Entretien avec Gratien Ahouanmènou du Parti du renouveau démocratique : « Ce qui s'est passé lors des communales de 2020 est une nouvelle expérience et nous allons en tirer les conséquences »

Karim O. ANONRIN 16 septembre 2020

Le Parti du renouveau démocratique (PRD) organise dans la période allant du 17 au 20 septembre 2020 les manifestations entrant dans le cadre de ses 30 ans d’existence et l’édition 2020 de son université de vacances. En vue de ces deux événements, le Délégué Général chargé de la formation politique et des questions électorales, Gratien Ahouanmènou, membre de la Direction Exécutive nationale du PRD nous parle des tenants et aboutissants. Il n’a pas manqué de revenir sur la participation du parti aux dernières élections communales.

Comment se porte aujourd’hui le Parti du renouveau démocratique ?
Le PRD se porte au mieux de sa forme.

Peut-on vraiment dire qu’un parti politique se porte bien quand il n’a pas d’élu ni au Parlement ni dans les conseils communaux et municipaux ?
La bonne santé d’un parti politique ne se limite pas uniquement aux résultats d’une élection à laquelle il a pris part. Quoiqu’on dise, le PRD a une histoire et les dernières élections communales auxquelles il a pris part n’ont fait que confirmer la santé qui est celle du PRD. Pour rappel, n’eussent-été les dispositions du Code électoral en vigueur, des Communes comme Porto-Novo, Sèmè-Podji et Adjarra seraient aujourd’hui dirigées par des Maires issus du PRD sans oublier plusieurs autres Communes où des candidats du PRD ont pu tirer leur épingle du jeu en écrasant littéralement leurs challengers dans les urnes

Mais le Prd avait bien pris connaissance du Code électoral en question avant d’aller aux élections. Il aurait pu s’abstenir.
Le PRD est un parti politique bien organisé et il ne saurait faire la politique de la chaise vide. Ce qui s’est passé lors des communales de 2020 est une nouvelle expérience et nous allons en tirer les conséquences. Nous avons toujours pris part aux élections depuis l’avènement du renouveau démocratique sauf en 2019 pour les élections législatives desquelles nous avons été exclus par des pratiques anti-démocratiques. Ce n’est pas aujourd’hui qu’il y a un nouveau système partisan que nous allons renoncer au combat politique. Il y a des lois qui ont écarté le PRD et il faut avoir l’honnêteté de le reconnaître.

Le Prd est-il étranger à ces lois ?
Je vois là où vous voulez en venir. Nous avons entendu beaucoup de choses aux lendemains des communales 2020 où certains parmi nos compatriotes ont écrit sur les réseaux sociaux que les lois incriminées sont celles-là mêmes que le PRD a votées. D’abord, je voudrais rappeler que le PRD n’a pas de député à l’Assemblée nationale, 8ème législature. La loi portant Code électoral qui a servi de guide pour les communales de 2020 a été votée par les députés de la 8ème législature en novembre 2019. Malgré les dispositions à l’antipode de la décentralisation contenues dans ce Code électoral, le PRD a pris part à ces élections communales. Cette participation ne signifie aucunement que le PRD est complice de cette loi. Le PRD à travers ses députés a participé au vote d’une loi portant Code électoral au cours de la 7ème législature ; le Code qui a servi aux élections législatives. Dans ce Code qui a été complètement modifié pour les communales de 2020, l’article 242 stipulait que lorsqu’il n’y a pas quatre formations politiques alignées avec au moins 10% du suffrage recueilli par chacune d’elles, on attribue les sièges selon le critère utilisé avec le Code électoral de 2013. Il faut donc dire que contrairement à ce qui est diffusé sur les réseaux sociaux, il y a une différence entre le Code électoral ayant servi pour les législatives de 2019 et celui qui a servi pour les élections communales de 2020. Mais là n’est pas le problème. Il y a des choses que nous ne pouvons pas étaler sur la place publique au nom de la paix et de la cohésion nationale.

Qui en veut tant au PRD ?
Le Prd est habitué aux coups bas, même venant de ceux qui ont profité de sa notoriété. Aujourd’hui, l’enjeu est de tourner les regards vers l’avenir. Il ne sert plus à rien de chercher de coupable. Le PRD a animé la vie publique pendant 30 ans. L’édition 2020 de notre université de vacances sera l’occasion pour nous de faire le bilan et de jeter les bases du renouveau de notre parti.

