L’intégralité de l’allocution de Malick Gomina, président du Cnpa

Isac A. YAÏ 20 février 2014

Distingués invités en vos rangs et grades,
Chers délégués aux assises,

Les professionnels des médias du Bénin par ma voix, voudraient vous souhaiter la bienvenue aux deuxièmes états généraux de la presse béninoise. Votre présence massive, est la preuve de l’intérêt que vous portez au devenir de notre corporation, et à son souci permanent de réflexions, afin de mieux diagnostiquer les difficultés de l’heure, avant de se projeter dans le futur.
Les états généraux de la presse, moment important dans la vie de notre presse, se tiennent aujourd’hui dans un contexte où Reporters Sans Frontières vient d’attester de l’amélioration de la liberté de la presse dans notre pays, du moins par rapport à ces cinq dernières années. Il n’empêche que les présentes assises, ouvrent de véritables pistes pour de nouveaux défis. Défis d’autant plus importants, que depuis les premiers états généraux de novembre 2002, douze années se sont écoulées ; douze années au cours desquelles, le paysage médiatique béninois, a connu d’incontestables mutations, au double plan qualitatif et quantitatif. S’impose alors à nous, l’évaluation du chemin parcouru depuis les historiques assises de Novembre 2002.
Il était véritablement temps de nous livrer à cet exercice d’évaluation, dans le contexte actuel en perpétuelles mutations ; il était temps de prendre en compte l’ouragan technologique qui souffle sur notre secteur, et bouleverse tout sur son passage, au point même de remettre en cause des notions basiques de notre professions. D’où de ns jours, de troublantes interrogations : Qu’est qui est médias et qu’est qui ne l’est pas ?

