UAC/formation du comité scientifique sectoriel : le professeur Médé exprime son mécontentement

26 avril 2021

MEDE Nicaise

Professeur des universités
Université d’Abomey-Calavi
Abomey-Calavi le 25 avril 2021

A
Monsieur Maxime da Cruz
Recteur de l’Université d’Abomey-Calavi
Abomey-Calavi
Objet : Recours

Monsieur le Recteur,
Les textes qui nous régissent actuellement indiquent que les comités scientifiques sectoriels sont des démembrements du conseil scientifique de l’université. Ils sont compétents pour deux catégories de tâches : (i) le premier screening des dossiers de jeunes docteurs candidats au recrutement des nouveaux assistants, (ii) l’examen et la présentation des dossiers des collègues candidats pour les différents grades du CAMES. Le comité scientifique sectoriel est donc un rouage essentiel dans l’entrée et la suite de la carrière des enseignants-chercheurs. La question du "qui l’anime ?" devient, du coup, une question d’importance et le Président et le secrétaire permanent se doivent d’avoir un profil respectable, je veux dire avoir un casier académique vierge. C’est a minima, ce qu’on peut exiger des prétendants à ces fonctions.
Ma surprise est donc à son paroxysme lorsque j’apprends que des élections en catimini ont eu lieu la semaine dernière, qu’il n’y a pas eu de campagne électorale qui pût nous informer des candidats en présence et qu’à l’arrivée c’est Ibrahim Salami qui est élu Président du comité scientifique sectoriel de droit. Je vous exprime aussi brutalement que possible mon sentiment, Monsieur le Recteur, cette issue est simplement I-R-R-E-C-E-V-A-B-L-E.
De ce que je sais, de toute l’histoire cinquantenaire de l’Université d’Abomey-Calavi, c’est la première fois et la seule fois à ce jour qu’un enseignant-chercheur est sanctionné par le CAMES pour plagiat. Pour mémoire, permettez-moi de le rappeler, Monsieur le Recteur, le plagiat est la faute de celui qui s’attribue indûment et frauduleusement l’œuvre intellectuelle d’une autre personne. C’est de la filouterie intellectuelle, du hooliganisme académique, en un mot, le degré zéro du professionnalisme universitaire.
J’ai écrit à Madame le Ministre, notre Ministre que ce tour de force qui a conduit à la tête du comité scientifique sectoriel n’est tout simplement pas imaginable dans les universités africaines sérieuses, celles qui sont dans notre environnement géographique immédiat. Point n’est besoin d’évoquer Yale, Cambridge ou Oxford. Cape Town, Ilé Ifè, Lagon suffisent à donner le change de ce qui est normal et bienséant quand on se retrouve dans des situations de cette nature. Nous sommes au seuil de la forfaiture Monsieur le Recteur, si nous bradons l’héritage des pères fondateurs. L’Université d’Abomey-Calavi, c’est l’université d’Edouard Adjanohoun, l’université d’Henri-Valère Kiniffo (le pape), l’université de Paulin Hountondji, lesquels ont forgé à l’entité que vous avez l’honneur de diriger, ses lettres de vertu et d’excellence. En quoi sommes-nous légitimes à faire moins si nous ne pouvons faire plus ?
Monsieur le Recteur, dans les circonstances présentes, votre responsabilité est immense. La rallonge qui vous a été accordée est pour expédier les affaires courantes. Elle ne vous autorise pas à changer les structures par des élections calamiteuses. Le Prélat nous enjoignait de "garder la tête froide et le cœur chaud." Ménager votre plume et gardez-vous d’entériner des résultats qui, de toutes les façons, seront au cœur du débat public dans les prochaines semaines. Ne dégradez pas votre renommée et entrez dans l’histoire avec un visage honorable, pendant que "l’œil reste dans la tombe et dévisage Caïn".
Monsieur le Recteur, vous le savez, notre maison commune connaît des critiques croisées de la part de ceux que nous avons la mission de servir, les 10 millions d’intelligences béninoises. Nous y prêtons le flanc par nos comportements pas toujours vertueux : la marchandisation des diplômes, les doctorats de complaisance, le niveau intellectuel même des collègues qui rase les profondeurs d’un puits de pétrole, etc. Vous avez pris des initiatives correctives et salutaires. Vous êtes évidemment dans la solution aux problèmes. Ne vous dégradez pas, ne devenez pas une partie du problème, des problèmes.
Veuillez accepter, Monsieur le Recteur, l’expression de mes salutations les plus cordiales.

MEDE Nicaise
Professeur des universités



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