Iréné Agossa : « Avec Djogbénou à la tête de l’UP, le parti RLC de l’opposition pourra désormais faire des débats contradictoires »

19 juillet 2022

Ayant opiné sur la démission de Joseph Djogbénou de la présidence de la Cour constitutionnelle et son installation à la tête du parti politique Union Progressiste (UP), Iréné Agossa, président du parti de l’opposition Restaurer La Confiance (RLC) a, à travers son analyse, estimé qu’avec Joseph Djogbénou, il pourra mener des débats contradictoires pour enraciner la démocratie béninoise.

Depuis le week-end dernier, nous avons constaté que le professeur Joseph Djogbénou est désormais à la tête de l’Union Progressiste (UP), un parti de la mouvance présidentielle. C’est vrai que vous êtes de l’opposition, mais quelle lecture faites-vous de cette désignation ?
Depuis la démission de celui qu’on appellera désormais ancien président de la Cour constitutionnelle, l’univers médiatique béninois s’est mis en ébullition pour en parler sans cesse. C’est tout à fait normal, d’autant plus que ça ne s’est jamais produit. Or, il n’y a pas de problème, puisque nous constatons que la démission ne donne pas lieu à une crise institutionnelle. La démission est prévue par la loi organique qui régit la Cour constitutionnelle et donc, il n’y a pas péril en la demeure.
Pour ce qui est de notre appréciation de sa désignation à la tête du parti UP, nous n’avons une appréciation autre que de lui souhaiter la bienvenue dans l’arène politique nationale et que son mandat soit couronné de succès. Nous souhaitons aussi plein succès à notre doyen, le patriarche Bruno Amoussou dans ses nouvelles missions.
Mais ce qui nous étonne est ceci : Pourquoi vous nous posez la question sur le fait que Djogbénou soit porté à la tête de l’UP ? Pourquoi vous n’avez pas posez la question à UP et autres partis quand nous nous avons été élus Président de RLC ? Pourquoi vous n’avez pas fait de même quand Houndété a été élu Président de LD ? DJOGBÉNOU porté à la tête de L’UP n’a pas plus d’importance que mon élection ou l’élection de Houndété ou d’un autre Président de parti. Ce qui peut- être aurait eu une importance c’est la démission. La démission d’un Président d’institution dans le contexte actuel nous aurais fait penser à une rupture avec le système. Quand on a appris sa démission, nous nous attendions à une rupture avec le système de la démocratie de la rupture, c’est à dire qu’il veut rompre avec la rupture démocratique qui est le fondement de l’orientation politique du "Talonnisme", que nous condamnons par ailleurs. Par conséquent rompre avec les partis à béquille, c’est-à-dire les partis qui en fait ont été créé en étant au pouvoir ou bien les partis gérés par dérogation. Mais à notre grande surprise, il n’a pas rompu, il a fait le choix de continuer sur le même chemin en retournant à l’UP. Dans la logique de la compréhension d’une démission, on espérait que maître Djogbénou fasse le choix audacieux de s’inscrire à RLC, puisque la rupture avec le système en place devrait conduire quelqu’un qui a démissionné vers un parti comme le nôtre d’autant plus que nous RLC, nous sommes en opposition de phase avec le système en place. RLC est contre les démocraties de système et les partis personnalisés. Nous rassurons le nouveau président de l’UP que RLC va pousuivre son combat idéologique qui l’oppose à L’UP en particulier et aux autres partis de la mouvance présidentielle en générale.

Quelles sont vos attentes par rapport à la présidence du professeur Djogbénou à la tête de ce parti de la mouvance présidentielle ?
Avec la Présidence Djogbénou, nous n’attendons pas de l’UP quelque chose de particulier par rapport à la Présidence Amoussou. Pour nous rien n’a fondamentalement changé. Nous nous opposons à la vision de ce parti dont le soutien au pouvoir de Talon a été à la base des différentes crises politiques, des injustices socio-économique... Nous maintenons toujours le cap. Mais comme ce n’est plus le patriarche à la tête du parti, nous attendons de l’UP, que désormais le Président Djogbénou soit disponible pour les débats et venir défendre la vision de ce parti. Puisque c’est eux qui incarnent "le Talonisme". Ce système est géré du point de vu partisan par les partis qui le soutiennent. Donc ils vont défendre désormais le "Talonnisme" face à nous. Nous aurons maintenant un vrai débat. Ils vont dire par exemple pourquoi ils ont voté la loi sur l’avortement, ils vont dire ce qu’a apporté la loi sur l’embauche qui n’a fait que précariser le travail et a détruit sa valeur. Aujourd’hui, que proposent-ils face au problème du pouvoir d’achat des béninois ? Qu’est-ce que nous pouvons faire en ce qui concerne l’insécurité grandissante dans le Septentrion avec le terrorisme ? De même en ce qui concerne notre autonomie énergétique qui handicape notre productivité ? Comment allons-nous produire pour faire face à l’inflation ? Quelles seront les différentes orientations de notre économie pour faire face aux défis actuels ? la question de nos rapports avec le Nigéria, notre appartenance à l’espace francophone ; qu’est-ce que la France est désormais pour nous avec le nouvel ordre mondial qui pointe à l’horizon... Il y a autant de questions dont nous allons débattre. Le débat sur ces sujets importants pour le développement ne peut plus être occulté . Nous espérons que désormais ça va changer en ce qui concerne l’animation de la vie politique nationale.

