Natalie Hounvo Yékpè, comédienne béninoise, metteuse en scène et autrice « On travaille beaucoup mais on gagne très peu »

26 septembre 2023

Natalie Hounvo Yékpè est comédienne, metteuse en scène et autrice qui joue aussi bien au théâtre qu’au cinéma. Elle donne deux rendez-vous au public à l’Institut français du Bénin à Cotonou. C’est aussi une occasion pour elle de parler de son parcours dans cet entretien.

Vous êtes à l’Institut français pour annoncer une présentation. De quoi s’agit-il concrètement ?
Pour cette saison, il y aura la présentation de ma pièce « Monsieur, Blanchette et le loup » écrite par José Pliya le 21 octobre 2023 et le 24 octobre 2023, une rencontre littéraire sur mes œuvres.

Parlez-nous de la rencontre littéraire.
La Rencontre littéraire portera sur mes trois pièces : « Course aux noces », « La faiseuse d’ange » et « Les vivants dans l’ombre ».
« Course aux noces » aborde le mariage. Donc cela parle plus de la pression de la société et celle de la famille sur les jeunes filles et les jeunes femmes en âge de se marier y compris les célibataires avec enfant. « La faiseuse d’ange » parle de l’Interruption volontaire de grossesse (IVG), c’est-à-dire de l’avortement et c‘est la pièce qui est finaliste du prix RFI. La dernière, « Les vivants dans l’ombre » est un texte que j’ai écrit sur commande. Le thème est choisi par La Comédie de Valence et le thème, c’est la mort. Donc j’ai écrit une pièce où un père décède et est considéré comme quelqu’un qui n’a pas eu de progéniture, qui n’a pas eu de descendance. Donc les funérailles ont été orientées dans ce sens. Alors que lui, de son vivant, il a eu un enfant dont lui-même ne connaissait pas l’existence. Donc son âme va se révolter et ira à la recherche de sa descendance en Europe.

Parlez-nous de votre parcours
Si je dois parler de mon parcours, je dirai que c’est un parcours de combattant avec beaucoup de chutes mais surtout avec beaucoup de détermination. Mais des moments où je me relève et je me dis : ‘’c’est bien, j’ai bien fait d’avoir essayé même si je suis tombée à un moment donné’’. Je suis normalement géographe de formation. J’ai fait une maîtrise en aménagement du territoire. Parallèlement, j’ai commencé l’Ecole internationale de théâtre du Bénin (EITB). Donc j’ai une licence professionnelle en technique de théâtre. Et depuis, je travaille avec différents metteurs et metteuses en scène au Bénin, en Europe, en Amérique. J’ai joué dans des pièces comme : ‘’Les Nègres’’, ‘’Black Beauty’’, ‘’Wave’’, ‘’Africa Democratik Room’’, ‘’Dans l’ombre qui s’éclaire’’ et bien d’autres. J’ai eu aussi des occasions d’être sur scène lors des festivals tels que : ‘’Les nuits de Fourvière’’ à Lyon, ‘’Made in Germany’’ à Stuttgat, ‘’Masa’’ à Abidjan, ‘’FITHEB’’ au Bénin, ‘’Championnat d’improvisation’’ à Bruxelle, au Québec et à Luxembourg et ‘’PANAF’’ à Alger. En tant que metteuse en scène, J’ai créé et monté ‘’Certifié Sincère’’ de Florent Couao-Zotti en 2010, ‘’L’œuf et la poule’’ de Catherine Verlaget en 2017, ‘’Au paradis les femmes ne pètent pas’’ de Michel Beretti en 2018, et ‘’Nous étions assis sur le rivage du monde’’ de José Pliya en 2022. J’ai aussi co-écrit la pièce ‘’Trop de diables sous leurs jupes’’.

Ce parcours a forcément été gratifié par des distinctions. Pouvez-vous nous faire part de quelques-unes ?
Les distinctions ne sont pas pour moi les plus importantes. C’est surtout le fait que ce parcours ait connu de grands moments de rencontres. De rencontres qui ont permis de côtoyer des grands artistes. Me retrouver sur la même scène que Sagbohan Danialou par exemple, sur le même festival au Canada que Anthony Kavanagh et avoir un spectacle d’improvisation et qu’à la fin, on me dise que dans le public, il y avait Isabelle Cooper qui était là, c’est fou. C’est ce que je retiens. Je peux, entre autres, signaler que j’ai été lauréate du dispositif ‘’Découverte’’ des Francophonies de Limoges pour l’écriture de ‘’Course aux noces’’ publiée chez Lansman Editeur et lauréate aussi du SENDA/Comédie de Valence saison 2023-2024.

Avez-vous eu l’occasion de travailler avec des comédiens du Bénin ?
Oui, je travaille forcément avec eux. Je suis dans un métier où on ne travaille pas seul ; il faut travailler avec les autres. S’agissant de comédiens ou comédiennes, je peux citer Carole Lokossou, Sophie Metinhoué, Ernest Kaho paix à son âme, Guy Kpohinto, Didier Nassègandé pour ne citer que ceux-là.

Quel regard avez-vous sur la comédie béninoise ?
Je trouve que les hommes et les femmes qui travaillent dans ce domaine en font beaucoup. Parfois quand je suis en colère, je dis que nous sommes dans un pays qui ne nous mérite pas. On fait beaucoup et on gagne très peu. On travaille durement pour offrir des productions, des produits. Et ce n’est pas facile de toujours faire recours à l’Institut Français et à la coopération. Ce n’est pas toujours évident.

À vous entendre, on comprend que ce n’est pas sans difficulté, votre aventure. Parlez-nous un peu des difficultés.
Ce parcours n’est pas sans difficulté. J’ai connu de nombreuses difficultés mais la plupart du temps, ce sont celles financières. On n’a pas les moyens qu’il faut pour faire notre travail. C’est surtout un travail qui demande beaucoup de moyens. Tu as des envies, tu as des rêves et tu as envie de créer de gros spectacles qui plaisent, qui émerveillent mais avec des soins limités au moyen.

Quels sont vos projets ?
Actuellement, je suis en création donc je travaille avec une équipe qui va répéter et finir la création à Lomé et venir présenter ici.

Un mot à l’endroit du public
Soyez au rendez-vous. Une façon aussi de nous soutenir est de venir voir ce que nous produisons. Nous sommes dans un petit pays démographiquement parlant. C’est déjà compliqué et on n’a pas du monde. Et si on n’a pas le soutien du public, nous, on n’est rien. Donc, j’invite toute la population à venir massivement. Et ‘’Monsieur, Blanchette et le loup’’, c’est écrit au jeune public mais je conseille aux parents de venir avec les enfants et même à ceux qui n’ont pas d’enfant de venir. Car, c’est un peu tout le public pour moi.
Propos recueillis par Fidégnon HOUEDOHOUN



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