ont une grande part de responsabilité parce qu’aujourd’hui, quand vous discutez avec les artistes, ils ne sont même pas au courant de leurs droits, de comment ils peuvent générer des revenus. Tout ce qui les intéresse, c’est passer à la télé, faire les stars… C’est bien, ça fait partie du jeu. Mais, jouer uniquement les stars et ne rien avoir, c’est un peu dommage. C’est pour ça que j’organise des formations, des projets pour pouvoir informer les artistes sur leurs droits, sur la manière dont ils peuvent professionnaliser ce qu’ils font parce que c’est un métier avant tout. C’est ce que je pense, et voilà pourquoi, je dis que le hip-hop va bien mais il est malade en même temps. Donc, il faut qu’on puisse le soigner si on veut continuer à exister.

Votre mot de fin
Merci bien de m’avoir accordé cette interview parce que c’est toujours un moyen pour moi de tirer la sonnette d’alarme sur l’état du hip-hop, les conditions de vie et de travail des artistes. Le message que j’aimerais passer va à l’endroit des artistes eux-mêmes et des acteurs du hip-hop. Il faut qu’on se réveille et qu’on puisse vraiment penser à comment faire évoluer notre secteur dans le sens réel. Certes, on évolue, mais on est encore loin du compte.
Propos recueillis : Zéinab KONDO (Stag)



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