Chronique judiciaire : Acquitté au bénéfice de doute

Isac A. YAÏ 6 avril 2018

Justin Kpéidja est désormais libre de ses mouvements. Accusé d’avoir porté des coups mortels à sa femme Blandine Batossi en novembre 2011, ce qui a causé la mort de celle-ci le 09 janvier 2012, Justin Kpéidja a été présenté à la cour d’assises le jeudi 5 avril 2018. En effet, courant novembre 2011, au cours d’une dispute, le nommé Justin Kpéidja aurait arraché le coupe-coupe que brandissait sa femme Blandine Batossi et aurait asséné des coups de machette à cette dame enceinte de 7 mois. Les mêmes scènes de violences se seraient répétées plusieurs fois. Quelques semaines plus tard, soit le 09 janvier 2012, celle-ci a rendu l’âme et son corps ensanglanté a été conduit à la morgue traditionnelle de Ouègbo par son mari qui s’est ensuite enfui dans son village Aïfa dans la commune de Zè.
Hier à la barre, l’accusé n’a pas reconnu les faits. Dans ses explications, il reconnaît avoir eu de fréquentes disputes avec sa femme car cette dernière commettrait l’adultère avec son ex-mari. A l’approche des fêtes, ses sorties deviennent intempestives. C’est ainsi qu’en novembre 2011, ils ont eu une violente dispute. Il reconnaît avoir une machette en main lors de la dispute mais n’en a pas fait usage. Et lors de cette dispute, un voisin lui a arraché la machette.
Les propos de l’accusé à la barre, contraires à ceux tenus au commissariat et devant le juge d’instruction, ont amené Christophe Atinmakan, président de la Cour, Christian Atayi, représentant le ministère public et Angelo Hounkpatin, avocat de la défense à lui poser plusieurs questions d’éclaircissement. Dans son développement, Justin Kpéidja se contredit par moments. A l’en croire, il n’aurait rien dit au commissariat. Le procès-verbal qu’il a signé, il l’a fait parce que les agents le lui ont demandé. Dans ce même procès-verbal, il est dit que le corps a été conduit à la morgue par le mari, alors qu’à la barre, il a déclaré qu’il était absent au moment du décès de sa femme. Il a donc été informé par quelqu’un d’autre. A l’en croire, sa femme est morte non pas à cause de la dispute, mais suite à des complications lors de l’accouchement. Invitée à la barre, dame Ida Dégbé, aide-soignante au centre de santé où Blandine Batossi était supposée recevoir les soins, a déclaré que c’est le cadavre de cette dernière que certains individus avaient amené dans le centre. Elle n’a donc reçu aucun soin dans ce centre avant de mourir.
Dans son réquisitoire, le ministère public, partagé entre l’innocence de l’accusé et la justice attendue par les familles de Blandine Batossi, a évoqué l’alinéa 4 de l’article 309 du code pénal pour s’appesantir sur les coups et blessures. A l’en croire, une autopsie aurait pu permettre d’établir de façon scientifique les causes de la mort de Blandine Batossi. Mais par faute de moyens, cette autopsie n’a pas été faite. « Mais cela n’empêche pas de dire que les violents coups répétitifs sont à l’origine de la mort de Blandine Batossi car, celle-ci était enceinte, donc très vulnérable. Une simple violence verbale pouvait provoquer sa mort. Il y a donc un lien entre les coups répétitifs et la mort de Blandine Batossi », a-t-il précisé.
Tous les éléments constitutifs des coups et blessures mortels étant réunis, il a requis 10 ans de travaux forcés contre Justin Kpéidja et la confiscation de sa machette.
Prenant la parole, la défense s’est désolée des propos du ministère public car, selon Maître Angelo Hounkpatin, le doute profite toujours à l’accusé. Or, dans ce dossier, il n’y a ni certificat médical encore moins une autopsie pour établir scientifiquement les causes du décès de dame Blandine Batossi. « Il y a beaucoup de lacunes dans ce dossier. Et cette défaillance peut amener à la condamnation d’un innocent. La présence de sang dans les narines et dans la bouche du cadavre est le signe de l’hypertension fréquente chez les femmes enceintes.. au regard de tout cela, il n’y a pas de charges ni de preuves contre l’accusé. Il faut donc l’acquitter », a déclaré Maître Hounkpatin.
Après une suspension, la cour a repris. Se basant sur les articles 360 à 363 du code de procédure pénale, la cour, présidée par Christophe Atinmakan, a acquitté Justin Kpeidja au bénéfice du doute. Elle a ordonné sa libération immédiate si d’autres charges ne sont pas retenues contre lui.



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