8ème audience publique à la Cour constitutionnelle : point des cinq (5) décisions rendues mardi 28 août 2018

La rédaction 29 août 2018

7 dossiers étaient inscrits au rôle de l’audience publique de ce mardi à la cour constitutionnelle. Cinq ont été examinés et les deux autres ont été renvoyés en octobre prochain pour continuation. Entre autres décisions rendues, il y a celle concernant le contrôle de conformité à la constitution, la loi portant charte des partis politiques en République du Bénin votée par l’assemblée nationale le 26 juillet dernier.

DECISION DCC 18-179 du 28 Août 2018
Par requête du 16 mai 2017 enregistré au secrétariat de la cour constitutionnelle le 17 mai 2017 sous le n°0874/134/REC-17, l’association des acquéreurs de parcelles de feu AHO GLELE René, représentée par Monsieur Jules BATONOU, secrétaire général de ladite association, sollicite l’intervention de la haute juridiction dans le règlement du conflit domanial les opposant à d’autres particuliers.
Le requérant expose qu’ayant acquis leurs parcelles de terrain auprès des héritiers AHO GLELE René suite à des décisions de justice, ils ont leur jouissance régulièrement troublée par les anciens occupants illégaux qui ont été expulsés lors de l’exécution desdites décisions. Il ajoute que c’est dans ces conditions que le gouvernement en sa séance du 15 juin 2016 a rendu les domaines de terrain des héritiers AHO GLELE René indisponibles alors même que les décisions de justice devenues définitives étaient en cours d’exécution. Il précise que cette situation leur crée de préjudice et porte atteinte non seulement à leur droit de propriété mais aussi à leur sécurité, leur vie étant en danger car n’ayant la protection d’aucune unité de sécurité. Il sollicite l’intervention de la cour pour le règlement du conflit qui perdure. Le secrétaire général du gouvernement, appelé à faire ses observations sur la requête, n’a pas cru devoir répondre.
DECIDE :
La cour est incompétente

DECISION DCC 18-180 du 28 Août 2018
Par requête en date à Cotonou du 17 mai 2017 enregistrée au secrétariat de la cour constitutionnelle le 18 mai 2017 sous 0890/137/REC ; Monsieur Basile BADJITO forme un recours en inconstitutionnalité du décret n°86-69 du 03 mars 1986 portant statut et règlement intérieur de l’association nationale des praticiens de la médecine traditionnelle du Bénin (ANAPRAMETRAB).
Le requérant demande à la cour de déclarer contraire à la constitution le décret n°86-69 du 03 mars 1986 portant statut et règlement intérieur de l’association nationale des praticiens de la médecine traditionnelle du Bénin motif pris de ce qu’une association est une entité de droit privé et ne saurait être créée par décret. Il ajoute qu’à la page 2 de ce décret, le chapitre premier est intitulé : CREATION-DENOMINATION-SIEGE-DUREE, tout comme l’article 3 stipule que l’association est unique sur toute l’étendue du territoire national. Il en conclut que ce faisant, le gouvernement a agi en lieu et place de l’assemblée générale et donc en violation de la constitution.
En réponse, le ministre de la santé indique que le décret querellé le gouvernement a reconnu l’association nationale des praticiens de la médecine traditionnelle du Bénin et a autorisé la collaboration entre la médecine moderne et la médecine traditionnelle. Il ajoute que par ailleurs, bien que régie par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association, l’association nationale des praticiens de la médecine traditionnelle du Bénin est une organisation à vocation santé publique et qu’à ce titre, elle reste régie par des textes déontologiques et règlementaires spécifiques. Il précise que c’est le sens visé par l’encadrement du ministère de la santé qui permet de mettre en place un cadre réglementaire adéquat pour la pratique de la médecine traditionnelle.
L’article 25 de la constitution dispose : « l’Etat reconnait et garantit, dans les conditions fixées par la loi, la liberté d’aller et venir, la liberté d’association, de réunion, de cortège et de manifestation ». Il en résulte que la liberté d’association est un droit fondamental de la personne humaine garanti par l’Etat dans les conditions fixées par la loi et son exercice est d’initiative citoyenne et individuelle. Il appartient donc aux associés de convenir de la nature, de la forme et des modalités de leur regroupement.
Par ailleurs, aux termes de l’article 158 de la constitution ; « la législation en vigueur au Bénin jusqu’à la mise en place de nouvelles institutions reste applicable, sauf intervention de nouveaux textes en ce qu’elle n’a rien de contraire à la présente constitution » si par législation on attend les éléments de l’ordre juridique notamment les lois, les décrets, les arrêtés, etc… celle-ci ne survit au sens de l’article 158 de la constitution que si elle n’a rien de contraire à la constitution. En l’espèce, le décret visé constitue les associés dans une forme sociale qu’ils n’ont pas librement choisie. Il y a lieu de dire qu’un tel règlement est contraire à la constitution.
DECIDE :
Article 1er : Le décret n°86-69 du 03 mars 1986 portant statut et règlement intérieur de l’association nationale des praticiens de la médecine traditionnelle du Bénin est contraire à la constitution.

