"Entre ciel et terre" : Lionel Gomez, le poète qui plane

Arnaud DOUMANHOUN 21 janvier 2015

C’est un recueil de quarante textes aux formes variées, et habités par un foisonnement thématique intense. Le livre s’ouvre sur deux poèmes qui parlent de rêve. On peut se le résumer : le chemin vers le rêve est long et nécessaire, et le séjour dans les vappes est si douillet et enchanteur, qu’il est dur d’en revenir. Mais l’exercice s’impose. Et c’est cela que le poète nous propose. Il faut oser rêver, apprendre à rêver, descendre de son rêve, et le rendre à la réalité. C’est dans ce sens qu’il coince la réalité dans son livre. Quel rêve pour l’Afrique ? Quel rêve des jeunes africains pour eux-mêmes et pour leurs pays respectifs ? Comment arracher son rêve à l’abstraction ou même à l’absurdité qui lui impose des contours irréels ? C’est à tout cela que répond ce texte aux allures simplistes. On peut voir à travers cette posture, le poète dans un rôle d’éducateur. Normal, l’auteur est enseignant, et même responsable administratif. Ce qui explique en partie les choix thématiques. Le deuxième poème parle aussi de rêve, mais évoque les errances et la désillusion face à l’âpreté de la vie qui peut se montrer au départ assez attirante et pleine de promesses, pour être par la suite, amère et décevante, révoltante même. Mais c’est la chute qui imprime une autre dimension au message transmis par ce poète rêveur. L’ailleurs est un appât dangereux, qui accroche le plus souvent l’adolescence, si tentée et si faible et ingénue : ‘’et là-bas, dans ce pays hostile et austère, je commence à me haïr, à me détester, à tout déprécier, et je mourrai peu à peu de désespoir et de détresse", écrit-il.
Le rêve est donc la matière et le quotidien, la priorité et la finalité. Le rêve, c’est le début de toute chose. Si dans le premier texte, on peut croire aux vertus du rêve, il faut noter dans le deuxième, qu’il faut savoir rêver. Ne pas savoir s’y prendre, ou ne pas bien choisir le moment de son rêve, peut être fatal. C’est une mise en garde et l’image de l’éducateur se présente, plus en gras. L’instant de rêve, c’est de n’appartenir ni à la réalité âpre de la terre, ni à la félicité béate du ciel, ou de ce qu’il en résulte comme symbole. D’ici découle une explication du titre du livre et surtout, de l’image de la première de couverture. Entre ciel et terre, cette atmosphère, ce no man’s land aérien où l’on se cherche, auquel on s’accroche. Et c’est justement pour aider à s’accrocher et à descendre de ses rêves, que le recueil finit par un autre texte qui exhorte à l’action : Invitation. C’est une invite à l’action, à la réalisation. Réalisation de soi, réalisation de ses rêves. Parce que justement, il n’y a que dans l’action, que l’on descend pour mieux se connaître. Et l’exemple est tout juste à côté, souligne l’auteur qui a proposé un texte dédié à un monument. Un peu comme pour dire : quand on rêve vraiment, et qu’on agit conséquemment, voilà celui que l’on devient : Prof Jean Marc Aurèle Affoutou.
D’autres thèmes sont aussi abordés, notamment l’amour ou l’amitié, la beauté de la nature ou l’union, la paix, les joies et les peines.... Dans la forme, point de complexe. Si mettre dans un même livre, des textes de natures différentes peut être une raison d’aimer, il n’apporte pas grand-chose aux règles établies dans le métier et donne au document, l’allure d’un cocktail curieux, dont la teneur en saveur littéraire, est diluée par un penchant croyant fidèle qui arrache tout détachement.



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