Amendement du nouveau code électoral : Ce qu’en pensent les populations

14 mars 2024

Le code électoral a été amendé le mardi 5 mars dernier à l’Assemblée nationale. Des modifications apportées, notamment les seuils de 15% et 20% suscitent polémiques et inquiétudes dans l’opinion publique. Quelques citoyens béninois donnent leur appréciation sur cet exercice des députés de la 9ème législature.

Astide Michaï, juriste et jeune parlementaire du Bénin : « La réforme du système partisan sera bien renforcée à travers la mise en place des grandes formations politiques… »
Les modifications apportées au code électoral les 5 et 6 mars derniers à l’Assemblée nationale sont salutaires. C’est déjà une bonne chose du fait qu’aucun des partis actuellement au parlement n’est frappé par les critères intégrés dans le code amendé. On ne parlera plus d’exclusion. Je pense que c’est inclusif. En plus de cela, lorsqu’on voit les objectifs fixés par les seuils de 15% et 20%, les transhumances politiques observées par le passé jusque-là et la pléthore des partis de région n’auront plus droit de cité. La réforme du système partisan sera bien renforcée à travers la mise en place des grandes formations politiques qui vont devenir une réalité chez nous comme c’est déjà le cas aussi bien aux États-Unis d’Amérique, de l’autre côté de l’océan Atlantique, qu’au Ghana et Nigeria ici en Afrique. Les acteurs politiques vont réellement œuvrer pour l’animation de la vie politique chez nous. Ainsi, les partis politiques participeront de façon effective à la gouvernance de développement du pays.

Hubert Clotoé, directeur exécutif de l’Ong Sonagnon et acteur de la société civile : « Je pense qu’il est important de maîtriser les problèmes des populations dans toutes les régions du pays »
Le président de la commission des lois de la 9ème législature, lors d’une sortie médiatique, a signalé que les députés ont saisi l’occasion de la retouche du code électoral demandée par la Cour pour régler d’autres questions. D’où l’intégration dans le nouveau code, des critères liés aux seuils de 15% et de 20 %. Par exemple, lorsqu’on prend le cas des 20%, les partis politiques vont travailler davantage pour se rapprocher de leurs électeurs qui sont les populations. Ce sera une occasion pour connaître les problèmes qui minent les populations et de pouvoir y apporter des solutions. Et je pense qu’il est important de maîtriser les problèmes des populations dans toutes les régions du pays. Si dans l’application, ces objectifs sont atteints, ce sera très bien. Mais si c’est pour écarter d’autres citoyens de la gestion de la chose publique comme le pensent déjà certains, ce sera dommage. Je leur fais confiance. Le dispositif du nouveau code n’a exclu aucun parti en exercice actuellement à l’Assemblée. En réalité, les lois sont ce qu’elles sont, c’est nous qui les qualifions de ‘’corsées’’ ou ‘’non corsées’’. Je pense que les députés de la 9ème législature se montrent déjà à la hauteur de leurs propres responsabilités et je pense aussi qu’ils maîtrisent leurs limites. Personnellement, ce qui me réjouit dans cette loi, c’est le fait qu’un député ou maire ne pourra parrainer qu’un membre désigné par le parti au sein duquel il a été élu sauf en cas d’accord. Cela met fin à la transhumance politique. En somme, c’est l’amour que nous voulons pour ce pays, et dans l’amour, ce qui n’est pas réel meurt.

Rodrigue Glèlè, technicien et entrepreneur : « Ceux pour qui on vote doivent connaître les problèmes des populations. C’est une logique »
La révision du code électoral, selon les clarifications du législateur de 2024, a des intérêts communs. Mais ce que le peuple a déjà vécu comme expérience fait que certains ne perçoivent pas encore la pertinence du contenu. Ce qui suscite plus d’inquiétude, ce sont les critères liés aux seuils de 15% et 20%. Le seuil des 15% va amener les partis à mouiller davantage le maillot et animer la vie politique pour une bonne gouvernance de développement. C’est la réforme du système partisan qui est ainsi renforcée. On pourra avoir des grands partis politiques dans le pays. Quant au seuil de 20%, les partis politiques lesquels la population vote lors des élections vont s’imprégner de leurs conditions. Ceux pour qui on vote doivent connaître les problèmes des populations qui leur accordent des suffrages pendant les élections. Moi, je suis un citoyen et je vote chaque fois. Mais aucun membre de parti politique ne me connait et à plus forte raison mes problèmes. Je trouve donc logique le contenu du code. Vivement que dans l’application, les raisons avancées pour convaincre soient respectées. Que les objectifs soient aussi atteints.

