Couverture sanitaire universelle au Bénin : Décryptage de Dr Justin SOSSOU

Isac A. YAÏ 16 mai 2022

Si les réformes en vue de la couverture sanitaire universelle ne donnent pas les résultats escomptés, il est encore possible, au Bénin, d’offrir aux populations en général, puis aux mères et aux enfants en particulier, des soins et services de santé de qualité en ne laissant personne de côté.

Certaines réformes engagées depuis 2017 dans le secteur de la santé publique piétinent et sont porteuses de germes qui risquent d’affecter négativement les espoirs des populations, selon Justin SOSSOU, docteur en santé publique et spécialiste des politiques et systèmes de santé. Ceci est l’une des conclusions de sa thèse de doctorat qu’il a soutenue le 23 décembre 2021 à l’Institut Régional de Santé Publique (IRSP) de Ouidah, sur le thème : « Déterminants d’une couverture sanitaire universelle des soins et services de santé maternelle et infantile équitable et pérenne au Bénin ».
Après plusieurs mois de recherches, sous la direction des professeurs Edgar Marius Dona OUENDO et Charlemagne IGUE BABATOUNDE, Justin SOSSOU a abouti à des résultats montrant le vrai visage de la couverture sanitaire universelle au Bénin. Résumés dans un document de 252 pages (4 parties et 9 chapitres), les résultats de l’étude du Dr SOSSOU ont convaincu les membres du jury international qui n’ont pas manqué de saluer la qualité scientifique et la portée socio-économique du travail.
Selon Dr SOSSOU, les inégalités d’opportunités d’accès aux services de santé maternelle et infantile au Bénin avaient un taux de couverture relativement meilleur au cours de l’année 2012 comparé à celui de 2018. Seul l’accès à la vaccination complète de base de l’enfant a connu une augmentation de 2012 à 2018. L’étude révèle que l’inégalité des chances d’accès aux services de santé maternelle et infantile s’est davantage dégradée pendant cette période.
Le spécialiste ajoute que « l’analyse de l’influence des variables de circonstance a montré que le statut socio-économique du ménage constituait la variable de circonstance qui influençait le plus les soins et services de santé maternelle et infantile étudiés à l’exception des soins post-nataux. Après le statut socio-économique du ménage, la région de résidence était la variable qui influençait le plus la naissance dans une formation sanitaire publicque ou privé et il en était de même pour l’accès aux soins pré-nataux et les soins dispensés par du personnel qualifié. »
De plus, « une analyse de la décomposition de la différence de l’indice humain d’opportunité entre 2008 et 2012 indique que les politiques et stratégies d’accès aux soins et services de santé maternelle et infantile au Bénin sont beaucoup plus influencées par l’effet échelle, ce qui indique que les choix de politique publique sont beaucoup plus portés vers la couverture des services à grande échelle qui ne profitent pas aux pauvres extrêmes », explique le Docteur en santé publique.

Discrimination positive
Dr SOSSOU suggère d’améliorer le ciblage des groupes vulnérables à travers l’effet péréquation, c’est-à-dire qu’il faut réaliser une discrimination positive au profit des groupes vulnérables. « La détermination des leviers sur lesquels il fallait agir de manière à optimiser la marche à suivre dans le cadre de la mise en place d’un mécanisme de couverture sanitaire universelle pour les soins et services de santé maternelle et infantile équitables et pérennes au Bénin permet de noter que les variables telles que l’incapacité temporaire de travail du fait de la maladie, le coût des services de santé, la possibilité de parler au médecin au besoin et la capacité à payer sont statistiquement associées. Par ailleurs, les projections en vue de la détermination du montant à payer pour une couverture sanitaire universelle équitable et pérenne des soins et services de santé maternelle et infantile au Bénin ont donné un montant de 767 F CFA, soit 1,43 $ par individu et par mois ».

Services de qualité possibles
Pour Dr SOSSOU, offrir aux populations béninoises en général, puis aux mères et aux enfants en particulier, des soins et services de santé de qualité en ne laissant personne de côté est bien possible au Bénin. Pour y parvenir, il faudra d’une part, poser les jalons nécessaires pour réduire les inégalités et, d’autre part, augmenter les opportunités de chance d’accès aux soins et aux services. « D’abord, il faut investir dans des ressources humaines qualifiées en santé de manière à doter les formations sanitaires des effectifs requis, ensuite mettre en place le leadership et la gouvernance requise pour une gestion optimale des ressources humaines, matérielles et financières. Il faudra enfin mettre en place un mécanisme qui tienne compte des déterminants qui influencent l’adhésion à la couverture sanitaire universelle avec un régime contributif à concurrence de 1,43 $ de paiement mensuel par individu. Pour assurer l’équité et la pérennité du mécanisme, il sera indispensable que l’Etat apporte une contribution estimée à 38,5% de la contribution globale annuelle », conclut Dr SOSSOU.
Couronnées par la mention très honorable avec les félicitations des membres du jury, ces recherches ont été initiées pour répondre à certaines questions pouvant permettre d’améliorer la couverture sanitaire universelle pour le bien-être de la population en général et de la mère et de l’enfant en particulier.



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