Nous avons tout d’abord, à adresser nos très vifs remerciements à tous ceux qui ont contribué à l’organisation des présentes assises ; en premier lieu le Gouvernement et son Chef, qui n’ont pas lésiné sur les moyens ; la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la communication (HAAC) qui a été le maître d’œuvre, en parfaite intelligence avec les associations professionnelles des médias ;le Ministère de la Communication et des Technologies Nouvelles, qui a aucun moment ne nous a marchandé son soutien... Merci aussi et surtout à toute l’équipe d’organisation et à son Chef, le vice-président de la HAAC, Edouard Loko, « ancien et futur confrère », qui a su si remarquablement honorer l’institution de régulation des médias. Merci enfin aux équipes en charge de la logistique pour leur travail ingrat, bien qu’essentiel.
Nos Assises, s’ils s’inscrivent dans la continuité de la réflexion amorcée ensemble lors des premiers états généraux de la presse béninoise, sont très différentes dans leur propos et dans leur organisation. D’abord parce que pour leur préparation, nous nous sommes fortement appuyés sur les acteurs des médias ; et nous allons donner plus de place aux témoignages et aux expériences de quelques aînés. Par ailleurs, cette plongée vers le terrain s’accompagne d’une ambition prospective, qui nous a paru indispensable en raison des changements que connaît notre presse, et de la nécessité pour nous, acteurs des médias, de les accompagner, voire de les précéder. Enfin, comparativement à 2002, nous avons élargi la participation à davantage de représentants de médias, d’une part ; et à plus de personnes ressources et représentants d’institutions, d’autre part.
Le thème de nos états généraux, cette fois-ci, est intitulé « Enjeux et défis de la professionnalisation ». Ce choix traduit manifestement notre souci ardent, de ne pas perdre nos repères professionnels. C’est pourquoi nous avons unanimement décidé de nous arrêter un moment, de mettre en commun nos expériences, de discerner les nouveaux besoins, d’envisager les réponses nouvelles, en un mot de rebâtir notre presse. Nous avons le devoir de réfléchir à la manière dont nous, acteurs des médias, pouvons contribuer à retisser un tissu économique et professionnel, qui s’effiloche de plus en plus dans le monde des médias, et ceci depuis longtemps.
Car, nos difficultés ne résultent point d’une simple crise passagère, comme on pourrait le penser. Elles sont d’ordre structurel. De fait, une véritable métamorphose s’impose. Aussi, le droit spécifique aux médias exige-t-il de nous, acteurs du secteur, un toilettage certain et urgent. Les organes de presse sont condamnés à devenir de véritables entreprises de presse conduites avec le management requis. Le professionnel des médias a besoin d’une sécurité sociale, qui l’assure et le rassure ... Cela commence par une formation en adéquation avec les normes du métier. Et puisqu’il faut bien restaurer la profession, nous entendons jouir pleinement de la liberté attachée à notre métier, sans perdre de vue les inéluctables gages de responsabilité que nous devons à la société. Il ne serait pas superflu, de rappeler que c’est une œuvre de patriotisme, que d’aider les médias du secteur public à se réconcilier avec le public et à le servir réellement. Il va sans dire qu’au niveau du service public de l’information, nombre de nos compatriotes et pas des moindres, dénoncent les problèmes d’accès équitables, et pointent du doigt un déséquilibre criard de l’information au profit de l’exécutif... Nos assises doivent fournir les outils pour dépoussiérer les textes au niveau de ce secteur, et à les adapter à leur mission première, qu’est le service public. Quant à l’aide de l’Etat à la presse privée, elle devra rapidement se muer en un fonds dévolu aux financements structurants, pour la consolidation des entreprises de presse dans notre pays. Et ce financement devra se faire en toute équité, ceci nonobstant la ligne éditoriale des organes demandeurs. Mais pour ce faire, nous en appelons à notre sens collectif de responsabilité, afin que l’assainissement se poursuive au sein même de la corporation. C’est une évidence que quelques brebis galeuses, en rupture de banc avec l’éthique et la déontologie, nuisent tant à notre image...Il va falloir ici et maintenant faire des choix...Et cette entreprise gigantesque de restructuration, ne sera possible, que dans un cadre solidaire autour des enjeux communs. Dès l’entame de nos travaux, d’ailleurs, des personnes ressources internes et externes de la presse, et aux expertises diverses, sont chargées de nous planter le décor à travers quelques thèmes ciblés, histoire de nous conduire au cœur des questions qui nous préoccupent.
Autour des centres d’intérêt que nous énumérions tout à l’heure –la liste n’est pas exhaustive- nous souhaitons que les débats soient ouverts, francs, dépassionnés mais fortement passionnants. Nous n’en doutons d’ailleurs pas, puisque nous avons désormais la preuve que chacun a pris la pleine mesure de l’importance des changements attendus. D’où l’engouement collectif noté lors des préparatifs. Pour preuve, je voudrais préciser que dans le secteur des médias, tout le monde aimerait prendre part à nos travaux. A contrecœur, les associations professionnelles ont dû procéder aux arbitrages nécessaires tout en tenant largement compte de la variété des compétences en leur sein, puis de la situation géographique des médias de provenance. Nous remercions les uns et les autres pour avoir compris ces contraintes d’espace et de budget.
.
Les menaces qui pèsent sur la presse et son rôle dans la cohésion sociale du pays, nous ont déjà mobilisés lors de nombreux ateliers de moins grande ampleur. De même nous revenons de temps à autres dans nos rencontres, sur les obstacles à l’épanouissement des entreprises de presse ,au nombre desquels nous pouvons citer entre autres, une fiscalité mal adaptée, les multiples dettes non remboursés par les structures étatiques...Mais au regard de la place des médias dans la vie de la cité et dans le débat démocratique, la réflexion que nous conduisons en permanence sur le « vivre ensemble », font de nous des corps intermédiaires indispensables à l’équilibre, non seulement de la vie sociale, mais aussi et surtout à celui de la démocratie ; c’est ainsi que nous voulons être considérés et entendus.
Le Président de la République nous a fait l’honneur de sa présence à la présente cérémonie d’ouverture. Au-delà de l’honneur qui nous est fait, nous nous permettons de penser, que sa seule présence est déjà en soi, une reconnaissance supplémentaire, de la qualité de l’action et de la réflexion que nous conduirons ensemble. Mais votre présence Mr le Président de la République, témoigne aussi de la nécessité d’un dialogue de fond, entre les décideurs politiques et les acteurs des médias. Tous, à des degrés divers certes, accomplissent une même mission d’intérêt public. Votre présence est aussi sans aucun doute, le gage que les résolutions et recommandations issues de nos travaux, bénéficieront de votre indispensable accompagnement. Votre présence enfin, pensons-nous, est votre manière de réitérer l’engagement pris par votre gouvernement au cours du Conseil des ministres du 28 janvier 2008, d’introduire une loi visant à supprimer les peines privatives de liberté du droit des médias au bénin.
Monsieur le Président de la République, nous vous remercions d’avoir voulu nous donner cette assurance en personne.
Pour notre part, il ne nous reste qu’à nous souhaiter à nous-mêmes, un excellent congrès pour de fructueuses options.

Merci pour l’attention.



Dans la même rubrique