En toute sincérité : Chambre à part !!

Naguib ALAGBE 19 mai 2017

Comme pratique, elle remonte à Mathusalem. Mais jamais, elle n’a été aussi controversée qu’en notre temps. L’immense majorité des contemporains jugent à tort ou à raison d’intolérable l’idée qu’au sein du couple, chacun puisse s’aménager un espace dédié, ou à son aise il peut se sentir par moments. Du coup, passion, frustration et déception se mêlent quand vient l’instant de décider pour le couple, son bien et parfois même sa survie. Dans bien de cas, mieux vaut ne même pas l’évoquer. C’est niet, et c’est sans demi-mesure.
Se pose dès lors, la délicate question de savoir si tant que ça, n’avoir qu’un lit pour deux est indispensable ? Un sociologue contemporain, Jean Claude Kaufman en l’occurrence, en dit que ‘’le lit est un révélateur très puissant de l’état du couple ainsi que des évolutions conjugales. C’est d’abord le lieu où se déroule le rapprochement intense des intimités, le lieu où nous nous abandonnons, toutes armes déposées, nus’’.
Et le même auteur de poursuivre, ‘’Quand l’amour n’est plus, c’est le lit qui le dit, car nulle part ailleurs, la présence de l’autre ne devient aussi intolérable’’.
L’intolérance justement, pourrait en être la base. Et dans ces conditions, faire chambre à part serait révélateur de notre propension à demeurer un tout petit peu nous, au moment où il est nécessaire de réaliser cette fusion imparfaite.
Certes, nous rêvons d’amour, nous ressentons le besoin d’une présence attentionnée à nos côtés, mais nous ne voulons pas disparaître en tant que personne autonome. C’est en cela d’ailleurs que cet espace peut s’avérer utile. C’est parfois pour ne pas entendre la respiration et le souffle de l’autre, pour ne pas voir l’expression de son visage, et pour prendre ses aises dans une position individuelle parfois hallucinante…
Il faut avouer par ailleurs, qu’au bout d’un moment, se faire réveiller 4 fois dans la même nuit par des ronflements ou parce que la personne qui partage votre lit se lève 3 fois pour aller aux toilettes peut devenir légèrement crispant. Alors, au lieu de lui donner des coups de coude, et si on s’offrait un petit lit rien qu’à soi, un havre de paix qui nous permettrait de se ressourcer ? Etre plus reposé éviterait peut-être les tensions au réveil qui commencent à peser sur notre humeur, et donc sur notre couple.
C’est donc parfois bien utile pour le couple, de recourir à cette option qui lui permet de se soustraire à ce qui pourrait paraitre comme des inconforts venant de l’autre, et de ne pas avoir à faire indéfiniment contre mauvaise fortune bon cœur.
In fine, un couteau à double tranchant qui, selon le cas, peut procurer au couple les moyens de sa survie ou alors, lui ôter toute chance de surmonter ses atermoiements.
Faire donc chambre à part, sans être l’idéal, n’est pas non plus une alternative à laquelle il faut se fermer systématiquement, pour n’y voir que le symbole de la mort programmée du couple. Quoique cela soit dur, il faut l’admettre, de se passer du rituel du coucher, ce moment câlin et affectueux pendant lequel on se blottit l’un contre l’autre se chuchotant mutuellement des je t’aime parfois insincères ?



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