DECISION DCC 18-181 du 28 Août 2018
Par requête en date à Cotonou du 06 juin 2017, enregistrée au secrétariat le 07 juillet 2017 sous le numéro 1137/194/REC-17, Monsieur Arnauld J. HOUESSOU forme un recours pour violation du principe d’égalité par le Ministre du travail et de la Fonction publique.
Le requérant expose que Monsieur Gbènoukpo Joseph VODOUNON DJODO, titulaire du diplôme de master of arts en journalisme, a été recruté en 1998 et classé, comme ses autres collègues de qualification équivalente et en fonction dans les services de la presse écrite, à la catégorie A échelle 3, échelon 1er. Il révèle que, sur la base d’une nouvelle équivalence du même diplôme, il a de nouveau été reclassé à la catégorie A, échelle 1, échelon 1er par l’arrêté année 2016 n°9386/MTFPAS/SGM/DGFP/DRSC/SPCA/DPA du 15 décembre 2016. Selon lui, en agissant ainsi et sans étendre le bénéfice de ce traitement aux autres agents se trouvant dans la même situation, le ministre du travail et de la fonction publique a posé un acte discriminatoire et violé l’article 26 de la constitution.
En réponse, le ministre du travail et de la Fonction publique a sollicité, par lettre n°0753/MTFP/DC/SGM/DGFP/DECRD/SLC/SA du 04 avril 2018, une prolongation de délai pour produire ses observations qui n’ont pas été communiquées à ce jour à la Cour. De même, le requérant n’a pas accédé à la mesure de la Cour l’invitant à lui produire la preuve qu’il a sollicité sans suite favorable du ministre du travail et de la Fonction publique, le bénéfice du traitement fait à Monsieur Gbènoukpo Joseph VODOUNON DJODO.
Aux termes des articles 26 alinéa 1 de la constitution et 3 de charte africaine des droits de l’homme et des peuples : « L’Etat assure à tous l’égalité devant la loi sans distinction d’origine, de race, de sexe, de religion, d’opinion politique ou de position sociale » ; « toutes personnes bénéficient d’une totale égalité devant la loi ».
Sur le fondement de ces dispositions, la notion d’égalité s’analyse comme un principe général selon lequel des personnes relevant de la même situation doivent être soumises au même traitement sans discrimination. En l’espèce, il n’est pas établi que l’égalité de traitement ait été violée. En effet, le requérant n’a pas rapporté la preuve, d’une part, qu’il avait également droit au traitement fait à monsieur Gbènoukpo Joseph VODOUNON DJODO, d’autre part, que le ministre du travail et de la fonction publique s’est opposé à sa demande d’en bénéficier.
En conséquence, il y a lieu de déclarer qu’il n’y a pas violation de la constitution.
La Cour DECIDE :
Il n’y a pas violation de la constitution.

