Vaccin contre le Covid-19 : Sanofi avantage les États-Unis et crée la polémique

14 mai 2020

Le géant pharmaceutique compte distribuer en priorité aux États-Unis un éventuel vaccin contre le Covid-19. Sauf si l’Union européenne se montre « aussi efficace » pour financer son développement. « Inacceptable », a dénoncé le gouvernement français.

« Les Américains sont efficaces en cette période. Il faut que l’UE soit aussi efficace en nous aidant à mettre à disposition très vite ce vaccin », a déclaré sur la chaîne BFMTV le président de Sanofi France, Olivier Bogillot.

Le géant français de la pharmaceutique avait prévenu la veille par la voix de son directeur général, Paul Hudson : il distribuera « en premier » aux États-Unis un éventuel vaccin. Le gouvernement américain « a le droit aux plus grosses pré-commandes », car il « partage le risque » des recherches et a « investi pour essayer de protéger [sa] population ».

Le 18 février dernier, Sanofi a signé un contrat de partenariat avec le ministère américain de la Santé via l’une de ses agences, l’Autorité pour la recherche et développement avancée dans le domaine biomédical (Barda). La priorité donnée aux États-Unis, a précisé Paul Hudson, pourrait être de quelques jours ou quelques semaines.

« Bien public mondial »
Ce jeudi, une telle éventualité a été jugée « inacceptable » par la secrétaire d’État à l’Économie, Agnès Pannier-Runacher, qui dénonce tout « accès privilégié de tel ou tel pays sous un prétexte pécuniaire ».
« S’il le faisait, ce serait incompréhensible et indigne [...]. Ce vaccin devra être un bien public mondial », a de son côté réagi Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation sur France Info. Le Premier ministre Édouard Philippe s’est, lui, entretenu avec Serge Weinberg, le patron de Sanofi, et a déclaré que « l’égal accès de tous au vaccin n’est pas négociable ». Le chef du gouvernement assure avoir obtenu de Serge Weinberg « toutes les assurances nécessaires quant à la distribution en France d’un éventuel vaccin Sanofi ».

Ce sujet a fait réagir jusqu’au plus haut sommet de l’État. L’Élysée indique que le président de la République s’est « ému » de l’annonce de Sanofi de servir en priorité les États-Unis. En outre, Emmanuel Macron estime qu’il est « nécessaire que ce vaccin soit un bien public mondial, extrait des lois du marché ». Stefan de Keersmaecker, porte-parole de la Commission européenne, est du même avis : « Le vaccin contre le Covid-19 doit être un bien d’utilité publique et son accès doit être équitable et universel ».
Interrogé à de multiples reprises sur un décalage entre États-Unis et Union européenne en matière de distribution d’un vaccin, le patron de Sanofi en France s’est abstenu d’un démenti clair. Il a assuré néanmoins qu’un tel traitement serait in fine « accessible à tous ». « La production sur le sol américain sera principalement dédiée aux États-Unis et le reste de [ses] capacités de production sera alloué à l’Europe, à la France et au reste du monde. »

Vaccin utilisable d’ici 18 à 24 mois
« L’objectif, c’est que le vaccin soit disponible à la fois aux USA, en France et en Europe de la même manière », a assuré Olivier Bogillot. Mais, dans les faits, cela sera possible « si les Européens travaillent aussi rapidement que les Américains, a-t-il tempéré. On est en pourparlers avec les autorités européennes [...] et certains États de l’UE comme la France et l’Allemagne pour accélérer les choses », notamment pour faciliter les procédures réglementaires.

Qu’en est-il des recherches elles-mêmes ? Le patron de Sanofi France a confirmé l’objectif d’un vaccin utilisable d’ici 18 à 24 mois. Selon lui, un tel calendrier est extrêmement accéléré par rapport à la normale, qui tourne autour d’une dizaine d’années.
Source : rfi



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