Monsieur Gratien Ahouanmènou, lorsque vous analysez les résultats des élections communales de 2020, ne voyez-vous pas que le PRD n’est pas un parti d’envergure nationale ? L’un des objectifs de la réforme du système partisan est d’avoir des partis d’envergure nationale.
Notre université de vacances se penchera aussi sur cette problématique. Je voudrais simplement vous dire que le PRD n’est pas contre la réforme du système partisan. D’ailleurs, le président Adrien Houngbédji est le premier politique à avoir tiré la sonnette d’alarme dans son discours d’investiture en tant que président de l’Assemblée nationale, 7ème législature où il appelait ses collègues à travailler pour un nouveau système partisan. Mieux, le PRD s’est engagé plus tard dans un processus de fusion avec d’autres formations politiques. On a souvent entendu dire que le PRD a quitté le Bloc Républicain alors qu’au congrès extraordinaire du 27 octobre 2018 à Avrankou, il y a adhéré officiellement. Le congrès extraordinaire d’Avrankou était plutôt pour annoncer à la base que le PRD s’était engagé dans le processus de sa disparition, mais ledit processus n’a pas connu une issue heureuse et nous ne regrettons rien

Quelle est la position actuelle du PRD sur l’échiquier politique national ? Mouvance ou opposition.
Le PRD est un parti au sein duquel on réfléchit avant d’agir. Le PRD depuis 2016 est de la mouvance même si jusqu’à présent il a n’a pas participé au gouvernement. Cette décision remonte à 2014 où le parti annonçait déjà qu’à partir de 2016, il ne fera pas l’opposition. C’est dire que la position actuelle du PRD n’a pas varié. Cette position n’a jamais été un appel de pied adressé au pouvoir, en témoignent la liberté d’expression et d’opinion qui caractérise notre parti. Notre appartenance à la mouvance présidentielle n’est pas non plus une question d’opportunisme. Encore une fois, je voudrais dire que toutes les questions relatives à l’avenir du parti seront débattues au cours de l’université de vacances.

Quel est aujourd’hui l’état d’âme des militantes et militants du parti ?
Il n’est aucun doute qu’il y a aujourd’hui des ressentiments de découragement et surtout de frustration puisque ces militantes et militants étaient habitués à voir le parti gagner des élections dans plusieurs localités du pays. Je les comprends. Certes, l’université de vacances 2020 ne sera pas un cadre de prise de décisions nouvelles. Elle nous permettra de recueillir des suggestions susceptibles d’aider le parti à relever des défis. Le PRD sera de plus trentenaire et je vous l’assure. Trente ans dans la vie, ce n’est qu’un parcours.

Comment se porte aujourd’hui le président Adrien Houngbédji ? On le sent de moins en moins devant la scène politique. Va-t-il enfin passer la main ?
Le président Adrien Houngbédji se porte bien et nous continuons d’apprendre de lui. Ce n’est pas à une université de vacances que de telles décisions sont prises. S’il demeure président du Parti du renouveau démocratique, ce n’est pas de sa propre volonté. C’est bien parce que les militantes et militants l’ont voulu ainsi. Il lui reviendra de décider de passer la main lors d’un congrès de renouvellement des membres des organes du parti s’il lui est demandé de continuer de nous diriger.

Comment se déroulera l’université de vacances 2020 ?
Il y a l’université de vacances, mais il y a d’abord les manifestations entrant dans le cadre des 30 ans de création du Parti du renouveau démocratique (PRD). Je rappelle que c’est le 20 août dernier que le parti a bouclé trente ans d’existence. A cet effet, nous organiserons dès le 17 septembre, des cultes religieux dans plusieurs localités du pays pour rendre grâce à Dieu et aux mânes de nos ancêtres. Nous devons prier pour ceux des nôtres qui ne sont plus de ce monde et implorer la grâce de Dieu pour fortifier nos aînés, membres fondateurs du parti qui sont encore là. Pour ce qui concerne l’édition 2020 de l’université de vacances du PRD, elle se déroulera les 19 et 20 septembre dans le strict respect des mesures barrières contre la pandémie du nouveau coronavirus. Elle a lieu au siège national du parti à Porto-Novo dans la grande salle d’une capacité d’accueil de 700 places, mais qui n’accueillera que 250 délégués toujours à cause de la Covid-19. Cependant, toutes les dispositions seront prises pour que tous les militantes et militants puissent suivre et participer aux travaux via notre site internet en temps réel, quel que soit l’endroit où ils se trouvent.

Un mot sur la présidentielle de 2021. Qui sera le candidat du PRD ?
Le PRD se prononcera. Vous ne voyez quand même pas un parti trentenaire ne pas se prononcer sur une élection qui engage la vie de plus de 10 millions de Béninoises et de Béninois. Seulement, je ne saurais vous dire qui sera le candidat du PRD.

Le candidat annoncé à la présidentielle de 2021, Joël Frédéric Aïvo semble-t-il, est revenu au PRD. Est-ce vrai ?
Il est le mieux placé pour répondre à cette question. Le moins que je puisse dire est que le PRD est un parti politique ouvert.

Votre mot de fin
Je vous remercie pour cette opportunité que vous m’offrez pour parler du Parti du renouveau démocratique qui célèbre 30 ans d’existence et qui organise par la même occasion l’édition 2020 de son université de vacances. C’est le lieu pour moi d’inviter les militantes et militants à la sérénité.
Propos recueillis par Karim Oscar ANONRIN (Exclusivité journal FRATERNITÉ)



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