Editorial : Sous l’emprise de l’improvisation

Moïse DOSSOUMOU 14 janvier 2015

Le système de gouvernance au Bénin a pour nom improvisation. Les dirigeants autant que le citoyen lambda s’en accommodent. Même sur des questions sérieuses qui engagent la vie de la nation et autour desquelles la mobilisation des éminences grises doit être de mise, c’est à un flou artistique qu’on assiste. Chacun selon sa position vogue au gré de ses intérêts, entretient la diversion, embrouille les cartes et redevient tout à coup républicain dès qu’un danger pointe à l’horizon. Cette propension qui consiste à surfer sur les vagues de l’irresponsabilité et de l’indécision est la résultante du faible intérêt que nourrissent les Béninois pour le développement de leur pays.
Sinon, comment comprendre que la Liste électorale permanente informatisée (Lépi) dont la confection était censée donner plus de crédibilité aux consultations électorales ne cesse de susciter des remous depuis un quinquennat, alors que d’autres pays de la sous-région aux ressources limitées comme le nôtre se sont dotés d’un tel instrument dans des délais réduits sans pour autant verser dans l’incertitude ? La lourde cagnotte évaluée à près de 53 milliards consacrée à cette opération de 2010 à ce jour n’a toujours pas produit les résultats escomptés. Et pourtant, ce ne sont pas les ressources humaines de qualité qui manquent à l’appel.
L’anticipation qui est un principe clé de la bonne gouvernance n’est qu’une vue de l’esprit par ici. On préfère, au lieu de faire de sérieuses projections et de travailler en conséquence pour atteindre des résultats durables, jouer aux prolongations, tirer avec impertinence la queue du diable, procéder aux rafistolages, le tout sur fond de précipitation. Et à la fin, on parvient non sans peine à des dénouements mitigés indignes de l’intelligentsia béninoise.
Depuis 2008, on savait que 5 ans plus tard, il fallait procéder au renouvellement des conseils municipaux, communaux et locaux. Au terme convenu et fixé par la loi, c’était trop demander à l’Assemblée nationale et au gouvernement de prendre leurs responsabilités. De la même manière, après les scrutins de 2011, c’était évident que la liste électorale devrait être revue dans les meilleurs délais. Et pourtant, rien n’y fit. La politique du pourrissement a, une fois encore, damé le pion à la bonne gouvernance. A ce jour, on ne peut jurer de la qualité de la nouvelle liste électorale dont l’affichage n’est pas encore une réalité. La Cena et le Cos-Lépi, censés se donner la main pour un aboutissement heureux du processus électoral se tirent déjà entre les pattes et cela ne fait que commencer.
Dès 2016, il va falloir passer à un nouveau système de gouvernance. « Aux grands maux, les grands remèdes ». La tâche sera ardue. Mais si progressivement, les bonnes habitudes qui préservent les fonds publics de la gabegie et incitent à l’amour de la patrie, sont promues, le Bénin deviendrait, à partir de ce moment-là, un candidat sérieux au développement.



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