Sandra Idossou sur la non répression des sachets plastiques : « L’engouement pour les masques réutilisables prouvent que si on veut, on le peut »

Fulbert ADJIMEHOSSOU 5 juin 2020

Engagée dans la lutte contre les sachets plastiques, Sandra Idossou est sidérée par l’enthousiasme des Béninois à produire des masques en tissu pour faire face à la pandémie. Une volonté qui, dit-elle, est encore indispensable dans la lutte contre les emballages plastiques et pour la laquelle la loi votée passe sous silence.

5 juin 2020. On célèbre la Journée mondiale de l’Environnement. La pollution plastique persiste malgré la loi. Quel est votre état d’âme ?
Dans quelques mois nous allons fêter les trois ans du vote de cette loi sur les sachets plastiques au Bénin. Malheureusement, rien n’a évolué depuis. C’est triste de savoir que cette foi qu’on avait en nos autorités, malheureusement, au niveau de la mise en application de cette loi, rien n’a été fait. Je ne saurai dire malheureusement ce qui justifie cela. Mais tout est une question de volonté. On a bien vu dans ce pays que quand on veut quelque chose, on sait trouver des solutions. C’est probablement qu’il n’y a pas assez de volonté ou qu’il y ait un lobbying d’industriels derrière la non application. C’est très triste parce que nous avions cru qu’il y avait de la bonne volonté pour changer les choses en matière de protection de l’environnement. Si nos autorités décident aujourd’hui qu’on n’ait plus de sachets, nous n’en aurons pas. On a vu que quand ils ont la volonté et qu’ils croient en quelque chose, ils arrivent à trouver les moyens. Pour moi, il n’y a pas eu assez de volonté. Je ne pense pas que ce soit un manque de moyens.

Parlant de volonté, les Béninois n’ont pas hésité à se trouver des masques en tissu quand il s’est agi de se protéger contre la Covid-19. Beaucoup en tirent des revenus. N’est-ce pas possible de trouver, aussi des alternatives aux sachets plastiques et de créer des emplois ?
Le fait que du jour au lendemain, les Béninois se soient mis aux masques réutilisables prouvent une fois encore que si on veut, on le peut. Par contre, il faut faire très attention. Tout ce qui est vendu aux abords de nos routes ne respecte les règles de sécurité. Il y en a quelques-uns qui les respectent. Je salue l’effort de ceux qui travaillent pour que les Béninois aient des masques de tissu pour éviter de continuer à déposer des tonnes de masques jetables dans la nature. Quand on sait que dans notre pays, les déchets ne sont pas traités, malheureusement, il nous arrive d’en trouver sur les bords de nos routes. C’est aussi une question de responsabilité individuelle et collective.
Par rapport aux sachets en tissu, je crois qu’on peut avoir le même engouement. Le jour où les sachets ne seront pas disponibles pour emballer nos produits, vous verrez que nous allons nous tourner vers les emballages alternatifs. Pour moi, c’est la facilité de trouver un sachet plastique qui fait que les Béninois n’arrivent pas à utiliser d’autres emballages autres que les plastiques.

Pensez-vous que quelque chose va changer après la Covid au profit de l’Environnement ?
C’est vrai que quand il y a eu le confinement, on s’est tous émerveillés du fait qu’au moins, pour quelques temps l’environnement allait respirer un peu. C’est vrai qu’il y a eu moins de voyage et donc moins de pollution. Malheureusement, en regardant ce qui se passe, on se rend compte que cette période de pandémie a aussi causé beaucoup de dégâts. C’est-à-dire les déchets qui ont été générés dans la riposte de la Covid-19, les déchets médicaux, les masques de protection, les combinaisons. Je me demande ce que notre environnement va devenir avec ces déchets. Au cours de cette journée dédiée à l’environnement, j’ai encore un peu plus peur.

Les Ecorununing reprennent quand ? Allez-vous changer de stratégies ?
Je n’ai aucune idée de quand les regroupements peuvent reprendre. Donc je ne saurai dire quand est-ce que nos Ecorunning vont reprendre. On verra sous quelle forme on pourra reprendre. Ecorunning, c’était pour sensibiliser les populations. Mais je pense qu’aujourd’hui, pour les fois à venir, il faut trouver un moyen de sensibiliser nos autorités à faire ce qu’elles doivent faire. Je ne pense pas que toute la responsabilité soit du fait des populations. S’il y a des sensibilisations à faire, c’est aller plutôt vers les autorités, celles qui doivent prendre les bonnes décisions.
Propos recueillis par Fulbert ADJIMEHOSSOU



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