Après l'interpellation manu militari du juge Angelo Houssou : L'Unamab exige le respect du principe de l'indépendance de la justice

Moïse DOSSOUMOU 23 mai 2013

Le chef de l’Etat, le Procureur de la République, le Directeur général de la police nationale, l’avocat Paul Kato Atita sont tous dans le viseur de l’Union nationale des magistrats du Bénin (Unamab). Au terme de l’Assemblée générale extraordinaire qui s’est tenue hier, ses membres par la voix de leur porte-parole, Serge China, après s’être indignés du traitement infligé à l’un des leurs, en l’occurrence le juge Angelo Houssou depuis le vendredi 17 mai dernier, rappellent au chef de l’Etat qu’il est garant de l’indépendance de la justice et de la sécurité des magistrats. Aussi, ont-ils tenu à souligner que la police judiciaire s’exerce sous la direction du Procureur de la République et non celle du directeur général de la police nationale. La restitution sans délai au juge Houssou de son passeport arbitrairement saisi fait partie intégrante de leurs exigences. Déterminée à mener la lutte avec succès, l’Unamab invite ses membres à rester mobilisés pour la suite des événements.

DECLARATION DE PRESSE DU BUREAU EXECUTIF DE L’UNION NATIONALE DES MAGISTRATS DU BENIN

Réunie en Assemblée Générale extraordinaire ce jour, mercredi 22 mai 2013, l’Union Nationale des Magistrats du Bénin (UNAMAB) a procédé à une analyse des circonstances de l’interpellation du juge du 6ème cabinet d’instruction du Tribunal de Première Instance de Première Classe de Cotonou.

Après examen des faits, l’UNAMAB a relevé ce qui suit :

Le vendredi 17 mai 2013, après avoir rendu deux ordonnances concernant les deux affaires dans lesquelles le Chef de l’Etat est partie civile, le juge HOUSSOU a été interpellé à la frontière de Kraké aux environs de 21 heures 30 minutes sur les instructions du Directeur Général de la Police Nationale alors qu’il accomplissait les formalités de visa pour se rendre au Nigéria. Conduit à la Direction Générale de la Police Nationale, il y a été gardé, ses effets personnels fouillés et le contenu rendu public. Le lendemain à 7 heures 20 minutes, il a été reconduit à son domicile sous escorte policière. Depuis lors, son domicile est assiégé par des agents dont il ignore l’identité. Ses mouvements sont contrôlés et parfois soumis à l’autorisation du Directeur Général de la Police Nationale et du Chef d’Etat-Major Général des Armées. Pendant la séquestration du juge HOUSSOU, un communiqué prétendument signé du Procureur de la République près le tribunal de Cotonou critiquant les ordonnances rendues par lui a été diffusé sur les chaînes de télévision.

Interrogé par l’Assemblée Générale de l’UNAMAB, le Procureur de la République affirme n’avoir jamais signé un tel communiqué ni instruit le Directeur Général de la Police Nationale aux fins de saisir le passeport du juge HOUSSOU.

Tous ces faits, aussi graves les uns que les autres, participent, selon l’UNAMAB, d’un plan savamment orchestré dans le but de priver le juge HOUSSOU de la jouissance de ses droits constitutionnels, de jeter le discrédit sur les ordonnances rendues et de faire ainsi pression sur les juges de la chambre d’accusation chargées de connaître en Appel desdites ordonnances.

En conséquence, l’UNAMAB :

 Rappelle au chef de l’Etat qu’il est garant de l’indépendance de la justice, de la sécurité des magistrats, et en particulier de celle du juge HOUSSOU, actuellement objet de menaces et de tracasseries ;

 Proteste avec vigueur contre les actes de violences et voies de fait, séquestration, violation de domicile et d’entraves à la liberté d’aller et de venir dont le magistrat HOUSSOU fait l’objet de la part du Directeur Général de la Police Nationale ;

 Rappelle au Directeur Général de la Police Nationale que la police judiciaire s’exerce sous la direction du Procureur de la République, sous la surveillance du Procureur Général et sous le contrôle de la chambre d’accusation ;

 Demande aux Procureurs de la République près les tribunaux de première instance de Porto-Novo et de Cotonou, d’interpeller les agents de la police impliqués dans les actes commis sur la personne du juge HOUSSOU et sur son véhicule ;

 Invite le Bureau Exécutif de l’UNAMAB à dénoncer au Conseil de l’ordre des avocats, les agissements de Maître KATO-ATITA qui n’est pas à son premier forfait ;

Par ailleurs, l’Assemblée Générale de l’UNAMAB exige du Gouvernement :

 la restitution sans délai au juge HOUSSOU de son passeport arbitrairement saisi ;

 la mise en place d’un dispositif de sécurité avec l’implication du juge HOUSSOU dans le choix des agents devant veiller sur sa sécurité ainsi que sur celle des membres de sa famille ;

 l’UNAMAB tient à rappeler à l’opinion publique que sa démarche ne doit pas être perçue comme une caution à une éventuelle violation des règles déontologiques mais plutôt vise à faire respecter le principe de l’indépendance du juge ;

L’UNAMAB invite ses membres à rester mobilisés pour les actions qu’appelleront l’inertie et l’indifférence du gouvernement.

Fait à Cotonou, le 22 mai 2013

L’Assemblée Générale de l’UNAMAB



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