Editorial : Des mots pour guérir des maux

Moïse DOSSOUMOU 17 janvier 2018

Les mots ont été choisis à dessein. Prononcés avec soin et solennité, ils ont la résonance de l’émotion. Dans la salle feutrée du palais de la République qui a abrité hier la cérémonie de présentation des vœux des institutions de la République au chef de l’Etat, l’ambiance était tout à la fois grave et détendue. Grave parce que les premières semaines de l’année nouvelle sont plutôt éprouvantes pour le gouvernement et l’Assemblée nationale qui se sont retrouvés dans le viseur de certaines catégories socioprofessionnelles de travailleurs. Détendu parce que chacun des acteurs publics présents dans la salle du peuple nourrit l’espoir que l’essentiel sera sauvegardé au nom de l’intérêt général. Conscients des enjeux et de la délicatesse du moment, les deux intervenants au pupitre, à savoir les deux premières personnalités de l’Etat, ont essayé de calmer la tension.
Adrien Houngbédji, qui a pris la parole au nom des institutions de la République, a planté le décor. Croyant à la pertinence et à la sincérité des réformes en cours depuis le 6 avril 2016, il a souhaité plein succès au locataire du palais de la Marina. « Les institutions de la République ne se contentent pas de suivre vos actions, elles les accompagnent chacune dans l’observance de leurs attributions respectives ». Néanmoins, Houngbédji estime qu’il reste un pas crucial et déterminant que l’Exécutif devra se résoudre à franchir. « Les institutions de la République apprécieront que l’ancrage démocratique de notre pays soit consolidé et approfondi ; que la sécurité juridique des acteurs privés comme publics soit toujours garantie, et qu’un dialogue exigeant et positif soit poursuivi avec les partenaires sociaux et économiques ».
A son tour, le chef de l’Etat ne s’est pas embarrassé de formules creuses, longues et évasives pour se faire entendre. Comme un buffle, il est allé droit au but. « La présente cérémonie se tient à un moment où une partie de notre élite intellectuelle, syndicale et politique s’interroge encore et de manière vive, sur la pertinence des choix qui, quoique difficiles, concourent à la construction progressive et durable de notre cher pays ». Certes, le chef de l’Etat est dans son rôle. Il déroule son plan. Mais la méthode relative à la gestion des hommes, notamment des travailleurs laisse quelque peu à désirer. S’il est vrai qu’il a l’initiative de la décision et même de la coercition, il est aussi vrai qu’il doit s’assurer d’un minimum de consensus pour des réformes douloureuses comme celles-là. Dans le cas d’espèce, il s’agit des libertés publiques dont la jouissance a découlé d’un long combat.
Le chef de l’Etat veut que « l’Etat, dans son organisation, dans sa gestion, dans son administration et dans le comportement de ses agents, rende compétitif notre espace économique et social ». Noble ambition mais dont la réalisation appelle l’adhésion de tous les Béninois et de toutes les Béninoises. Cette adhésion se fera non pas à marche forcée mais elle doit être la résultante d’un engagement et d’une détermination à œuvrer pour le salut de tous. Cette décision que chaque citoyen est appelé à prendre découlera essentiellement du degré de crédibilité voué aux dirigeants. Le gouvernement et les autres institutions de la République ne peuvent à eux seuls conduire le Bénin au progrès. Cela doit se faire ensemble dans un large esprit d’ouverture et de compromis. Fort heureusement, Adrien Houngbédji l’a compris et l’a martelé hier au palais de la République. « La réussite est au bout du dialogue ; le dialogue est le prix du succès ».



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