Editorial : La prière n’est pas le développement

Moïse DOSSOUMOU 8 avril 2014

C’est devenu une habitude. Le gouvernement est friand des prières. Dès qu’apparaît la plus petite difficulté, dès qu’un mobile de joie pointe à l’horizon, aussitôt se met en branle la machine des suppliques à l’Etre suprême. Le régime du changement devenu celui de la refondation a fait le choix de composer avec la prière pour relever les défis de développement qui s’imposent à lui. C’est ce qui explique d’ailleurs ce perpétuel recours aux lieux de culte dont ne se lassent point l’Exécutif et son chef.
Tenez. Dans ce pays et pas plus tard que l’année écoulée, il nous a été demandé avec grande insistance de prier pour faire tomber la pluie indispensable à la croissance des plants de coton. Pourtant, la science a développé des techniques qui permettent de regrouper les nuages afin de les faire tomber sous forme de pluie. Ce procédé utilisé fréquemment par nombre de pays pour favoriser la production agricole a fait ses preuves. Le Bénin n’a pas voulu aller à cette école. Ses dirigeants se sont contentés d’investir les églises, les mosquées, les temples et couvents pour demander à Dieu de faire tomber la pluie.
Le vendredi dernier, le Conseil des ministres adressait encore cette requête particulière au peuple béninois. Dans le cadre de la commémoration de l’an 3 du second et dernier mandat de Boni Yayi, le peuple a été appelé à prier pour la paix et la sécurité dans notre pays. Même pour un non-événement comme celui-là, on fait recours à la prière comme si la paix et la sécurité pouvaient s’obtenir juste en égrenant des chapelets de doléances au Tout-Puissant.
Même si « la religion est l’opium du peuple » comme l’affirmait Karl Marx, ce n’est pas une raison pour que les dirigeants d’un Etat, de surcroît laïc, prennent un vilain plaisir à fuir la réalité en laissant tout sur le compte de la providence. D’ailleurs, aucun pays au monde ne s’est développé par la prière. Placer un mandat sous le signe de Dieu, comme l’a fait Boni Yayi en 2011, ne justifie pas cette tendance à laquelle nous assistons. Avant lui, le Général Mathieu Kérékou l’a fait en 2001 et pourtant, le peuple n’a pas été convié à prier lorsque le gouvernement rencontrait des moments de difficulté.
« C’est en mer agitée que l’on reconnaît la qualité du bois du bateau ». C’est en démontrant leur capacité à sortir le Bénin de l’ornière, malgré les difficultés, que le chef du gouvernement et son équipe, recevront les lauriers du peuple. Ce qui est attendu d’eux, ce sont des décisions et des actes susceptibles d’améliorer la qualité de vie des populations. Le recours intempestif à Dieu ne règlera aucun problème. Bien au contraire. La seule arme qui puisse vaincre le sous-développement, c’est le travail.



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