Hervé Sinkpehoun, béninois de la diaspora résident en France
« Une étape importante vers une démocratie plus transparente, équitable et respectueuse »

Je voudrais inviter chacun à dépassionner le débat sur le nouveau code électoral et analyser de plus près certains points qui pourraient être positifs pour notre pays. En effet, ce code représente une avancée significative dans la lutte contre le phénomène de transhumance politique, qui a longtemps sapé la confiance du peuple envers ses représentants politiques.
L’une des principales vertus de ce nouveau code est sa capacité à endiguer le fléau de la transhumance politique, où les acteurs politiques changent de parti selon leurs intérêts personnels du moment. En exigeant que le parrainage soit accordé exclusivement à des candidats du même parti, ce code mettrait fin aux pratiques de marchandage politiques et favoriserait la stabilité des partis politiques.
De plus, l’imposition d’un seuil minimum de pourcentage de voix pour remporter de sièges aux élections garantit une représentation plus claire et plus cohérente à l’Assemblée nationale. Limiter le nombre de partis politiques représentés à quatre (maximum) permettra une meilleure lisibilité de la vie politique et favorisera des débats plus constructifs et efficaces au sein de notre Parlement.
Cependant, je suis conscient que la loi seule ne peut résoudre tous les problèmes. Il est essentiel que les partis politiques s’engagent à former leurs membres aux valeurs morales et républicaines, afin de promouvoir une culture politique plus saine et éthique. La responsabilité incombe à chacun d’entre nous, en tant que citoyens engagés, de cultiver un esprit civique et un engagement envers l’intérêt général.
En conclusion, je soutiens pleinement ce nouveau code électoral, qui représente une étape importante vers une démocratie plus transparente, équitable et respectueuse. Cependant, je reste convaincu que le véritable changement viendra de l’engagement individuel et collectif en faveur de valeurs démocratiques et éthiques.

Amidou MADOUGOU, enseignant au CEG Zinvié
« Ce code va nous éviter surtout le régionalisme »

Je pense qu’avec le nouveau code électoral, nous aurons désormais des partis qui ont une envergure nationale. Ce code aura le mérite de recadrer la vie politique au Bénin. Les différents partis sauront désormais qu’ils doivent véritablement mouiller le maillot et s’implanter dans les quatre coins du pays s’ils veulent vraiment exister sur l’échiquier politique béninois. Cela nous évite surtout le régionalisme. On a toujours remarqué des partis qui ne sont connus que dans une seule région du pays, des partis qui ne peuvent pas oser au-delà de leur fief. Il faut finir avec ça. Avec ce changement, les élus vont se sentir élus par toute la population de tout le pays et non par un "quartier". Lorsque je sais par exemple que je suis élu grâce à une zone Z, logiquement, mes actions seront plus orientées vers cette région. Ce qui peut mettre à mal la cohésion nationale. Autre point positif, c’est qu’avec ce nouveau code, on ne va plus assister à la prostitution politique des élus. Ces derniers savent désormais qu’il ne faut pas, pour des intérêts personnels, laisser son parti pour un autre.

Méphis KITI, activiste et enseignant
« Ce code électoral va permettre d’assainir l’échiquier politique »

Ce code électoral loin d’être un code à polémique, va quand même permettre d’assainir l’échiquier politique national. Car désormais nous aurons des partis politiques forts qui vont travailler à ce qu’il y ait une relève de qualité. Relève de qualité dans le sens où les partis vont être des centres de formation des acteurs politiques depuis la base et n’importe quel novice ne viendra plus en politique de façon parachutée. Ces futurs politiques de demain vont savoir désormais rédiger de bons projets de développement depuis la base et vont contribuer efficacement au développement du pays. On n’aura plus une multitude de partis politiques qui n’ont pas une assise nationale digne du nom et qui se disent animateurs de la vie politique au Bénin. Les micro-partis doivent désormais fusionner pour créer un grand ensemble afin d’avoir un ancrage national.

Nelly MITCHAI, activiste des droits des femmes
« Cette initiative vise à promouvoir l’équité, la transparence et la représentativité »

La récente modification du code électoral au Bénin représente une avancée significative dans le renforcement de notre système démocratique. En introduisant des critères plus stricts pour les candidats à l’élection présidentielle et en ajustant les conditions de répartition des sièges au parlement, cette initiative vise à promouvoir l’équité, la transparence et la représentativité dans notre processus électoral. Les changements apportés, notamment l’augmentation du seuil de parrainage des candidats à la présidentielle et la condition de répartition des sièges au parlement, visent à consolider la gouvernance démocratique et à garantir une participation politique plus équilibrée.
Les nombreux recours déposés suite à la récente modification du code électoral au Bénin témoignent de l’attention et de l’engagement des citoyens envers notre démocratie. Ces contestations reflètent un désir sincère de garantir la pleine conformité de notre législation électorale avec les principes constitutionnels et les normes démocratiques les plus élevées. Personnellement, je salue cette manifestation de vigilance citoyenne, qui démontre notre attachement indéfectible à l’intégrité de notre système électoral et à l’équité dans la représentation politique.

Réalisation Fidégnon HOUEDOHOUN Ange M’poli M’TOAMA



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