Editorial : Une diplomatie offensive pour le Bénin

Moïse DOSSOUMOU 25 avril 2016

Comparé au Sénégal et à la Côte-d’Ivoire, le Bénin est un mauvais exemple dans le domaine de la promotion de ses ressortissants sur la scène internationale. Pourtant, ce n’est pas de la matière qui manque. Des diplômés, des cadres de tous ordres et de tous les secteurs, il en existe à foison. Le Bénin est, en effet, l’un des pays où la volonté d’aller à l’école et d’y rester le plus longtemps possible est très poussée. En dépit du chômage et du sous-emploi, ils sont nombreux ces jeunes filles et jeunes garçons à s’engager avec enthousiasme sur le chemin des études universitaires. Il est révolu le temps où le diplôme de Brevet de technicien supérieur (Bts) et la licence ou encore la maîtrise avaient pignon sur rue. De nos jours, pour intégrer certains cercles, il faut être nanti d’un Master. Révolu aussi la période où le doctorat était l’apanage d’une pognée d’instruits. Maintenant, ils sont des centaines à tenter avec abnégation l’aventure de la thèse.
A juste titre, Emmanuel Mounier avait attribué à ce petit Etat du Golfe de Guinée, le titre de « quartier latin de l’Afrique ». Même si d’autres pays ont réussi à rehausser le niveau de leur système éducatif, même si l’école béninoise n’est pas exempte de reproches, il n’en demeure pas moins que ses produits continuent d’être prisés, ici et ailleurs. Pourquoi ne pas faire en sorte que les compétences et les talents made in Bénin rayonnent au niveau des instances de prises de décisions à l’échelle internationale ? Au niveau de l’Union africaine par exemple, quand les ressortissants d’autres pays bombent le torse, les voix des nôtres sont quasiment inaudibles. Fort heureusement, le Bénin dirige depuis quelques semaines la Commission de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao). Une première depuis bientôt 56 ans que nous sommes indépendants.
Que dire de l’Union économique et monétaire Ouest africaine (Uemoa) et même du Conseil de l’Entente ? Lorsqu’on se réfère à l’Organisation des Nations-Unies et à ses multiples organismes spécialisés, le Bénin est quasiment inexistant. Si les cadres béninois sont présents dans ces sérails, ils ne sont pas à des postes de grandes décisions. La plupart du temps, ils se contentent des seconds rôles pendant que leurs pairs d’autres Etats africains se pavanent sur les tapis rouges. La diplomatie étant l’art de mener des négociations entre gouvernements, de concilier de multiples intérêts ou encore de régler un problème sans recourir à la force, il est impérieux, pour une meilleure représentativité du Bénin et partant une visibilité plus accrue, que sa politique étrangère soit revisitée.
Au-delà des urgences et priorités auxquelles font face les acteurs de premier plan du Nouveau départ, il faut que le mandat de Patrice Talon diffère de ceux qui l’ont précédé à la tête de l’Etat, par sa politique étrangère. Les Béninois veulent voir leurs compatriotes à des postes de grande responsabilité au niveau des institutions internationales. Ce n’est pas chose impossible. Pourquoi ne pas inciter nos cadres à s’inscrire avec la bénédiction du gouvernement dans les écoles spécialisées qui facilitent l’accès à la fonction publique internationale ? Pourquoi nos diplomates, de manière proactive, ne détecteraient pas à temps les postes vacants ou ceux à pourvoir à court, moyen et long terme, pour qu’ensemble avec le ministre des affaires étrangères, ils positionnent déjà des Béninois à ces fonctions et enclenchent les négociations avec d’autres Etats à cette fin ? En un mot, une diplomatie offensive pour caser nos valeurs, nos talents et nos compétences. Au-delà de nos petites personnes, ce qui compte, c’est le Bénin.



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