Vous avez effectué une sortie médiatique où vous avez déclaré que professeur Djogbénou pourrait être le prochain président de l’Assemblée Nationale. Qu’est-ce qui vous permet de faire cette affirmation ?
Oui, le Président Djogbénou a démissionné de la Cour constitutionnelle et il ne peut pas être un simple membre de UP, là nous avons eu raison, notre analyse tient, puisqu’il est devenu directement Président de l’UP. De la même, je ne crois pas qu’il a démissionné de la Cour pour être simplement député au parlement. En tenant compte du contexte politique nous nous projetons qu’il peut être le candidat au perchoir, ce qui est tout à fait normal d’autant plus que le "Talonnisme" n’a fait que ce que nous, nous avons déjà prévu depuis plus d’un mois : pour rappel nous avons préconisé que les partis de l’opposition et apparentés, doivent solutionner le problème de leadership et ceci dans l’immédiat parce que le combat de 2023 est celui du perchoir. Ce n’est pas le combat d’être simplement député car notre mission en qualité de force de l’opposition est de changer l’ordre des choses sur le plan politique, sur le plan économique, sur le plan social, sur le plan sécuritaire, sur le plan diplomatique... Ça veut dire que nous voulons gérer le parlement en faisant une nouvelle offre. Pour nous, ce que fait le gouvernement depuis 5 ans n’a pas pu combler les attentes de nos populations. Conduire ce combat à terme exige de nous de l’opposition de prendre conscience de l’immédiateté de certaines décisions à prendre et des actions à mener. Il s’agit :
1- décider d’une stratégie commune ;
2- désigner le probable candidat au perchoir soit par consensus ou par des primaires.
Cette démarche, va rassurer l’opposition, rassurer nos électeurs et va garantir la capacité de réaction de l’opposition face aux résultats des élections. Ainsi le peuple de l’opposition va se décider et ira voter massivement et dès l’instant, la peur va changer de camp.
Il est désormais claire qu’en faisant de Djogbénou Président de l’UP, ils n’ont fait que suivre ce que RLC a prévu, car le "Talonnisme" sait que2023 va se jouer au niveau du perchoir. Est-ce que le parlement doit continuer par soutenir l’action du gouvernement comme ça se passe aujourd’hui ? C’est la question que nous allons poser aux populations, ou bien si les populations veulent élire un autre parlement qui fera une autre offre afin de rétablir l’équilibre entre les forces politiques de l’opposition et celles de la mouvance pour contraindre le Chef de l’Etat à changer de politique. Donc nous ne faisons pas une fausse analyse, nous sommes dans une logique politique concrète. Le "Talonnisme" n’a fait que suivre ce qui doit être fait en désignant Joseph Djogbénou et nous nous avons projeté qu’ils sont effectivement dans la logique du contrôle du perchoir.

Joseph Djogbénou à la tête de l’UP n’est-il pas une manière de combler les attentes de l’ethnie fon majoritaire de cette formation politique et d’influencer l’opposition surtout votre parti RLC ?
Nous nous n’avons aucun problème avec la présence de Joseph Djogbénou à la tête de l’UP. S’il y aura un impact de sa désignation à la tête de l’UP, cela concerne les militants UP et les partis de la mouvance BR, PRD, MOELE. En quoi ça peut créer un bouleversement à notre niveau ? Peut-être au niveau de ceux qui n’ont pas encore un schéma pour conquérir le parlement et gagner le perchoir. Nous nous avons déjà notre schéma. Et d’ailleurs nous avons de l’avance sur les Partis de la mouvance et c’est eux qui doivent être bouleversés puisqu’ils sont derrière nous. Je vous informe que d’ici le mois d’Août, nous allons rendre les choses claires, parce que nous allons apporter des clarifications au sein de l’opposition et nous allons accélérer la mise en œuvre de notre stratégie. Ceux qui ne vont pas vouloir que nous soyons dans une stratégie commune pour que l’opposition puisse avec une certaine facilité conquérir le perchoir, ceux là nous allons montrer au peuple ce qu’ils sont et nous allons poser notre problème directement au peuple à travers notre choix par rapport au perchoir. Nous allons demander au peuple de choisir et vous allez voir comment ça va se passer. Nous n’avons aucun problème avec l’UP, nous leur souhaitons bon vent. S’il y a des bouleversements à leur niveau, nous pensons qu’ils auront les possibilités de règlement de leur problème à l’interne. Tout ce à quoi nous aspirons ,c’est que le débat soit désormais clair pour permettre d’aborder les véritables problèmes du pays. Les questions relatives aux ethnies et autre ça les concernent. Nous nous n’avons pas ce problème, nous avons un parti national, nous sommes du nord comme du sud, de l’est comme de l’ouest et nous pensons que la charte des partis a réglé ce problème. Nous ne sommes pas dans la cuisine interne de UP, de BR etc… Nous sommes opposés au "Talonisme" et alors à toutes les structures, tous les partis politiques, tout ce qui dans le cadre républicain soutient ce système se retrouve en opposition avec nous. Nous allons mener tous les combats de façon légale pour qu’ils soient battus à travers les urnes. L’important pour nous c’est les législatives prochaines et nous disons que l’enjeu c’est le perchoir et ça commence maintenant. Parce qu’il s’agira pour les béninois, les citoyens électeurs de choisir entre la continuité de l’action gouvernementale telle que ça se déroule ou la rupture avec le "Talonnisme" et opter pour l’alternance, afin que nous finissons avec la vie chère, que nous finissons avec la faiblesse du pouvoir d’achat, que nous finissons avec l’inflation, le chômage, la précarité les inégalités sociales, les problèmes diplomatiques avec le Nigéria, la baisse du taux de scolarisation, que nous finissions avec ces problèmes créés par le pouvoir en place et qui rendent difficile le quotidien des Béninois. Et c’est ça le véritable choix que les populations feront.
Je vous remercie !
Propos recueillis par Adrien TCHOMAKOU



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