La Belgique veut répertorier les objets acquis de façon « illégitime » au Congo

8 juillet 2021

Le gouvernement belge a présenté hier (mardi) une feuille de route pour répertorier les objets acquis de manière « illégitime » au Congo de 1885 à 1960. Une approche globale pour préparer de potentielles restitutions sans attendre de demande formelle de la part des autorités congolaises.

La Belgique détient à ce jour dans ses collections fédérales environ 85 000 objets provenant de l’actuelle République démocratique du Congo. Il s’agit de statuettes, de masques et de nombreux ustensiles du quotidien, principalement regroupés à l’Afrika Museum de Tervuren près de Bruxelles.

Sur ces quelques 85 000 objets, explique Thomas Dermine, secrétaire d’État pour la Relance et les Investissements stratégiques, chargé de la politique scientifique belge et auteur de la proposition, environ un pour cent peuvent déjà être versés dans la catégorie « acquis de façon illégitime ». « Car nous avons des preuves historiques suffisamment solides pour dire qu’ils ont été acquis dans des conditions de pillages, de massacres, de violence. Le caractère novateur de notre proposition, c’est de scinder la question de la restitution matérielle et celle de la restitution de la propriété juridique ».

Ainsi, sans attendre de demande formelle de la part des autorités congolaise et l’organisation d’un éventuel retour en RDC, il s’agit de sortir ces objets du domaine public. Ils ne seront donc plus considérés comme propriétés de l’État belge, mais comme appartenant à l’État congolais, même s’ils seront conservés sur le territoire belge dans un premier temps.

Un travail colossal
Ensuite, poursuit Thomas Dermine, « il y a 60 % des objets détenus dans les collections belges pour lesquels, au contraire, on a relativement peu de doute sur le fait qu’ils ont été acquis de façon légitime, dans des circonstances de dons ou d’échanges commerciaux équilibrés. »

Reste donc, environ 40% d’objets, « pour lesquelles la nécessité d’accélérer les études de provenance est réelle ». Et c’est le deuxième axe de la feuille de route présentée mardi. « Nous souhaitons entamer dans les prochains mois un travail diplomatique avec le Congo pour avancer sur l’organisation juridique, mettre en place une commission mixte belgo-congolaise. »

Une coopération scientifique entre chercheurs belges et congolais est déjà en place, mais l’ampleur de la tâche est colossale. Guido Gryseels, directeur général de l’AfrikaMuseum, estime qu’il faudrait a minima cinq ans et 2,5 millions d’euros d’investissement pour déterminer la provenance de tous les objets dont les conditions d’acquisition restent incertaines. Se pose aussi, selon lui, la question de la définition du caractère illégitime des conditions d’acquisition de certains objets, qui ont pu être obtenus sans violence, mais dans le cadre d’une transaction déséquilibrée.

« L’objectif est d’avancer sans plus attendre, ajoute Thomas Dermine. C’est sujet très fort en Belgique, après le mouvement Black Lives Matter, le 60e anniversaire de l’indépendance du Congo (30 juin 1960), les excuses publiques du roi Philippe pour les humiliations et les souffrances infligées au Congo (l’an dernier). »

Le secrétaire d’Etat souhaiterait pouvoir présenter des avancées l’an prochain en même temps que les conclusions de la commission parlementaire Vérité et Réconciliation sur le passé colonial belge au Congo, attendues l’an prochain.
Source : rfi



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