DECISION DCC 18-182 du 28 Août 2018
Saisie par lettre en date à Cotonou du 24 juillet 2018 enregistrée à son secrétariat le 02 aout 2018 sous le numéro 1594/237/REC-18, par laquelle le président du tribunal de première Instance de première classe de Cotonou par intérim à transmis à la Cour le jugement ADD N°023/2018/1ère C.S du 12 juillet 2018, aux fins de statuer sur l’exception d’inconstitutionnalité soulevée par Monsieur Gafar A. AMINOU, assisté de Maîtres Olga ANASSIDE et Nicolin ASSOGBA, dans la procédure judiciaire n°Coto/2015/RG/09075, AMINOU Gafar Adjibadé Ayindé Junior C/ADEBO Gafari Akanni et un autre ;
Considérant qu’au soutien de l’exception d’inconstitutionnalité soulevée, le requérant allègue que l’article 839 du code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes est contraire à la constitution en ce que son articulation, qui pourrait laisser penser qu’elle peut utilement être invoquée devant une formation juridictionnelle statuant au fond alors que son emplacement dans ledit code s’oppose à cela, n’offre pas les garanties nécessaires d’un procès équitable.
Considérant que dans sa décision DCC 11-011 du 25 février 2011, la haute juridiction a déclaré conforme à la constitution, en toutes ses dispositions, la loi n°2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes votée par l’assemblée nationale le 16 octobre 2008 et mise en conformité à la constitution le 26 octobre 2010 suite à sa décision DCC 09-120 du 06 octobre 2009 ; qu’il s’ensuit que l’article 839 du code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes a été déjà déclarée conforme à la constitution ; qu’en conséquence, en vertu de l’article 124 alinéas 2 et 3 de la constitution aux termes duquel : « les décisions de la cour constitutionnelle ne sont susceptibles d’aucun recours. Elles s’imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités civiles, militaires et juridictionnelles », il y a lieu de déclarer irrecevable l’exception d’inconstitutionnalité soulevée ;
DECIDE :
Article 1er : l’exception d’inconstitutionnalité soulevée par Monsieur Gafar A. Junior AMINOU est irrecevable

DECISION DCC 18-183 du 28 Août 2018
La cour constitutionnelle, saisie d’une requête en date à Cotonou du 22 Août 2018 enregistrée à son secrétariat le 23 août 2018 sous le numéro 1748/249/REC-18, par laquelle Monsieur le président de la République, Patrice TALON, sur le fondement des articles 117 et 121 de la constitution, défère à la haute juridiction pour contrôle de conformité à la constitution, la loi n°2018-23 portant charte des partis politiques en république du Bénin votée par l’Assemblée nationale le 26 juillet 2018 ;
Considérant que la requête de Monsieur le président de la république trouve son fondement dans les dispositions des articles 117 et 121 de la constitution et 20 de la loi n°91-009 du 04 mars 1991 portant loi organique sur la cour constitutionnelle modifiée par la loi du 31 mai qui instituent à son profit une faculté de saisir la haute juridiction aux fins de contrôle de constitutionnalité des lois qui ne relèvent pas, comme en l’espèce, du domaine du contrôle a priori ;
Considérant qu’en outre, la loi soumise au contrôle de la cour, votée par l’Assemblée nationale le 26 juillet 2018, a été transmise au Président de la République le 09 août 2018 ; que le Président de la République a saisi la cour constitutionnelle le 23 août 2018, soit dans le délai de quinze (15) jours prescrits par l’article 57 de la constitution, que sa requête est recevable ; Considérant que l’examen de la loi déférée révèle que toutes ses dispositions sont conformes à la constitution ;
La cour DECIDE :
Article 1er : Toutes les dispositions de la loi n°2018-23 portant charte des partis politiques en République du Bénin sont conformes à la constitution.



Dans la même rubrique